Pourquoi l’Afrique peut ressortir plus forte de la crise


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L’Afrique devrait moins souffrir de la crise que les pays industrialisés, selon le directeur de l’analyse économique et des marchés du travail au Bureau international du travail (BIT). Mieux, Duncan Campbell estime que le continent pourrait booster son développement s’il joue les bonnes cartes. Interview.

CampbellDuncan.jpgLa crise financière mondiale frappera durement l’Afrique. « De nombreuses économies africaines qui dépendent des marchés des matières premières et de l’énergie souffriront […] de la baisse de la demande et des prix de ses deux ressources », souligne notamment le nouveau rapport du Bureau international du travail (BIT) sur les tendances de l’emploi dans le monde. La situation ne serait toutefois pas aussi dramatique qu’il y paraît. Le directeur de l’analyse économique et des marchés du travail au BIT explique que l’Afrique peut faire de ses faiblesses des atouts. Duncan Campbell ajoute même que la crise permettra la création de nouveaux emplois.

Afrik.com : Pensez-vous que certains secteurs seront moins touchés par la crise ?

Duncan Campbell :
Je pense que certains secteurs sont un peu plus à l’abri que d’autres. Il y a une nette corrélation entre l’ouverture extérieure d’une économie et la façon dont elle est frappée par la crise. Les économies africaines sont moins orientées vers l’exportation, et en conséquence elles subissent moins la crise.

Afrik.com : Le rapport du BIT parle de nombreuses pertes d’emplois à venir. Mais des emplois seront-ils créés ?

Duncan Campbell :
Certains services destinés au marché domestique sont moins concernés par la crise. On a vu dans plusieurs pays africains que des gouvernements commencent à vraiment agir en tant que gouvernements : ils font des dépenses pour créer des emplois, notamment dans les infrastructures.

Afrik.com : Pensez-vous que la crise va favoriser la création d’emplois verts, respectueux de l’environnement ?

Duncan Campbell :
Parmi les nouveaux emplois que créeront les gouvernements pour améliorer les infrastructures, certains seront des emplois verts. Je pense que ces emplois seront orientés vers la lutte contre la désertification, l’aménagement des ressources hydriques, la reforestation… On va par ailleurs assister à un changement dans l’utilisation des ressources naturelles : utiliser le soleil peut-être très rentable, et ce n’est pas négligeable avec la flambée du cours des énergies.

Afrik.com : Où les gouvernements trouveront-ils les fonds pour financer ces nouveaux emplois ?

Duncan Campbell :
Les pays africains doivent diversifier leur économie. Etant donné que les revenus de l’exportation baissent, il vaut mieux se concentrer sur le marché domestique. Il faut prendre une partie des revenus tirés de l’exportation du coton, du charbon, des diamants, de l’or… de toutes les autres richesses de l’Afrique pour financer les services liés au marché intérieur. D’autant que la valeur de ces ressources naturelles augmente et que, je pense, ce n’est pas près de s’arrêter.

Afrik.com : Avec la crise, le secteur informel va-t-il prendre de l’ampleur ?

Duncan Campbell :
La taille du secteur informel en Afrique est déjà énorme. Mais avec les pertes d’emploi dans le secteur formel, certains chômeurs pourraient se tourner vers le secteur informel pour être en mesure d’acheter de quoi nourrir leur famille. Certains pourraient également demander aux autres membres de la famille de travailler pour gagner plus de revenus. On avait assisté à un tel phénomène il y a une dizaine d’années en Asie chez les cols blancs du secteur financier.

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