
L’ouverture du Museum of West African Arts à Benin City, censée célébrer le patrimoine artistique africain, a tourné à la confusion. Une visite privée a été violemment interrompue par des manifestants. Cet incident a provoqué le report de l’inauguration. L’incident ravive les tensions autour des célèbres « Bronzes du Bénin », symboles d’un héritage disputé.
Entre fierté culturelle, rivalités politiques et querelles d’autorité, le musée se retrouve au cœur d’un conflit identitaire.
Des manifestants font irruption et sèment le chaos
L’événement pré-ouverture devait réunir donateurs et professionnels du secteur. Il a viré au chaos lorsqu’une vingtaine d’hommes, dont certains armés de battes, ont envahi la cour du musée. Les invités, dont plusieurs étrangers, ont fui à l’intérieur pour se mettre à l’abri. Phillip Ihenacho, homme d’affaires nigérian et fondateur du MOWAA, a raconté à l’AFP : « Des manifestants sont entrés et ont commencé à vandaliser une partie du pavillon d’accueil, où nous recevons les visiteurs, puis ils ont investi la section avant, où se trouve la zone d’exposition »
Après deux heures de désordre, les invités ont été évacués en bus vers un hôtel voisin. Le musée a subi des dégâts mineurs, mais l’inauguration officielle prévue pour mardi a été annulée.
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Le nœud des Bronzes de Bénin
Les motivations exactes des assaillants restent floues. Selon plusieurs sources, ils scandaient des slogans en soutien à l’Oba Ewuare II, le dirigeant traditionnel de Benin.
L’incident illustre les rivalités locales sur l’autorité légitime pour accueillir les artefacts rapatriés.
Depuis des années, la ville de Benin réclame le retour des célèbres bronzes pillés en 1897 par les troupes britanniques. Les Pays-Bas ont récemment restitué 119 œuvres au Nigeria, l’une des plus importantes restitutions jamais opérées.
Mais une loi de 2023 a confié à l’Oba de Benin la garde officielle de ces pièces. Ce choix a provoqué des désaccords politiques entre l’ancien gouverneur de l’État et son successeur, proche de l’Oba.
Ces tensions ont finalement bloqué les projets d’exposition des bronzes au MOWAA, musée porté par une organisation privée à but non lucratif.
Les manifestants estiment que l’ouverture du musée viole le patrimoine culturel de Benin City, qui relève selon eux de l’autorité de leur chef traditionnel.
Inquiétude des autorités fédérales
La ministre nigériane de la Culture, Hannatu Musa Musawa, a condamné l’attaque. Elle a dénoncé un acte qui « met en danger un patrimoine culturel précieux et menace l’environnement paisible nécessaire aux échanges culturels ». Le gouvernement fédéral suit l’affaire avec une « profonde inquiétude ». Il a promis des consultations avec les autorités de l’État d’Edo et les forces de sécurité pour comprendre les faits et définir une réponse appropriée.



