Niger : drame d’Injar, la lutte antiterroriste fait des dizaines de victimes innocentes


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Drapeau du Niger
Drapeau du Niger

Une opération militaire contre des terroristes à moto dans l’ouest du Niger a tourné au cauchemar. Des dizaines de civils ont péri dans des frappes aériennes menées par l’armée nigérienne dans le village d’Injar. Cette tragédie, révélée vendredi, illustre cruellement les défis de la guerre contre le terrorisme dans une région où populations innocentes et groupes jihadistes coexistent dans un dangereux voisinage.

Des sources locales ont révélé vendredi 26 septembre 2025 une tragédie qui secoue le Niger : des dizaines de civils ont péri dans des frappes aériennes menées en début de semaine par l’armée nigérienne dans la région de Tillabéri, près de la frontière malienne. Le village d’Injar, situé dans le département de Filingué à environ 200 kilomètres au nord-est de Niamey, a payé un lourd tribut à cette opération militaire qui visait initialement des terroristes.

Une opération antiterroriste qui tourne au drame

Selon les informations confirmées par des sources locales, l’armée nigérienne avait pour objectif de frapper des terroristes circulant à moto dans la zone. Cependant, l’opération a causé la mort de nombreux civils innocents, transformant une mission de sécurisation en tragédie humanitaire.

Cette région de l’ouest du Niger, frontalière du Mali et du Burkina Faso, constitue un foyer d’activité pour l’État islamique au Sahel (EIS) et d’autres groupes jihadistes. Depuis plusieurs années, les autorités nigériennes mènent des opérations de contre-insurrection dans cette zone dite « des trois frontières« , où la menace terroriste reste particulièrement élevée.

Face à l’ampleur du drame, les plus hautes autorités du pays ont réagi rapidement. Le gouverneur de la région de Tillabéri s’est rendu personnellement à Injar pour présenter les condoléances officielles et exprimer la compassion des autorités. Il était porteur des condoléances du chef de l’État, le général Abdourahmane Tiani, aux familles endeuillées par cette tragédie.

Un contexte sécuritaire tendu

Cette tragédie s’inscrit dans un contexte régional particulièrement difficile. Depuis le coup d’État de juillet 2023 qui a porté la junte militaire au pouvoir, le Niger fait face à une intensification des violences jihadistes. Selon Human Rights Watch, l’État islamique au Sahel a tué environ 1 600 civils depuis l’arrivée de la junte au pouvoir.

La région de Tillabéri reste l’épicentre de ces violences, avec des attaques récurrentes contre les forces de sécurité et les populations civiles. En septembre, plusieurs incidents meurtriers ont déjà endeuillé la région, notamment une attaque à Takoubatt qui avait fait 22 victimes civiles lors d’une cérémonie de baptême.

Cette tragédie met en lumière les difficultés rencontrées par les forces armées nigériennes. Les groupes jihadistes exploitent souvent la proximité avec les populations civiles, utilisant des tactiques qui compliquent les opérations militaires et augmentent les risques de dommages collatéraux.

Une région en quête de stabilité

La zone des trois frontières (Mali, Niger, Burkina Faso) reste l’une des régions les plus instables du Sahel. Malgré la coopération annoncée entre les régimes militaires de ces trois pays et leur retrait récent de la CEDEAO, les attaques contre les civils et les forces armées se poursuivent à un rythme alarmant.

Les populations locales expriment leur désarroi face à cette insécurité persistante. « On nous avait promis la fin de l’insécurité, mais nos villages continuent de brûler« , déplorait récemment un notable local, résumant la frustration des habitants face à la répétition des drames.

Idriss K. Sow Illustration d'après photo
Journaliste-essayiste mauritano-guinéen, il parcourt depuis une décennie les capitales et les villages d’Afrique pour chroniquer, en français, les réalités politiques, culturelles et sociales de l'Afrique
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