Quand George Bush finance les mosquées


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Dans un pays qui garantit la liberté du culte et qui fut une terre d’asile pour les communautés qui souffraient de la persécution religieuse en Europe, ne serait-il pas délirant de dire que l’Islam est attaqué ? De telles affirmations peuvent déclencher chez les grands spécialistes de la politique américaine des éclats de rire… jaune dans certains cas. Car la problématique se situe complètement en dehors d’une prétendue atteinte à la foi des musulmans américains.

La liberté de culte aux USA est un élément sacré, tant dans la vie politique que sociale et c’est cette liberté qui a permis à diverses groupes de prospérer et d’avancer. Ici, il est tout à fait judicieux d’évoquer le cas de deux politiciens propulsés au sommet pour devenir présidents des États-Unis. Il s’agit de Théodore Roosevelt et de Franklin Roosevelt (initialement Delano) ayant toujours prisé la liberté de croyance car l’exemple le plus près venait de leur propre famille. C’est dire que leurs arrières-parents qui appartenaient à une secte rare (famille Delanoue), avaient fui la France à cause de la persécution religieuse, pour trouver refuge en Amérique. Si le cas des Delano reste une bonne référence, il sera encore important de parler d’un fait majeur accompli par Georges Washington, le père de la nation américaine, lequel n’a jamais hésité, au nom de l’encouragement de la liberté de culte, à se déplacer en personne chez les communautés juives de Providence (État de Rhodes Island) ou chez des sectes Dutsh de Philadelphie (État de la Pennsylvanie).

Ainsi et depuis leur création, les Etats-Unis ont toujours peaufiné, grâce à la solidité de leurs institutions, une très bonne gestion laïque de l’Etat (séparation des pouvoirs) face à une permanence protestante riche et influente. Toutefois, il demeure utile de dire que malgré le principe de la laïcisation, la majorité des présidents américains ont, à un moment ou à un autre, affiché publiquement leur foi religieuse, très affirmée durant certains règnes -bien entendu reflétant le conservatisme ambiant de la société américaine-, mais pour l’actuel président, Dieu n’a jamais été aussi présent au coeur même du projet politique et social étasunien.

La religiosité de George Bush se trouve actuellement au centre d’une problématique, provoquant les réactions en chaîne tant du côté de la gauche que du côté des tenants du principe de la séparation de l’Église et de l’État. Cette religiosité intra-muros affecte la conduite présidentielle et il est, par ailleurs, très intéressant de découvrir la spiritualité politique du chef de la Maison Blanche, du fait d’une multitude de détails pour le moins inhabituels dans sa conduite religieuse.
Le président américain est un homme qui quitte son lit très tôt, à l’aube même et s’isole dans une pièce de sa résidence. Chaque jour, il s’agenouille pour la prière et médite sur un passage de la Bible. «Il fait ça dans ses rares temps libres», disait James Harding un journaliste du «Financial Times». Les extraits favoris de George W. Bush sont évidemment ceux des penseurs chrétiens comme le pasteur Billy Graham (www.billygraham.org). Le président américain est un grand lecteur des textes d’Oswald Chambers et a pour rédacteur de discours un fondamentaliste chrétien nommé Michael Gerson appelé affectueusement -le scribe-. Cette confirmation vient de Dan Bartlett ex-directeur des communications à la Maison Blanche qui parle d’un président très sérieux par rapport à la foi… Elle lui a donné l’aisance et la capacité de gouverner. Le théologien Georges Hunsinger (déclaration reprise par «Financial Times»), n’est pas de cet avis, ses propos restent durs à l’égard de Bush. Il n’en revenait pas d’ailleurs lorsqu’il a entendu le locataire de la Maison Blanche utiliser, pour la première fois, cette invention du Bien et du Mal. Hunsinger furieux disait: «nous avons un président qui s’apprête à plonger le monde dans le chaos en déclenchant des guerres injustifiables et il le fait en partie en revêtant le manteau de la religion».

Bush et l’Islam américain

De par sa qualité de personnage religieux et croyant, George Bush pousse le pouvoir américain vers un retour à une religiosité, car il se voit tout le temps motivé par les dividendes moraux que pourrait apporter un encouragement à la pratique religieuse. Côté Islam… On le considère comme étant l’un des présidents américains qui, emporté par diverses questionnements d’ordre moral, ne cesse de répéter à son entourage et à ses alliés saoudiens qu’il voue un respect à certains jugements faits par l’Islam, surtout dans le cas de l’avortement, car il considère, lui aussi, le caractère sacré de la vie, de la conception jusqu’à la mort naturelle.

Épaulé par deux théologiens, Bush a accumulé depuis les évènements du 11 septembre beaucoup de connaissances sur l’Islam et s’intéresse à certaines positions concernant quelques principes dans la vie. Il y trouve d’ailleurs beaucoup de convergences. Après l’avortement donc, c’est cette sodomie hétéro ou homosexuelle légalisée au Canada et en Europe, qui le perturbe et l’irrite continuellement. Il était déjà partisan de son interdiction (interdite aussi dans 13 États américains, Texas en tête). C’est dire que le chef de la Maison Blanche est un farouche opposant à l’émergence des sociétés gays et lesbiennes et s’attèle à trouver des alliances planétaires en vue de contrecarrer ce qu’il appelle la grande menace au genre humain. Il préconise aussi une éducation sexuelle basée sur l’abstinence, défend bec et ongles la pérennité de la cellule familiale et résiste à une laïcisation totale de l’école. Cependant l’élément qui intrigue encore beaucoup plus ce croyant protestant réside dans la conduite scientifique en matière de cellules souches et de clonage humain. Le dossier est tellement délicat qu’il en avait demandé conseil à son plus proche collaborateur en l’occurrence Deal Hudson, éditeur de la revue catholique «Crisis Magazine» qui a soutenu la nomination d’un musulman algérien à la tête des instituts nationaux de la santé (INH).

