Un traité mondial sur le commerce des armes bénéficierait à l’Afrique


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Globe terrestre
Globe terrestre représentant une partie de l'Afrique

La création d’un traité mondial sur le commerce des armes, dont le principe est actuellement débattu par la Première commission des Nations Unies, bénéficierait tout particulièrement à l’Afrique. « Les armes ne sont pas nécessairement la cause des conflits en Afrique, mais elles les alimentent, les rendent plus meurtriers et plus onéreux », a expliqué à IRIN Debbie Hillier, spécialiste du contrôle des armes à Oxfam.

Mme Hillier est le principal auteur d’une étude publiée le 11 octobre et intitulée ‘Les milliards manquants d’Afrique’ (Africa’s Missing Billions, en anglais). Cette étude est considérée comme le premier rapport évaluant l’impact financier des conflits sur le produit intérieur brut (PIB) des économies du continent.

Selon le rapport, les conflits survenus en Afrique entre 1990 et 2005 ont coûté quelque 300 milliards de dollars américains, soit l’équivalent de l’aide internationale pour le continent sur la même période. En moyenne, une guerre, une guerre civile ou une rébellion entraîne une chute de 15 pour cent de l’activité économique.

D’après Mme Hillier, 95 pour cent des fusils d’assaut kalachnikov, l’arme la plus utilisée dans les conflits en Afrique, sont produits à l’extérieur du continent. « Et aussi incroyable que cela puisse paraître, il n’y a actuellement aucun contrôle international sur la vente de ces armes », a-t-elle fait remarquer.

« Il y a des contrôles internationaux sur la vente de diamants et d’autres produits, mais pas sur les instruments de guerre ».

« De temps à autre, des embargos sont décrétés sur les ventes d’armes, mais ce dont nous avons besoin c’est d’une réglementation universelle sur les circonstances dans lesquelles un pays peut ou pas exporter des armes en tenant compte de critères tels que l’éventualité de voir ces armes utilisées pour commettre des violations des droits humains. Nous voulons une réglementation internationale solide appliquée dans toute sa rigueur », a-t-elle ajouté.

En 2006, 153 Etats avaient voté en faveur du Traité sur le commerce des armes lors de l’Assemblée générale des Nations Unies, mais 24 pays s’étaient abstenus et les Etats-Unis avaient voté contre.

Les Etats-Unis sont le plus gros exportateur d’armes au monde. Comme la plupart des pays exportateurs d’armes, ils disposent d’une législation nationale qui en règlemente l’exportation. Mais selon certains experts, cette réglementation est trop souvent appliquée de manière sélective.

« Pour les [Etats-Unis], les exportations d’armes et les autres types d’assistance militaire sont devenus des outils essentiels pour s’assurer la coopération d’autres gouvernements dans la lutte que les américains mènent contre le terrorisme », a affirmé Scott Stedjan, un expert qui siège au Comité directeur du Traité sur le commerce des armes.

Pour Irungu Houghton, conseiller en politique africaine d’Oxfam, « le gouvernement dont les usines fabriquent les fusils est tout aussi responsable que le gouvernement qui autorise ses navires à transporter ces armes ».

L’étude de Mme Hillier, qui a été publiée par les organisations non-gouvernementales Oxfam International, International Action Network on Small Arms (IANSA) et Saferworld, décrit l’impact économique de la mauvaise régulation du commerce international des armes.

Cette étude compare 23 pays africains qui ont connu des conflits armés entre 1990 et 2005 à d’autres pays ayant des économies comparables, mais qui n’ont pas connu de crise.

En Guinée-Bissau, par exemple, le taux de croissance prévisionnel – hors période de conflit – en 1998/99 aurait dû être de 5,24 pour cent, alors qu’actuellement le pays affiche un taux de croissance négatif de moins 10,15 pour cent.

« Les coûts sont déconcertants », a affirmé M. Houghton. L’argent du commerce des armes pourrait résoudre la crise du VIH/SIDA, éradiquer la tuberculose et le paludisme ou assurer l’accès à l’eau potable, à des systèmes sanitaires et à l’éducation, a-t-il fait remarquer.

L’étude ne fournit pas d’information concernant l’impact économique des conflits armés sur les pays voisins. De même, elle ne couvre que les périodes de guerre effective, même si certaines conséquences comme l’inflation, la dette du pays et le fort taux de chômage se font encore ressentir bien après la fin des combats.

IRIN

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