Présidentielle en Guinée-Bissau : la stabilité en ligne de mire


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Le premier tour de la présidentielle en Guinée-Bissau s’est déroulé ce dimanche dans le calme. Les résultats de ce scrutin anticipé seront décisifs pour un pays dont la vie politique est loin d’être apaisée.

Près de 600 000 Bissau-Guinéens ont voté dans le calme ce dimanche pour choisir le successeur de Malam Bacaï Sanha, l’ancien président de la Guinée-Bissau décédé le 9 janvier dernier à Paris. Ce scrutin présidentiel anticipé paraît déterminant pour l’avenir politique d’un pays en proie à une grande instabilité.

Qualifié de « narco-Etat », une appellation récemment nuancée par un rapport de l’ONG International Crisis Group, le développement de la Guinée-Bissau est entravé par les nombreux coups d’Etat perpétrés depuis l’indépendance de cette ancienne colonie portugaise en 1974. Pour International Crisis Group, cette présidentielle, les futures législatives et les premières élections locales qui seront organisées en Guinée-Bissau cette année sont autant de risques politiques pour ce pays. Sans compter, la délicate réforme du secteur la sécurité (RSS) qui est actuellement suspendue. Elle prévoit notamment le départ de 2 500 militaires de l’armée. Les liens de plus en plus étroits qu’entretiennent Bissau et Luanda, notamment sur le plan militaire, constituent également un facteur d’instabilité. Ils inquièteraient non seulement les partenaires historiques de la Guinée-Bissau que sont le Nigeria et le Sénégal, mais aussi la communauté internationale.

Par ailleurs, les crimes politiques commis en 2009 et qui demeurent non élucidés participent à l’aggravation des tensions politiques entre le parti au pouvoir et l’opposition. Après la mort de Malam Bacaï Sanha, quatorze partis issus de l’opposition avaient refusé que la présidence par intérim soit assurée par le président de l’Assemblée nationale, Raimundo Pereira, comme prévu par la Constitution. Ils craignaient le « limogeage de l’actuel procureur général » qui aurait permis « de ne pas envoyer devant les tribunaux les personnalités suspectées dans l’assassinat en 2009 du président Joao Bernardo Vieira et du chef d’Etat-major général de l’armée Batista Tagmé Na Waïe ». L’un des chefs militaires arrêté après leur assassinat, le colonel Samba Djalo, a été assassiné ce dimanche par des hommes arborant des tenues militaires, rapporte l’AFP. Libéré après huit mois de détention, l’arrestation de l’ex-responsable des renseignements militaires de Guinée-Bissau et de son co-détenu l’ancien chef d’Etat-major Zamora Induta avait été qualifiée d’arbitraire
par la Ligue bissau-guinéenne des droits humains et les pays occidentaux avaient qualifié d’arbitraire.

Des risques politiques inhérents au calendrier électoral

Le meurtre du colonel Samba Djalo est intervenu au soir d’un vote où neuf candidats étaient en lice. Parmi les candidatures les plus sérieuses, celles de l’ancien Premier ministre Carlos Gomes Junior qui a démissionné pour se présenter à la présidentielle. L’ancien hôte de la primature, âgé de 62 ans, est le chef du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert (PAIGC, au pouvoir). Il paraît convaincu de sa victoire prochaine. L’ancien président Kumba Yala, 59 ans, qui défend les couleurs du Parti de la rénovation sociale (PRS, opposition), est un autre poids lourd de cette élection. Il est balante, comme le quart des Bissau-Guinéens et la majorité des militaires. L’ex-chef d’Etat par intérim Henrique Rosa, 66 ans, qui se présente en indépendant, tout comme Manuel Sherifo Nhamadjo, transfuge du parti au pouvoir, comptent également parmi les principaux candidats ce cette présidentielle.

Le premier tour de cette élection s’est déroulé sous les yeux de 179 observateurs, majoritairement originaires du continent africain. La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), dont est membre la Guinée-Bissau, a dépêché la plus forte délégation : elle est composée de 80 observateurs. Les Etats-Unis et l’Union européenne ont envoyé chacun respectivement deux observateurs et deux experts électoraux. Avec dix observateurs, la délégation britannique est la plus importante qui représente un pays occidental.

Le second tour de la présidentielle devrait se tenir en avril.

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