Rapprochement diplomatique et économique entre le Soudan et l’Arabie Saoudite


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Drapeau du Soudan du Sud
Drapeau du Soudan du Sud

Le Premier ministre soudanais Kamel Idris entame une visite stratégique de trois jours à Riyad, dans le cadre des relations bilatérales entre Khartoum et le royaume wahhabite. Cette démarche diplomatique survient dans un contexte régional en mutation, où l’Arabie Saoudite intensifie sa présence en Afrique, notamment à travers des partenariats économiques et miniers.

Depuis sa nomination le 19 mai 2025, le Premier ministre soudanais Kamel al-Tayeb Idris Abdelhafiz multiplie les initiatives diplomatiques pour raviver les relations avec d’anciens et nouveaux alliés de Khartoum. Après l’Égypte, le Premier ministre effectue une visite officielle de trois jours à Riyad en Arabie Saoudite depuis le lundi 15 septembre 2025, une visite d’une grande importance pour le Soudan, qui vise à relancer les relations entre les deux pays dans un contexte de guerre civile persistante.

Un contexte géopolitique complexe

Cette visite diplomatique intervient après un appel du Quartet pour le Soudan – groupe composé d’États, d’organisations intergouvernementales et internationales – en faveur d’une trêve humanitaire de trois mois et d’une période de transition totale et transparente.

Si Khartoum a réagi en saluant tout effort international ou régional visant à mettre fin à la guerre, les autorités soudanaises insistent sur la nécessité de respecter la souveraineté de l’État et ses institutions légales.

Pour le Premier ministre Idris, ancien diplomate et haut responsable des Nations unies, cette visite représente le second déplacement à l’étranger depuis sa nomination en juin dernier. Le premier a été effectué il y a un mois au Caire, alors que l’Égypte est l’un des principaux alliés de Khartoum.

Des enjeux économiques stratégiques

Le pouvoir soudanais fédéral cherche à nouer un « partenariat stratégique » avec Riyad, surtout au niveau économique. Bien que les deux pays ne partagent pas de frontière commune, ils sont unis par les côtes de la mer Rouge, un atout géostratégique majeur que le Soudan souhaite exploiter pour accroître l’exportation de certains produits dont il est un grand producteur.

Khartoum aspire également à faire participer activement l’Arabie Saoudite à la reconstruction du pays déjà en cours, avec des projets d’investissement qui impliquent le secteur privé dans cet élan de reconstruction et de développement économique.

L’Arabie Saoudite, nouvelle puissance africaine

Cette démarche soudanaise s’inscrit dans un mouvement plus large d’expansion de l’influence saoudienne sur le continent africain. L’Arabie saoudite décide de jouer un plein rôle politique en Afrique.

Le royaume saoudien a notamment annoncé des investissements en Afrique de plus de 25 milliards de dollars d’ici 2030, et le prince héritier Mohammed ben Salmane Al Saoud a proposé d’allouer 10 milliards de dollars pour soutenir les exportations saoudiennes en direction des pays africains.

L’engagement saoudien en Afrique se matérialise déjà par des accords concrets. En janvier 2024, la République démocratique du Congo (RDC) et l’Arabie saoudite ont signé un mémorandum d’entente dans le domaine des ressources minérales en marge du Forum des minéraux du futur à Riyad. Cet accord vise à renforcer la recherche, l’exploitation et la transformation des minéraux au niveau local pour faciliter la transition énergétique.

De même, la RDC multiplie les partenariats stratégiques avec le Qatar et l’Arabie saoudite, avec notamment un plan d’investissement de 21 milliards de dollars confirmé par le Qatar, tandis que les autorités congolaises explorent des options face à la forte présence chinoise dans leur secteur minier, avec 80% des partenariats dans le secteur du cuivre et du cobalt signés avec des entreprises chinoises.

Perspectives d’avenir

Pour le Soudan, cette visite diplomatique représente une opportunité de diversifier ses partenaires économiques et de bénéficier de l’expertise saoudienne dans plusieurs domaines clés. L’Arabie Saoudite, de son côté, y voit une occasion d’étendre son influence géopolitique et d’accéder à de nouveaux marchés africains, particulièrement dans un contexte où Riyad se rend utile dans des pays africains qui n’ont pas une majorité de population musulmane et s’impose avec le continent tout entier comme une puissance planétaire indépendante de l’Occident.

Cette dynamique de rapprochement illustre les mutations géopolitiques actuelles en Afrique, où de nouveaux acteurs émergent comme alternatives aux partenaires traditionnels, offrant aux pays africains davantage d’options pour leur développement économique et leur positionnement stratégique.

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Franck Biyidi est diplômé de l'IRIC (Institut des Relations Internationales du Cameroun) je suis spécialiste des relations internationales au sein de la Francophonie et de l'Union Africaine et de tout ce qui touche la diplomatie en Afrique francophone
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