
Dans un geste hautement symbolique et politique, le Président congolais Félix Tshisekedi a reçu, ce jeudi, l’opposant Martin Fayulu au Palais de la Nation. Cette rencontre, qualifiée de « conviviale » par la présidence, répond à un appel pressant de Martin Fayulu en faveur d’un dialogue national.
Les images de l’accolade chaleureuse entre Félix Tshisekedi et son éternel rival, Martin Fayulu, peuvent surprendre, quand on connaît ce qui oppose les deux hommes. Arrivé à 16h40 dans les bureaux officiels de la présidence, Martin Fayulu, leader du parti Engagement pour la Citoyenneté et le Développement (ECiDé), a été chaleureusement accueilli par le chef de l’État dans le salon des ambassadeurs. Les deux hommes se sont entretenus pendant près de deux heures.
« Nous devons créer un camp de la patrie »
« Le pays traverse une phase très difficile. Nous sommes attaqués de partout. Nous devons créer un camp de la patrie », a déclaré Martin Fayulu devant la presse à l’issue de l’audience. Il a insisté sur la nécessité d’un « dialogue social » impliquant notamment les chefs religieux, tels que ceux de la CENCO (Conférence épiscopale nationale du Congo) et de l’ECC (Église du Christ au Congo), porteurs d’une proposition de pacte social pour la nation.
Dans une vidéo diffusée le 2 juin, l’opposant appelait déjà à un « sursaut d’honneur » pour préserver l’unité nationale, évoquant une « crise existentielle » et un risque imminent de balkanisation du pays. Il dénonçait l’occupation de larges portions des provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu – y compris les villes stratégiques de Goma et Bukavu – par le mouvement rebelle M23, soutenu par le Rwanda.
Le président de l’ECiDé avait également interpellé trois figures politiques qu’il estime cruciales dans la résolution de cette crise : Corneille Nangaa, Joseph Kabila et Félix Tshisekedi lui-même.
Un geste d’ouverture salué
Le président Tshisekedi avait, dès lundi, salué le « patriotisme » de son ancien rival et manifesté sa disponibilité à le rencontrer pour « sauver la République de la prédation qui menace [les] Institutions et [l’]intégrité territoriale ». La rencontre de ce jeudi semble avoir scellé cette volonté commune de privilégier le dialogue face aux périls. Interrogé sur une éventuelle entrée de l’opposition dans les institutions, Martin Fayulu a précisé que ce point n’avait pas été abordé. Il a toutefois affirmé que le Président s’était montré attentif à ses propositions et avait promis d’y répondre rapidement.
Alors que les combats s’intensifient dans l’est du pays et que la population civile continue de payer un lourd tribut à la guerre, plusieurs organisations de la société civile, dont la Voix des Sans Voix (VSV), ont salué cette initiative. Elles appellent à un dialogue national inclusif pour sortir la RDC de la crise sécuritaire, politique et sociale qui l’ébranle. La rencontre entre Tshisekedi et Fayulu, longtemps adversaires politiques, marque ainsi une étape cruaciale dans la vie politique congolaise. Elle montre une volonté, du moins affichée, de placer l’intérêt national au-dessus des clivages partisans. Et c’est en cela que réside la haute valeur symbolique de l’acte de ce jeudi.