
Un piratage sans précédent a secoué les autorités tanzaniennes cette semaine : faux décès présidentiel, contenus pornographiques, désinformation… Face à l’ampleur du choc, le gouvernement a coupé l’accès à X (anciennement Twitter), officiellement pour freiner la propagation de fausses nouvelles.
La Tanzanie a brusquement bloqué l’accès à X (anciennement Twitter) mercredi 17 juillet, plongeant les internautes dans l’incertitude. À l’origine de cette mesure, une vague de cyberattaques ayant ciblé plusieurs comptes institutionnels de haut niveau. Des informations mensongères, des contenus à caractère sexuel et des messages de propagande ont été publiés, déclenchant un tollé national. Ce verrouillage numérique intervient dans un contexte de tension politique croissante à l’approche des élections présidentielles d’octobre.
Une cyberattaque d’une ampleur inédite
Tout a commencé mardi soir, lorsque le compte officiel de la police tanzanienne a été piraté. Les pirates y ont annoncé à tort le décès de la présidente Samia Suluhu Hassan, avant de publier des vidéos à caractère pornographique et des contenus de désinformation. Le compte d’Airtel Tanzania, l’un des principaux opérateurs télécoms du pays, a également été compromis. Mercredi, le ministre de l’Information, Jerry William Silaa, a reconnu devant le Parlement que plusieurs entités, dont l’administration fiscale via YouTube, avaient été ciblées. Il a pointé du doigt des failles dans les protocoles de cybersécurité de ces institutions.
En réponse à ces attaques, les autorités ont décidé de bloquer l’accès à X pour tous les utilisateurs non équipés d’un VPN. Toutefois, en Tanzanie, l’utilisation non autorisée de VPN reste passible de sanctions pénales. Selon l’observatoire Internet NetBlocks, les principaux fournisseurs d’accès du pays ont interrompu l’accès à la plateforme dès mardi soir. Officiellement, il s’agit d’un effort pour endiguer la propagation de contenus « trompeurs et contraires à l’éthique », selon les mots de la police.
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Un climat politique de plus en plus tendu
Cette décision intervient dans un contexte politique chargé. Lundi, la militante kényane Martha Karua, venue assister au procès pour trahison du leader de l’opposition Tundu Lissu, s’est vu refuser l’entrée sur le sol tanzanien. Deux autres personnalités, dont un défenseur des droits humains kényan et une journaliste ougandaise, ont disparu après leur arrivée dans le pays. La présidente Hassan a alors fermement déclaré qu’aucun étranger ne serait autorisé à troubler la paix nationale.
La plateforme X représente un espace crucial de liberté pour de nombreux Tanzaniens, notamment les intellectuels, activistes et figures de l’opposition. Ces derniers redoutent que ce blocage ne soit qu’un prétexte pour museler les voix dissidentes à l’approche des élections. Malgré les assurances du porte-parole du gouvernement, Gerson Msigwa, sur la sécurité du cyberespace et la volonté de retrouver les responsables, la méfiance persiste. De nombreuses ONG craignent un retour aux pratiques autoritaires observées sous l’ancien président John Magufuli.