Zimbabwe : fin de la campagne pour les élections générales


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Les Zimbabwéens se rendront aux urnes jeudi pour élire leurs parlementaires. Le climat pré-électoral n’a pas été marqué par les violences politiques, comme lors des scrutins de 2000 et 2002, mais l’opposition rapporte de nombreuses tentatives d’intimidation et de fraude. Constat que ne partagent pas les observateurs sous-régionaux.

Les Zimbabwéens s’apprêtent à élire, jeudi, 120 parlementaires dans une atmosphère d’un calme qui semble artificiel. S’il n’y a pas eu de rapports de violences lors de la campagne, comme cela avait été le cas lors des scrutins de 2000 et 2002, mais l’opposition rapporte de grosses irrégularités, au nombre desquelles des menaces, des intimidations et des fraudes. Constat que les observateurs sous-régionaux sur place ne cautionnent pas, estimant qu’il n’y a pas de preuves d’actions malveillantes.

Un militant du MDC tué

Les 5,8 millions d’inscrits devront donner leur voix à 120 parlementaires, alors que le Président Robert Mugabe désignera les trente sièges restant à pourvoir au parlement. Ce qui astreint le Mouvement pour un changement démocratique (MDC), principal parti d’opposition, à remporter 76 sièges pour être majoritaire. Un enjeu plus qu’essentiel, car d’aucuns estiment que si l’Union nationale africaine du Zimbabwe-Front Patriotique (Zanu-PF) du chef de l’Etat remporte la majorité, elle aurait alors tout le loisir d’ajuster la constitution pour réaffirmer le pouvoir de Robert Mugabe et de préparer sa succession.

La campagne a été marquée par des joutes verbales, plus ou moins vitriolées, entre le Président et son principal challenger Morgan Tsvangirai (leader du MDC). D’après les informations de la BBC, pour marquer des points, ce dernier ne s’est pas privé de fustiger le bilan catastrophique de Robert Mugabe, qui de son côté a notamment multiplié par dix le salaire minimum pour séduire une population qui manque de tout et qui vit dans un pays où l’inflation était de 350% en 2004, selon les chiffres du Fonds monétaire international. Généralement, peu de violences physiques. Mais Zimonline rapporte qu’un militant du MDC a été tué jeudi dernier par des supporters suspectés d’appartenir à la Zanu-PF. Cet assassinat serait le seul de cette préparation électorale.

L’opposition dénonce des intimidations et des fraudes…

Peu de violences physiques, mais des intimidations et menaces proférées afin que les votants s’expriment en faveur du « bon parti ». Les partisans du MDC seraient notamment privés d’aide alimentaire par les personnels qui la distribuent et qui sont pro-Zanu-PF. Les limites des circonscriptions auraient aussi été modifiées pour favoriser le parti au pouvoir. Une équipe de Zimonline a remarqué à Bulawayo (Centre-Sud), bastion du MDC avec Harare, que des milices pro-gouvernementales en treillis faisaient pression sur la population pour qu’elle vote Zanu-PF, au risque d’être la cible de représailles dont la nature n’était pas spécifiée. Une action qui aurait commencé lundi dernier. Ces affirmations ont fermement été démenties par Sikhanyiso Ndlovu, commissaire national adjoint de la Zanu-PF. « Il n’y a absolument rien de vrai dans tout ça. C’est un mensonge colporté par quelques individus qui pressentent la défaite aux élections. La Zanu-PF n’est pas un parti violent », a-t-il assuré à Zimonline.

Toujours au chapitre des accusations, le MDC accuse les chefs traditionnels des zones rurales soutenant le régime d’intimider leurs « sujets » pour qu’ils gratifient la Zanu-PF de leur vote. Ils dénoncent par ailleurs le trucage des listes électorales, ce que la Commission électorale du Zimbabwe (Zec) a aussitôt démenti, invoquant l’absence de preuves. Interrogé par l’Agence France Presse (AFP), David Coltart, candidat du MDC à Bulawayo, a expliqué qu’il a recensé au moins 9 000 personnes « qui étaient introuvables à l’adresse où elles étaient censées habiter ». Il a ajoute : « Si vous multipliez ce chiffre par 120 circonscriptions, vous arrivez à plus d’un million d’électeurs fantômes », des électeurs qui sont décédés ou qui n’existent pas.

David Coltart s’insurge aussi contre la Zec, qu’il juge « partisane », alors que Tendai Biti, chargé des affaires intérieures du MDC, s’en prend à Tobaiwa Mudebe, responsable du bureau de l’Etat civil. « Le truqueur général, dont nous avons toujours mis en doute l’impartialité, est toujours responsable des listes électorales et peut à sa guise enlever des noms des listes et faire ce qu’il souhaite », affirme Tendai Biti. La Zec ne trouve rien à redire sur le travail de cette administration et demande encore une fois des preuves des allégations de l’opposition.

…les observateurs en demandent la preuve

Les observateurs en place n’ont également rien à reprocher à l’organisation du scrutin. Au contraire même. Selon Xinhuanet, la ministre sud-africaine des Mines et de l’Energie, à la tête des observateurs de la délégation de la Communauté de développement d’Afrique australe, a même fait « l’éloge des préparations du scrutin ». Concernant les accusations de l’opposition, Phumzile Mlambo-Nguka a déclaré « Nous leur demandons des noms et des circonscriptions (…) s’ils s’en tiennent à des généralisations, nous ne pouvons rien faire ».

L’Europe semble avoir décidé à n’accorder aucun crédit à cette élection, qu’elle juge, avant même sa tenue, « fantoche ». « Dès que ces élections fantoches se seront tenues, je peux assurer que le problème du Zimbabwe sera au programme la prochaine fois que nous nous rencontrerons (au conseil des ministres de l’Union européenne, ndlr) », a expliqué le vice-ministre des Affaires Etrangères du Luxembourg. Des mesures pourraient alors être prises contre le régime de Robert Mugabe. Mais le chef de l’Etat zimbabwéen n’est pas près de laisser échapper le pouvoir pour autant : il a déclaré qu’une victoire de l’opposition « ne sera pas tolérée », tout en précisant à ses supporters qu’il gagnerait contre le MDC dans une élection « libre et honnête »…

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