Un Réseau des savoirs et innovations au service de l’alphabétisation


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L’UNESCO met sur pied le Réseau des savoirs et innovations au service de l’alphabétisation. Son lancement sera l’un des temps forts de la Journée internationale de l’alphabétisation du 8 septembre.

Dans le monde, 759 millions d’adultes ne savent ni lire ni écrire. Autrement dit, un adulte sur cinq est illettré. En parallèle, quelque 72 millions d’enfants ne sont toujours pas scolarisés. Cette Journée de l’alphabétisation qui se tient le 8 septembre est organisée depuis 1967 pour dresser le bilan de l’alphabétisation et inviter la communauté internationale à la mobilisation contre un « fléau » qui entrave les efforts des États dans la lutte contre la sous-éducation, l’analphabétisme, la pauvreté et les inégalités sociales. Cette année, la Journée internationale de l’alphabétisation met l’accent sur le rôle capital de l’alphabétisation dans l’autonomisation des femmes et lance un nouveau programme : le Réseau des savoirs et innovations au service de l’alphabétisation qui permettra aux chercheurs et aux enseignants du monde entier d’échanger leurs informations et de mettre leurs pratiques en commun. Le point sur l’évolution de ce fléau en Afrique avec Clinton Robinson, responsable de l’alphabétisation et de l’éducation pour tous à l’UNESCO.

Afrik.com : Depuis quand le Réseau des savoirs et innovations au service de l’alphabétisation de l’UNESCO est-il en projet ?

Clinton Robinson :
Il faut savoir que l’UNESCO n’a pas de programme sur le terrain. Elle travaille en association avec les gouvernements de chaque pays et les ONG présentes sur le terrain. La mise en place de ce réseau devrait permettre de lier ONG, gouvernements et acteurs des programmes d’alphabétisation pour une meilleure coordination et organisation. Le réseau est en projet depuis mars 2010, et sera lancé vers le 1er novembre. Actuellement, la plateforme virtuelle est en cours d’élaboration. Le réseau est mondial et répondra aux besoins d’échange et de collaboration des chercheurs, des professionnels et des praticiens en alphabétisation.

Afrik.com : En quelques mots, comment fonctionne le réseau et en quoi peut-il aider à lutter contre l’analphabétisme ?

Clinton Robinson :
Il fournira un annuaire de professionnels avec leurs institutions, leurs intérêts particuliers, leurs recherches et publications, ainsi que leurs projets. Il fournira également une plateforme pour des forums de discussions en ligne sur les questions actuelles et les diverses dimensions de l’alphabétisation. Un premier forum a eu lieu de façon expérimentale sur la thématique d’Alphabétisation et Autonomisation des Femmes, thème également de cette Journée Internationale 2010.

Afrik.com : Combien de chercheurs et d’enseignants font partie de ce projet ?

Clinton Robinson :
Nous estimons qu’autour de 300 personnes devraient s’inscrire dans un premier temps, mais le nombre pourrait grimper rapidement. Le réseau est plutôt conçu pour les chercheurs, les professionnels et les responsables de programmes que pour les enseignants.

Afrik.com : Quels types d’aides apportent les partenaires comme Microsoft et la Fondation Verizon ?

Clinton Robinson :
Le projet coute aux alentours de 100 000 $ pour la phase de développement et le lancement. La Fondation Verizon a apporté un soutien financier considérable pour les coûts de développement. Microsoft s’occupe évidemment de la partie informatique et apporte un soutien technique ainsi que financier pour l’élaboration de la plateforme.

Afrik.com : Quelles sont les derniers chiffres sur le nombre de personnes touchées par l’analphabétisme en Afrique ?

Clinton Robinson :
Le taux d’alphabétisme en Afrique est de 62%. Les analphabètes sont au nombre de 152 665 000. Parmi elles, près de 2/3 sont des femmes. Ces personnes sont des adultes de plus de 15 ans et sont déjà sortis du système scolaire.
Le grand problème que l’on risque de rencontrer, avec l’évolution de la démographie, c’est qu’en 2015, il est prévu qu’il y ait toujours 150 824 000 de personnes illettrés en Afrique sub-saharienne. Ainsi, le problème de l’éducation est à la source de l’analphabétisme : en 2007, en Afrique sub-saharienne, seulement 73% des enfants étaient scolarisés et près de 32 226 000 enfants n’allaient pas à l’école. Trois problèmes prédominent : tous les enfants ne vont pas à l’école, les enfants scolarisés ne restent pas assez longtemps pour apprendre quelque chose et enfin, les enfants scolarisés qui terminent leur cursus ont le plus souvent de grosses lacunes dues à une mauvaise qualité de l’enseignement.

Afrik.com : Quelles sont les principales difficultés auxquelles se heurte l’alphabétisation des adultes en Afrique ?

Clinton Robinson :
En Afrique, il y a une très forte volonté politique pour l’éducation et les budgets consacrés sont importants. En revanche, la lutte contre l’analphabétisme est faible et le plus souvent, seulement 1% des budgets de l’éducation sont consacrés à ce problème. Il est à noter que des efforts sont faits, notamment au Sénégal (3% du budget) ou encore au Burkina (7%).
Second problème, l’éducation est généralement soutenue par les aides au développement et on se heurte à une difficulté majeure, celle de convaincre les bailleurs de fonds pour lutter contre l’analphabétisme des adultes qui généralement ne les préoccupe pas ou peu. C’est l’un des grands défis auquel est confronté l’Unesco de changer les mentalités.
Enfin, en Afrique sub-saharienne, le système scolaire utilise les langues européennes issues de la colonisation. Nous essayons de nous battre contre cela et de revenir à un système multilingue en privilégiant l’enseignement des langues locales. Encore une fois, il faut qu’une volonté politique se mette en place pour que l’on puisse donner accès à un enseignement de la langue locale pour tous.

 Le site de l’UNESCO

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