Une nouvelle étude sur les cultures pour la bioénergie en Afrique


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Globe terrestre
Globe terrestre représentant une partie de l'Afrique

Une nouvelle étude révèle que la production de bioénergie peut augmenter en Afrique et fournir des revenus et de l’énergie aux agriculteurs sans supplanter les produits alimentaires. Il faut des politiques pour gérer les conflits éventuels mais des investissements dans la biénergie sont indispensables pour « libérer le potentiel latent de l’Afrique ».

Ouagadougou (23 juillet 2010)—Selon un rapport produit par le Forum pour la Recherche Agricole en Afrique (FARA), l’Imperial College London et CAMCO International, les cultures peuvent être produites pour la bioénergie sur une échelle importante en Afrique occidentale, orientale et australe sans porter atteinte à la production alimentaire et aux habitats naturels. L’étude a été publiée aujourd’hui lors de la 5ème Semaine africaine des Sciences Agricoles qui se tient au Burkina Faso.

« Si la bioénergie est abordée avec les politiques et les processus appropriés et en incluant toutes les différentes parties prenantes, elle est non seulement compatible avec la production alimentaire mais elle peut également profiter énormément à l’Afrique » a affirmé Dr Rocio Diaz-Chavez, l’auteur principal du rapport qui est aussi chercheur universitaire au Imperial College London. « La bioénergie peut apporter des investissements dans la terre, les infrastructures, et les ressources humaines et pourrait permettre de libérer le potentiel latent de l’Afrique et accroître la production alimentaire. »

Les conclusions du rapport, Mapping Food and Bioenergy in Africa, (Tracer la carte des produits alimentaires et de la Bioénergie en Afrique) étaient tirées de l’examen d’une recherche et d’études de cas déjà effectuées sur la production et la politique en matière de biocarburant dans six pays, à savoir le Sénégal, le Mali, la Tanzanie, le Kenya, la Zambie et le Mozambique. Les conclusions du rapport ont entre autres montré qu’il y avait suffisamment de terres pour accroître la culture de la canne à sucre, du sorgho et du jatropha pour la production de biocarburant sans réduire la production alimentaire.

Les études de cas ont montré que la bioénergie suscitait un intérêt accru en Afrique pour ce qui est d’aborder les besoins de revenus et d’énergie. L’éthanol par exemple peut être mélangé aux carburants fossiles pour réduire la dépendance vis-à-vis des importations de carburants qui constituent un frein important au développement économique. L’éthanol peut également être utilisé pour les cuisinières et permettre de réduire la dépendance vis-à-vis des du charbon et du bois qui sont malsains et détruisent l’environnement. En outre, l’utilisation du biodiesel pour faire marcher les groupes électrogènes présente un vif intérêt dans plusieurs domaines étant donné les défis auquel fait face le réseau électrique partout en Afrique.

Mais eu égard à l’augmentation rapide de la demande de biodiesel et d’éthanol, on s’inquiète qu’une ruée pour accroître la production en Afrique particulièrement pour l’exportation pourrait usurper des terres et des ressources nécessaires pour les cultures vivrières. Mais selon Dr Diaz-Chavez, les preuves apportées par le rapport du FARA montrent que la nourriture contre la bioénergie ne devrait pas être le choix. Le débat est plutôt comment intégrer correctement la bioénergie dans les systèmes de production agricole dans les différentes régions d’Afrique.

Le rapport a par exemple conclu que la production de canne à sucre pour les biocarburants pourrait être doublée dans de nombreuses régions sans réduire la production alimentaire ou détruire des habitats précieux. En outre le Dr Diaz-Chavez a indiqué qu’il était évident qu’un grand nombre de pays africains étaient sensibles à des conflits potentiels avec la production alimentaire et mènent des politiques qui abordent cette inquiétude.

« Il y a des exemples particuliers où la production de bioénergie a eu des impacts négatifs mais cela ne signifie pas qu’il est impossible de développer le secteur de manière durable. »

Le Mozambique, par exemple, a adopté une politique selon laquelle seuls la canne à sucre et le sorgho sucré pouvaient être utilisés pour l’éthanol et le jatropha et la noix de coco pour le biodiésel. En Afrique du Sud, le parlement a décrété que le maïs ne pouvait plus être utilisé comme biocarburant. Le Mali n’autorise pas l’utilisation des cultures vivrières pour la production de biocarburants. Le rapport fait également état de programme en cours au Mali pour accroître la production du jatropha, un arbuste qui produits des graines pouvant être transformées en carburant, qui sont avantageux pour les petits exploitants et qui ne « compromettent pas la production alimentaire. »

L’analyse révèle que le défi aujourd’hui n’est pas autant la question à savoir si la production de bioénergie pouvait cohabiter avec la production alimentaire mais plutôt comment la diffuser en vue d’aider les pays africains à réaliser leur potentiel.

« Les défis sont les mêmes pour toutes les cultures, si vous ne disposez pas de ressources adéquates, vous ne pouvez pas accroître la production ». Le rapport conclut par exemple que dans les pays les moins développés d’Afrique, il était possible de tripler les rendements en utilisant des pratiques améliorées de gestion, permettant ainsi de libérer davantage de terres pour la production de bioénergie. »

Une partie de l’étude était consacrée à l’identification et à la cartographie de différents groupes en Afrique qui participent à divers aspects de la production de bioénergie. Ces groupes comprennent des organisations paysannes, des ONG, l’industrie et au niveau des gouvernements, les ministères et les agences de l’agriculture, du transport, de l’énergie et de l’environnement.

« Nous savons qu’un grand nombre de secteurs présentent un grand intérêt mais le problème est qu’ils ne communiquent pas nécessairement entre eux » a déclaré Dr Monty Jones, Directeur Exécutif du FARA. « C’est une situation qui donne l’occasion au FARA, en sa qualité d’organisation ayant des partenaires dans le secteur public et privé dans la région de proposer un forum qui rassemble tous ces différents intérêts en vue de former une approche unie et inclusive à la production de bioénergie. »

Lors d’une discussion du rapport au cours de la semaine des sciences, une question clé qui a surgi était que les questions de bioénergie devraient faire partie d’une conversation plus large sur la manière de satisfaire les besoins en énergie des agriculteurs africains.

« L’énergie est indispensable à la modernisation de l’agriculture en Afrique a affirmé Dr Ibrahim Togola, qui dirige un groupe de développement de l’industrie agricole au Mali et qui est professeur à l’Institut polytechnique rural du Mali. « Nous avons besoin de faire comprendre à nos politiciens que nous n’aurons jamais une révolution agricole en Afrique sans avoir accès aux services modernes d’énergie » a-t-il ajouté.

La 5ème Semaine africaine des Sciences agricole et Assemblée Générale du FARA rassemble des représentants des institutions africaines et non africaines de la recherche agricole pour le développement. Nos partenaires incluent des organisations agricoles et d’éleveurs, des centres de recherche agricole nationaux et internationaux, des universités, des ONG et des entreprises privées. Le Gouvernement du Burkina Faso a gracieusement offert d’accueillir la cinquième (5ème) Assemblée Générale du Forum pour la Recherche Agricole en Afrique (FARA).

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