Procès du génocide rwandais : la perpétuité requise contre Simbikangwa


Lecture 4 min.
arton38186

L’avocat général de la cour d’assises de Paris a requis, ce mercredi, la réclusion criminelle à perpétuité contre Pascal Simbikangwa, ex-capitaine de la garde présidentielle. Le procureur et le vice-procureur, particulièrement éloquents, ont tenté de démontrer à la cour que l’accusé était bien un des « instigateur » du génocide rwandais de 1994.

De notre correspondant à la cour d’assise de Paris

La journée a du être longue pour Pascal Simbikangwa jusqu’à l’annonce de l’avocat général Bruno Sturlese, représentant l’accusation, sur la peine requise à son encontre. Il devait s’en douter. « Je vous demande que Pascal Simbikangwa soit reclus à vie », tel a été la déclaration du représentant de l’accusation.

Le procureur a été secondé par Aurélia Devos, vice-procureur et chef du pôle crimes contre l’humanité, créé à Paris en 2012. Tout au long de l’après midi, elle a énuméré méthodiquement, rigoureusement et de façon convaincante, les éléments du dossier à charge contre Pascal Simbikangwa. A plusieurs reprises, elle a évoqué notamment Pascal Gahamanyi, ce Tutsi qui a trouvé refuge avec sa famille chez l’accusé et qui l’a vu distribuer des armes aux Interahamwes. Ce sont ces jeunes Hutus rwandais constitués en milices qui ont fait une grosse partie du sale boulot pendant le génocide. Il l’a vu aussi donné des ordres, à ces mêmes Interahamwes, en passant avec son pick up blanc aux barrières qui servaient à filtrer les Tutsis. « Ne les laissez pas passer » aurait-il dit, selon ce témoin, rappelle le vice-procureur, Aurélia Devos.

« La défense s’est acharnée à vouloir faire chuter les témoins »

Elle s’est aussi attaquée à la défense, qui a pu « questionner (les témoins) avec ironie, en manquement du respect le plus élémentaire » à des rescapés, pour certains encore traumatisés. Elle évoque des « pressions parfois physiques », des « techniques d’interrogatoires dignes des procès de grand banditisme ». « La défense s’est acharnée à vouloir faire chuter les témoins » a pour sa part déclarer l’avocat général Bruno Sturlese qui a précédé sa collègue Aurélia Devos dans l’ordre des interventions de la journée, avant de reprendre la parole pour annoncer la peine requise.

Ce procureur a ouvert ce réquisitoire de façon particulièrement éloquente. « Je ne pourrais plus jamais être le même homme » a-t-il déclaré. Il a rappelé très clairement pourquoi Pascal Simbikangwa n’était pas accusé de torture, alors que des témoignages très durs ont été entendus par la cour. La prescription des crimes de ce type est alors en cause. Il s’est certainement adressé aux jurés en premier, à qui revient la décision finale sur la sentence, quand il a expliqué pédagogiquement les raisons de la tenue de ce procès en France. La France ayant refusé de l’extrader, il fallait le juger dans ce pays, « pour ne pas que la France devienne un sanctuaire pour les génocidaires » explique-t-il.

« Votre responsabilité Pascal Simbikangwa (…) c’est le sale boulot laissé au petit peuple »

Il utilise des mots très forts quand il en vient finalement à la peine requise. « Pascal Simbikangwa est avant tout, d’abord et surtout, un instigateur du génocide » assène l’avocat général et il poursuit, « c’est la pire responsabilité, votre responsabilité Pascal Simbikangwa (…) celle de donneur d’ordre. C’est une responsabilité en apparence moins visible (…) mais c’est le sale boulot laissé au petit peuple ». Il ajoute encore, « vous avez mis tout votre pouvoir, à plein temps, au service de la machine génocidaire ».

Il s’adresse aux jurés quand il les incite à la cohérence dans leur jugement. Il rappelle que c’est la première fois qu’une cour d’assises, en France, juge une personne pour génocide. Pascal Simbikangwa doit être jugé par rapport à la gravité des crimes qui lui sont reprochés, et c’est pour cette raison que le procureur requiert la réclusion criminelle à perpétuité.

«  Mesdames, messieurs les jurés, mesdames et messieurs de la cour, la société que je représente attend de vous un message clair, pour les morts, les survivants et les vivants et pour les générations futures qui regarderont avec intérêt ce procès » conclut l’avocat général Bruno Sturlese. Les avocats auront fort à faire, ce jeudi, lors de la plaidoirie de la défense.

Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News