« Quel avenir pour les musiques des régions d’Outre-mer ? »


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Musique rock (illustration)
Musique rock (illustration)

Afrik.com se penche sur la situation des musiques des DOM-TOM à l’occasion d’une conférence qui s’est tenue vendredi, à Paris, au Secrétariat d’Etat à l’Outre-mer. Manque de visibilité et de reconnaissance dans l’hexagone, difficulté de trouver un label, désaffection des chaines hertziennes pour leurs musiques, les artistes français des Caraïbes peinent à se faire un nom en métropole.

La Compagnie créole, Kassav’, Zouk Machine, sont sûrement les rares artistes des départements et territoires d’Outre-mer que les Français métropolitains seraient capables de citer si on le leur demandait. Alors que s’est tenue, vendredi, à Paris, au secrétariat d’Etat à l’Outre-mer, la conférence «Quel avenir pour les musiques des régions d’Outre-mer ? », Afrik.com revient sur ces musiques et les obstacles que les artistes doivent surmonter pour être reconnus. Organisée par l’association « Agir ensemb’ pour une France de toutes les couleurs » avec le soutien de la Délégation Interministérielle pour l’égalité des chances des Français d’Outre-mer, cette conférence a tenté de dresser le constat et de proposer des solutions.

Les régions d’Outre-mer souffrent aujourd’hui d’un vide total en matière de formation artistique et musicale publique. Il n’y a actuellement aucun conservatoire de musique dans les îles. Alors que depuis 1986, des propositions sont faites en ce sens, aucune salle n’a encore vu le jour. Seul moyen de se former à la musique : la débrouille. Les cours de chant et l’apprentissage d’un instrument sont payants et souvent onéreux.

Peu de labels en Outre-mer

Même constat quand il s’agit pour un artiste de trouver une maison de disque. Très peu de labels sont implantés dans les régions d’Outre-mer et, en dehors des périodes de festivals, ils ne se déplacent que très rarement pour aller chercher de nouveaux talents.

Les informations mises à la disposition des artistes métropolitains ne sont quasiment pas disponibles à Wallis et Futuna ou encore à la Réunion. Comment faire respecter ses droits en tant qu’auteur ? Les sociétés de défense des artistes telles que la SACEM (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique) ou la SPEDIDAM (Société de perception et de distribution des droits des artistes interprètes de la musique et de la danse) sont très peu présentes sur place. Certains artistes ne savent même pas qu’elles existent tant leur visibilité est faible.

Si les structures ne viennent pas à eux, les artistes d’Outre-mer devraient pourtant pouvoir espérer aller à elles pour se faire connaître. Pas si simple.

Obstacle géographique et financier

L’obstacle n’est pas seulement géographique, il est aussi financier. Les frais de déplacements sont entièrement à charge de l’artiste qui espère se faire connaître. La SPEDIDAM finance parfois une dizaine de voyages maximum pour un artiste des DOM-TOM qui aurait déjà signé un contrat avec une maison de disque du continent. Il s’agit d’un cercle vicieux dont il est difficile de sortir. Autre obstacle de taille : les réseaux. Obligatoires pour un artiste débutant, les contacts sont difficiles à nouer si celui-ci habite de l’autre côté du globe.

Se faire un nom dans le milieu musical quand on vient des régions françaises d’outre-mer est donc un chemin de croix. Le parcours du combattant ne s’arrête pas là.

Une musique pas forcément reconnue

Les musiques et les cultures musicales d’Outre-mer souffrent très clairement d’un problème de visibilité dû à leur faible diffusion sur les ondes hertziennes. Cantonnées sur France Ô ou RFO, leur diffusion est uniquement régionale. Le succès doit être immense pour qu’elles espèrent arriver réellement en métropole. Rappelons-nous le groupe guadeloupéen Zouk’ machine, premier au Top 50 pendant 9 semaines avec leur titre Maldone, sorti en 1989.

Nombreux artistes d’Outre-mer évoquent les difficultés récurrentes à passer sur une des six grandes chaînes françaises. Très prisées en période estivale, les musiques des îles sont uniquement assimilées à des musiques dansantes, chaleureuses, traditionnelles, « sexy », à l’été en somme !

Comment rétablir l’équilibre ?

Seulement quelques solutions sont aujourd’hui envisagées. Se servir plus que jamais d’Internet pour se faire connaître. Malheureusement ce média, bien qu’international, ne rapporte quasiment rien aux artistes. La SACEM et la SPEDIDAM n’ont pas reçu l’accord du Parlement pour prélever une sorte de « dîme » sur les téléchargements reversés aux artistes.

La solution gouvernementale est tout autre : faire de la discrimination positive avec des quotas pour la représentation des artistes d’Outre-mer. Un représentant de la Délégation Interministérielle pour l’égalité des chances des Français d’Outre-mer propose d’aider les artistes de la même manière qu’on aide les étudiants d’outre-mer pour trouver des logements universitaires. Des assises devraient également être engagées avec Yves Jégo, secrétaire d’Etat à l’Outre-mer.

En attendant, le zouk, le gwo-ka, le kako mizik ou encore le bélé, joués sur le territoire français, sont toujours classés dans la catégorie « musiques du monde ».

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