Mali : Issa Kaou N’Djim retrouve la liberté après un an de détention


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Issa Kaou N'Djim
Issa Kaou N'Djim (en bleu) Instagram : nn.africa

Après douze mois derrière les barreaux, Issa Kaou N’Djim, figure politique et médiatique connue pour son franc-parler, a recouvré la liberté ce jeudi 13 novembre 2025.

L’ancien député et vice-président du Conseil national de transition (CNT) avait été condamné en novembre 2024 à un an de prison ferme pour avoir mis en doute la crédibilité d’un présumé coup d’État déjoué au Burkina Faso, voisin et allié du Mali.

Une condamnation dénoncée comme « arbitraire »

L’affaire avait suscité une vague d’indignation au Mali et au-delà. Dans une publication sur les réseaux sociaux, Issa Kaou N’Djim avait exprimé des doutes sur la réalité d’un putsch annoncé par les autorités burkinabè. Ses propos avaient été jugés « dangereux pour la stabilité régionale » par la justice malienne, qui l’avait condamné pour « atteinte à la cohésion entre États ».

Mais pour les organisations de défense des droits humains, le procès relevait avant tout d’une tentative d’intimidation politique. Amnesty International, Reporters sans frontières et plusieurs associations locales de journalistes avaient dénoncé une « condamnation abusive » et une « atteinte grave à la liberté d’expression ».
« Il est inquiétant de constater que, dans le Mali d’aujourd’hui, émettre un doute ou une opinion peut valoir la prison », estimait à l’époque un porte-parole du Collectif des journalistes du Mali.

Une personnalité dérangeante du paysage politique

Ancien proche de l’imam Mahmoud Dicko, Issa Kaou N’Djim s’est imposé ces dernières années comme une voix critique du régime de la transition et un commentateur influent de la vie politique malienne. Porte-parole du mouvement Espoir Mali Koura (EMK), il s’était fait remarquer par ses interventions virulentes sur les réseaux sociaux et les plateaux de télévision.

Vice-président du CNT avant d’en être écarté pour « indiscipline », il est devenu l’un des symboles de ces personnalités issues de la transition, mais aujourd’hui marginalisées par le pouvoir militaire. Ses soutiens le décrivent comme un homme courageux et indépendant, tandis que ses détracteurs lui reprochent un ton jugé provocateur.

Un retour qui interroge sur le climat politique

La libération d’Issa Kaou N’Djim a lieu à un moment où le Mali traverse une phase de crispation politique avec des arrestations de plus en plus fréquentes de voix dissidentes. Pour Joseph Konaté, analyste politique basé à Bamako, « le cas Issa Kaou N’Djim illustre la fragilité du débat démocratique au Mali. Le pouvoir tolère mal la contradiction, même quand elle émane d’anciens alliés ».

S’il n’a pas encore pris la parole publiquement depuis sa libération, l’entourage d’Issa Kaou N’Djim affirme d’ores et déjà qu’il entend reprendre son combat pour la liberté d’expression. « Il n’a rien perdu de sa détermination », confie un proche collaborateur. « Il compte continuer à parler, mais cette fois avec encore plus de prudence ».

Dans un Mali en quête d’équilibre entre autorité et ouverture politique, le retour d’Issa Kaou N’Djim dans l’arène publique pourrait raviver un débat essentiel : celui de la place de la parole libre dans un État en transition.

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Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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