« Sounou Senegal » ou le passé colonial français


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La chaîne française France 5 diffuse, ce samedi, le documentaire Sounou Senegal (Notre Sénégal) réalisé par Jean-Pierre Lenoir. La reconstitution de son histoire familiale est le prétexte pour évoquer le statut peu enviable dont faisait l’objet les Africains pendant la période coloniale. En le mettant en exergue sous sa caméra sans parti pris, ni culpabilité, le cinéaste français fait œuvre utile dans une France qui a parfois du mal à assumer son passé colonial.

Sounou Senegal (Notre Sénégal) est une œuvre très personnelle de Jean-Pierre Lenoir sur les traces d’Emile Perras, son grand-père, et le prétexte d’une réflexion sur les rapports entre colons et colonisés pendant et après la colonisation. Le grand-père du réalisateur de Sounou Senegal quitte la France en 1935 ruiné par la crise économique que connaît son pays. Le Senegal sera l’opportunité pour l’entrepreneur, qui devient le propriétaire de « La Croix du Sud », un hôtel huppé fréquenté alors par les colons et plus tard la classe dirigeante sénégalaise, l’occasion de s’offrir un nouveau départ. L’aventure s’achèvera en 1976 – une quinzaine d’années après l’indépendance du Sénégal – pour la famille Perras. Aidé de sa mère, de ses tantes et des anciens Sénégalais employés de son grand-père, Lenoir reconstitue en images un pan de sa propre histoire familiale où se mêlent images d’archives et d’aujourd’hui.

Un zoom très particulier sur la colonisation

Quelque 70 ans plus tard, camera au poing, il revient sur les pas d’Emile Perras en se rendant au Sénégal pour constater les rapports doux-amers qu’entretenait son grand-père avec ses employés. Un, en particulier, Emmanuel qui s’occupait des trois filles de ce dernier. Les relations entre les deux hommes sont tendues, mais en même temps teintées de confiance. Leur évocation suscite et interpelle sa mère et ses tantes qui prennent, peut-être enfin, le temps de s’interroger et d’analyser les méfaits de la colonisation. Notamment d’un point de vue social. L’une d’elles fait remarquer que les Européens considéraient les Africains comme des sous-hommes et vivaient avec eux, mais dans des « mondes séparés ». Le documentaire est également l’occasion de mettre en relief les inégalités dont faisaient l’objet « les colonisés » et les préjugés auxquels ils doivent toujours faire face. Même 40 ans après les indépendances, le temps ne semble pas jouer en faveur de l’ouverture d’esprit de certains.

Pour toutes ces raisons, Sounou Senegal est un film qui mérite d’être vu, entre autres, par cette génération de Français, qui ont vécu cette époque et qui ne réalisaient pas toujours, à l’instar de l’une des tantes de Jean-Pierre Lenoir, que c’était « la colonisation ». Le documentaire, participe à travers un cas particulier, certes, au devoir de mémoire si nécessaire pour jeter un autre regard sur l’immigré en France. Car, comme le constate Lenoir, son père en fut aussi un, mais au Sénégal, un pays qui l’aimait autant que sa patrie originelle. De quoi donner matière à réflexion. Si Sounou Senegal, dont la trame est simple et linéaire ne brille pas par son originalité artistique, sa portée sociale et sociétale balaie toutes les critiques qui pourraient lui être faites.

Sounou Senegal , écrit et réalisé par Jean-Pierre Lenoir, produit par Dominant 7 Productions

Durée : 53′

Diffusion : 9 septembre 2006 à 21h35 sur France 5

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