Une aide accrue pour les institutions religieuses

Mais la grande nouveauté dans les actions controversées de Bush est cette aide au institutions religieuses. Pour la première fois dans l’histoire des États-Unis, l’ampleur de la contribution fédérale a pu toucher des lieux de culte et des associations qui y gravitent (y compris des mosquées) car la philosophie de ce président, obnubilé par The faith (la foi) s’articule sur la valorisation de l’action religieuse et sociale. L’idée «humanitaire» de Bush vise (les églises, les mosquées et les synagogues) qui sont appelées à assumer des fonctions sociales comme l’accueil des sans-abris pour les églises, l’aide aux sidéens pour les synagogues et enfin une intervention des mosquées dans les cas de familles monoparentales en difficulté. Mais cette initiative choque les opposqnts à toute intervention fédérale dans les lieux de culte, et on a vu un organisme comme l’«American Civil Liberties Union» s’élever contre ce qu’il qualifie de «mesure la plus anticonstitutionnelle prise jusqu’ici par l’administration de Bush». En tout cas, et pour le volet se rapportant à la religion musulmane, il est difficile de produire une statistique exhaustive du fait de la complexité de la situation chez les entités religieuses ou culturelles se réclamant de l’Islam et majoritairement moyen-orientales, mais un bref aperçu, à titre indicatif, a été réalisable, grâce à certaines données gouvernementales.

Les associations musulmanes aux Etats-Unis

Cependant, il faut avouer, sans détour du tout, que la majorité des Associations musulmanes aux États-Unis ressemblent étrangement aux fédérations sportives du ministère de la Jeunesse et des Sports en Algérie puisque demeure carrément un exercice difficile, le fait de vouloir cerner les dépenses, les localisations et les composantes de ces structures.
Pour créer une association, l’enregistrement exige seulement trois personnes. Beaucoup d’entités se rapportant à l’Arabe et à l’Islam ont pour directoire une composition du type un principal, sa femme et son beau-frère. Et pour gagner le cœur de Bush ou des responsables américains -différents paliers- il suffit de croiser l’appellation d’une combinaison du genre: musulmans et dialogue ou -Islam pour la victoire des États-Unis- Tolérance et amitiés musulmanes, ou encore Musulmans Libres contre le terrorisme; et là, devient facile l’accès à des aides fédérales, étatiques, privées ou municipales. Fait suprême dans une ère narquoise lorsque le subventionné ouvre un bureau et se reconvertit en analyste politique pour surgir sur les écrans d’Al-Jazira et autres tribunes bédouines, pour critiquer les États-Unis.

Une folie s’est emparée d’un grand nombre d’individus qui se sont spécialisés dans les demandes de subventions juste après l’annonce faite par Bush, au sujet d’argent pour les corporations musulmanes alors qu’il mettait en place en 2001, une section de la Foi dénommée «The White House Faith-based and Communauty Initiatives Office».
En effet, ce genre de structure a des prolongements au niveau de certains départements ministériels et au niveau des bureaux des gouverneurs. Si on prend l’exemple de 2004, on trouve que quelque 626 millions de fonds fédéraux (Federal funding) avaient touché l’ensemble de la communauté charitable des États-Unis, un pays de 295 millions d’habitants en janvier 2005. Entre 6 et 8 millions de dollars (estimation au conditionnel) sont allés à des associations purement arabes (chrétiens compris) ou Arabes musulmans. Cela concerne aussi les aides données directement aux mosquées légalement instituées.

Il s’agit d’un très grand montant et pour rester dans le cadre arabe, il est intéressant de savoir que le nombre de cette population, aux États-Unis, avoisine les 1,31 million, majoritairement chrétiens (62%) et 28% musulmans. Une répartition culturelle donne ceci: les Libanais forment 37% de ce nombre suivi des Syriens 13% et des Égyptiens 12% Les Algériens sont de l’ordre de 0,80% à quelque 10.804. Les personnes nord-africaines et se réclamant Berbères lors de leur établissement aux Etats-Unis, sont de l’ordre de 0,15% soit 1.965. Les communautés libanaises et égyptiennes sont celles qui avaient le plus bénéficié de fonds fédéraux. Les données des deux villes de Dearborn 101.000 ht (Etat du Michigan) et Jersy City (Etat du New Jersy) (242.000 ht) (mentionnées en exemple) donnent respectivement 31.000 et 8.000 personnes d’origine arabe. A Dearborn, toutes les associations et les mosquées qui avaient demandé de l’argent auprès du bureau du gouverneur de l’Etat ont eu les aides, y compris une petite école coranique qui a reçu l’aide du département fédéral de l’Education. A New Jersey, les demandes formulées auprès de «Office of Faith Based Initiatives» ont été satisfaites. Même cas pour les mosquées de Los Angeles où une communauté de 27.000 personnes vit dans cette mégapole de 3,7 millions d’habitants.

New York, El-Haj Ml Zouaïmia

De notre partenaire : Le Quotidien d’Oran

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