RDC-Rwanda : un projet d’accord de paix soumis aux États-Unis


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Paul Kagame et Félix Tshisekedi
Paul Kagame et Félix Tshisekedi

Un pas significatif semble avoir été franchi dans la quête de stabilité pour la région des Grands Lacs. La République Démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda ont officiellement soumis un avant-projet d’accord de paix, conformément aux engagements pris lors de la signature de la Déclaration de principes le 25 avril dernier à Washington. Cet événement diplomatique, qui s’inscrit dans une dynamique régionale et internationale de plus en plus pressante, témoigne d’un espoir fragile mais réel de désescalade des tensions meurtrières dans l’Est congolais.

Le processus de Washington pour le retour de la paix dans l’est de la RDC suit bien son cours. Puisque la RDC et le Rwanda ont respecté le calendrier de la Déclaration de principes signée à Washington, le 25 avril, en soumettant dans le délai un projet d’accord de paix à la partie américaine.

Un texte commun attendu, livré dans les temps

« Je salue le projet de proposition de paix reçu de la RDC et du Rwanda. Il s’agit d’une étape importante vers le respect des engagements pris dans la Déclaration de principes, et je compte sur leur engagement continu en faveur de la paix », a déclaré Massad Boulos, conseiller principal pour l’Afrique au Département d’État américain, ce lundi.

Le document, fruit d’intenses négociations, a été remis dans les délais impartis, avant la date butoir du 2 mai, par les chefs de la diplomatie congolaise et rwandaise, Thérèse Kayikwamba Wagner et Olivier Nduhungirehe. Il s’agit d’une avancée notable dans un processus diplomatique élargi, qui articule les efforts des processus de Nairobi, de Luanda et plus récemment de Doha, sous la coordination conjointe de la Communauté d’Afrique de l’Est (CEA), de la SADC et avec l’appui de l’Union africaine.

Les grandes lignes du projet d’accord

Selon des sources diplomatiques, le draft en question contient des engagements cruciaux en matière de respect de la souveraineté territoriale, de coopération sécuritaire, de retour volontaire et sécurisé des personnes déplacées, ainsi que de relance de l’intégration économique régionale. Il propose également un appui renforcé à la MONUSCO, la mission onusienne en RDC, souvent critiquée pour son manque d’efficacité, mais qui reste un pilier de la présence internationale dans l’est du pays.

Le rôle croissant des États-Unis dans ce dossier reflète leur volonté de reprendre la main dans une région où les influences concurrentes – notamment chinoise, européenne et arabe – sont de plus en plus visibles. En cas de désaccord persistant sur le contenu du texte final, la Déclaration de principes prévoit une réunion ministérielle de haut niveau à Washington, sous la médiation directe du Secrétaire d’État américain.

Massad Boulos, homme d’affaires devenu diplomate proche de Donald Trump, joue un rôle de premier plan dans ce processus. Sa nomination comme conseiller principal pour l’Afrique a surpris certains observateurs, mais son activisme dans le dossier RDC-Rwanda semble désormais prendre une tournure concrète.

Une lueur d’espoir dans un contexte toujours tendu sur le terrain

Malgré ce progrès sur le front diplomatique, la situation reste explosive dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu. Les affrontements sporadiques entre les FARDC et les rebelles du M23 n’ont pas cessé. De nombreux civils continuent de fuir les combats, et les conditions humanitaires restent catastrophiques. L’AFC, la coalition politico-militaire qui inclut le M23, n’a pour l’instant pas réagi publiquement à ce projet d’accord. Le silence de ses dirigeants pourrait refléter des tensions internes ou une stratégie d’attente vis-à-vis des négociations en cours.

Alors que les précédentes tentatives de normalisation ont échoué à enrayer durablement la spirale de violence, ce projet d’accord de paix ouvre une nouvelle fenêtre d’opportunité. Il reste toutefois à voir si les intentions affichées se traduiront par des actes concrets sur le terrain, notamment le retrait effectif des groupes armés, la sécurisation des zones de retour et la justice pour les victimes de violations graves des droits humains.

L’architecture complexe de cette médiation multilatérale pourrait constituer à la fois une chance – en offrant des garanties régionales et internationales – et un risque, si les divergences d’agenda l’emportaient sur la cohérence stratégique.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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