Sœur Marie-Claire Mwenya, une femme au service des femmes


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Sa vocation n’est pas que religieuse. Car habit blanc ou pas, Sœur Marie-Claire Mwenya, élevée dans le sens du partage par sa mère, se serait engagée dans la l’action qui est la sienne aujourd’hui : s’occuper des femmes seules et démunies à Lusaka, en Zambie. Elle est leuqréate du concours Harubuntu 2010.

Son action figure parmi les coups de cœur 2010 du concours Harubuntu des porteurs d’espoir et des créateurs de richesses africains. Mais la religieuse n’apprécie pas toujours cette publicité faite autour d’elle depuis. Et pourtant ! Quand sœur Marie-Claire Mwenya revient à Lusaka en 2008, à la demande de sa congrégation, Les filles de
Marie-Auxiliatrice, elle est tout de suite confrontée à l’extrême pauvreté des femmes seules, des veuves pour la plupart. « Lusaka (la capitale économique zambienne, ndlr) est une ville surpeuplée et la misère est le lot quotidien de certains. Parmi eux, des gens qui sont venus de la campagne. Quand le mari meurt, les femmes ne retournent pas chez elles et se mettent en quête d’un moyen de subsistance pour prendre soin de leur famille. Et c’est difficile ». En charge du centre professionnel qu’anime sa congrégation et maintes fois sollicitée, elle ressent le besoin de créer une structure dédiée à ces femmes afin d’améliorer leur situation économique. La communauté des Sœurs salésiennes de Don Bosco n’est pas directement en mesure de les aider. « J’ai donc pensé, avec la permission de ma congrégation, à créer une école pour former des femmes de ménages ». La formation dure trois mois et son coût est fixé à environ dix dollars américains. « Celles qui n’avaient pas d’argent pouvaient tout de même y prendre part. Elles s’engageaient juste à s’acquitter de ces frais au fur et à mesure qu’elles en auraient la possibilité ». L’idée étant de les placer plus tard comme femmes de ménage dans des familles. Mais l’expérience va finalement tourner court. Certaines femmes ne trouvent pas de travail parce qu’elles sont malades, séropositives notamment. D’autres ne reçoivent pas de salaire. Pis : l’une d’elle sera harcelée sexuellement.

« Nous voulions l’émancipation de la femme, mais notre apostolat ne se trouvait pas là », explique la religieuse. Marie-Claire Mwenya a déjà trouvé une solution de rechange : une nouvelle étape commence avec la mise en place d’une coopérative agro-pastorale, la Changamuka multipurpose coopérative. Pour être membre, il faut débourser encore une fois environ dix dollars. Celles qui arrivent à s’en acquitter permettent à la structure de disposer d’un petit capital pour lancer ses activités : « Nous avons commencé à dix en 2008, maintenant elle est composée de 17 femmes et de trois hommes ». Incongrue cette présence masculine ? « Nous nous sommes rendues compte que pour mener certaines activités, nous avions besoin d’eux. Dans tous les cas, ils sont aussi démunis que les femmes qui sont membres de la coopérative. L’un d’eux a été abandonné par sa compagne à cause de la grande pauvreté dans laquelle il vivait. Elle l’a laissé avec leurs trois enfants ». Commerce de poissons ou de maïs, gestion d’un poulailler, fabrication de beurre d’arachide sont quelques unes des activités menées au sein de la coopérative. Les ventes, quant à elles, se font souvent à crédit. Cinquante pour cent des revenus générés reviennent à celles qui mènent l’activité, 25% sont versés dans la caisse de la coopérative et le reste est dédié aux frais administratifs.

Le partage en héritage

« Ce n’est pas parce que je suis religieuse que j’essaie d’apporter mon aide à toutes ces femmes, tient à préciser Marie-Claire. Ma sœur ne l’est pas et elle fait la même chose. Nous avons été éduquées par ma mère dans le sens du partage, on devait partager le meilleur même quand on n’avait rien. Ma mère m’a appris à respecter et à aider les plus démunis ». Marie-Claire Mwenya, originaire du petit village congolais de Kasenga (dans la province du Katanga, à 220 km de la capitale provinciale Lubumbashi), quitte sa famille en 1977 à 17 ans et demi pour vivre sa vocation. « « Tu pars, mais la maison reste ouverte », m’a dit ma mère. « Ce n’est pas seulement dans l’habit blanc que tu peux servir Dieu. Tu ne peux pas tromper le Seigneur. Si ça ne va pas, tu peux rentrer et te mettre au service de Dieu en tant que laïc » ». Marie-Claire Menya perdra sa mère quelques mois après le début de son noviciat.

A toutes ces personnes qu’elle tente d’aider, elle n’oublie pas de rappeler « qu’ils ne sont pas pauvres » et les invite aussi à faire du partage une vertu. La générosité de la coopérative a permis à l’une de ses membres de suivre des cours d’hôtellerie. D’autant que le matériel ne doit pas être un frein. « Nous n’avons pas d’argent mais nous avons de la détermination à revendre. » Dans les mois à venir, Marie-Claire Mwenya espère que la coopérative pourra se procurer une parcelle plus importante. « Nous sommes de plus en plus à l’étroit dans l’espace que la congrégation a mis à notre disposition, notamment une parcelle et une pièce qui sert de poulailler ». Mais surtout, la religieuse souhaite que chacun devienne propriétaire afin d’éviter les hausses intempestives de loyer qui sabotent leurs efforts. « Quand leurs propriétaires voient qu’ils vendent quelque chose, ils pensent que leur situation s’est améliorée ». Marie-Claire Mwenya, elle, prend juste le temps de cheminer avec eux dans le partage et dans l’espérance de lendemains meilleurs.

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