Quand l’Europe rencontre l’Afrique du Sud


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L’Afrique du Sud et l’Union Européenne se réunissent à Bordeaux (France) ce vendredi afin d’entériner des partenariats économiques et d’évoquer les grandes questions sécuritaires, alimentaires et politiques du moment. L’association DiversCités organisera en marge de ce sommet un mouvement de contestation pour notamment exiger que le président français Nicolas Sarkozy s’excuse pour son « Discours de Dakar » prononcé, il y a un an jour pour jour.

C’est la première rencontre de l’Union Européenne (UE) avec l’Afrique du Sud, et c’est le premier sommet organisé avec un pays tiers depuis que la France préside l’UE. Ce baptême s’ouvre ce vendredi à Bordeaux, dans le Sud-Ouest de la France. A cette occasion, le chef d’Etat sud-africain Thabo Mbeki s’entretiendra avec Nicolas Sarkozy – le président français aux commandes de l’Europe pour six mois – et le président de la Commission Européenne, José Manuel Barroso.

« Approfondir un peu plus les relations »

« Un des objectifs principaux de la rencontre] est d’approfondir un peu plus les relations entre l’Afrique du Sud et l’Union Européenne », a expliqué le gouvernement sud-africain dans un communiqué. L’Afrique du Sud, puissance économique montante, constitue en effet un partenaire commercial de choix pour les Vingt-Sept : l’UE est le principal investisseur de la nation arc-en-ciel, qui en retour destine la majeure partie de ses exportations au marché européen. C’est forte de ces liens que l’UE compte renégocier les [Accords de Partenariat Economique (APE), qui stagnent sous la pression de l’Afrique du Sud, qui ne fait d’ailleurs pas partie des pays Afrique Caraïbe Pacifique (ACP).

D’autre part, des déclarations communes sont prévues au sujet du changement climatique, de l’importance du secteur privé en Afrique, notamment, et de la sécurité alimentaire. Nicolas Sarkozy souhaite aussi parler des problèmes sécuritaires qui touchent l’Afrique et le Moyen-Orient. Il le fera en évoquant la Politique Européenne de Sécurité Commune (PESC) et ses intentions quant aux violences qui touchent le Tchad, le Soudan, la République Démocratique du Congo et le Moyen-Orient.

Le « hic » du Zimbabwe

La bonne entente qui règne entre l’UE et l’Afrique du Sud risque de buter sur la question centrale du Zimbabwe, « toujours à l’ordre du jour des réunions avec l’Afrique du Sud, même si nous n’attendons rien de celle-là sur le sujet », a fait valoir la Commission Européenne.

L’Union Européenne a voté mardi à Bruxelles le renforcement des sanctions contre le régime du président zimbabwéen Robert Mugabe, ajoutant 37 noms à la liste de personnalités politiques visées par le gel de leurs avoirs et une interdiction de séjourner sur le sol européen. Des dispositions qui vont à l’encontre de la ligne de conduite de Thabo Mbeki, le médiateur de la crise zimbabwéenne qui, depuis le début des violences politiques entre le pouvoir et l’opposition, a tenté de ramener le calme et de parvenir à un compromis.

Le spectre du « Discours de Dakar »

Le sommet historique UE-Afrique du Sud tombe un an jour pour jour après le tristement célèbre « Discours de Dakar » de Nicolas Sarkozy, prononcé en 2007 à l’Université Cheikh Anta Diop. A cette occasion, le chef de l’Etat français avait parlé de « l’homme africain [qui] n’est pas assez entré dans l’Histoire. » Ajoutant cette tirade demeurée dans les annales : « Le paysan africain, qui depuis des millénaires vit avec les saisons, dont l’idéal de vie est d’être en harmonie avec la nature, ne connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles. »

Une plainte avait été déposée pour incitation à la discrimination et à la haine raciale, mais le président avait bénéficié de l’immunité liée à sa charge. Le président sud-africain était alors le seul chef d’Etat africain à avoir soutenu et approuvé les paroles de Nicolas Sarkozy.

DiversCités dénonce

Un an après, le milieu intellectuel et associatif français et africain n’a pas jeté l’éponge. DiversCités, un mouvement de citoyens à travers le monde, reproche au président français ses paroles à Dakar et le soupçonne de vouloir opérer un rapprochement entre l’UE et l’Afrique du Sud pour enraciner sa politique sur l’immigration.

DiversCités dénonce par ailleurs Thabo Mbeki pour avoir « dilapidé l’héritage de Mandela ». Selon l’organisation, « les agressions d’Africains (…) dans les rues de Johannesburg sont une honte et sont imputables à l’irresponsabilité de l’Etat Sud africain ». Ils réclament donc des excuses et prônent un travail de mémoire ainsi qu’un dialogue interculturel. L’organisation citoyenne a enfin appellé à un grand rassemblement ce vendredi à Bordeaux pour un sit-in Place de la Bourse et un débat animé à 20h au cinéma l’Utopia.

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