
La neuvième Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD 9), qui s’est achevée ce vendredi 22 août 2025 à Yokohama, restera marquée par une polémique diplomatique majeure autour de la participation du Sahara occidental.
Cette neuvième édition du TICAD, rassemblant près de 5 000 participants venus de 55 pays africains, pour célébrer trois décennies de coopération Japon-Afrique sous le thème « co-créer des solutions innovantes« . Mais elle s’est une nouvelle fois transformée en théâtre d’un bras de fer diplomatique opposant le Maroc, d’un côté, à l’Algérie et la République arabe sahraouie démocratique (RASD), de l’autre.
Le Japon pris en étau entre légitimité africaine et pragmatisme diplomatique
Au cœur de cette controverse : la présence d’une délégation de haut niveau de la RASD, conduite par son Premier ministre et son ministre des Affaires étrangères. Les tentatives de Rabat de convaincre le Japon de ne pas accueillir le Sahara occidental à ce sommet ont échoué, malgré une année d’efforts diplomatiques intenses.
Conscientes des tensions, les autorités japonaises ont mis en place une « protection spéciale » et « renforcée » pour la délégation sahraouie. Ainsi, une escorte rapprochée a été mise à la disposition du Premier ministre et du ministre des Affaires étrangères sahraouis tout au long du sommet.
Ces précautions visaient à éviter la répétition de l’incident de 2024, lorsque le représentant marocain a agressé brutalement son homologue sahraoui, devant les regards ébahis des autres participants, nécessitant l’intervention du représentant algérien pour maîtriser la situation.
Une participation légitimée par l’Union africaine
La participation du Sahara occidental s’inscrit dans une continuité désormais établie. À chaque édition, la présence sahraouie suscite une agitation marocaine, souvent bruyante et parfois violente. Ces tentatives d’exclusion n’ont cependant jamais abouti, puisque le Sahara occidental est systématiquement convié par la Commission de l’Union africaine, coorganisatrice de l’événement.
En effet, la RASD, membre fondateur et actif de l’UA depuis 1984, ne fait pas exception à la règle qui veut que tous les États membres de l’organisation continentale soient conviés à cette conférence coorganisée par le Japon, l’ONU et l’Union africaine.

Cette polémique a quelque peu éclipsé les enjeux économiques pourtant cruciaux de la TICAD 9. Le Japon ambitionne de mobiliser 1,5 milliard de dollars pour accroître les investissements privés japonais en Afrique, dans un contexte de concurrence internationale accrue, notamment face à la montée en puissance chinoise sur le continent.
Les trois piliers stratégiques de la conférence – Société, Économie, Paix et Stabilité – ont été abordés, avec un accent particulier sur la participation des jeunes à travers le programme « Youth TICAD 2025 » qui a réuni 400 jeunes Japonais et Africains.
L’initiative « Tomoni Africa » au cœur des discussions
Malgré les tensions diplomatiques, les organisateurs ont maintenu le cap sur les objectifs de développement. Le programme « Tomoni Africa » (Ensemble avec l’Afrique), destiné à favoriser la formation, la créativité et les échanges entre jeunes, a été officiellement lancé.
Les technologies de pointe japonaises – intelligence artificielle, drones, impression 3D – ont également été présentées comme des solutions concrètes aux défis africains, témoignant de la volonté nippone de se différencier par l’innovation technologique.
La Déclaration de Yokohama, adoptée vendredi lors de la cérémonie de clôture malgré les tensions, définit les priorités communes pour les trois prochaines années sous le thème « co-créer des solutions innovantes avec l’Afrique« . La TICAD 10, prévue dans trois ans, sera l’occasion de voir si ces tensions se sont apaisées pour un forum de coopération économique et de développement.