Algérie : les branchements illicites électrisent la Sonelgaz


Lecture 3 min.
Bâtiment Sonelgaz de la ville de Batna
Bâtiment Sonelgaz de la ville de Batna

La Sonelgaz perd chaque année 3 milliards de DA à cause des branchements illicites sur son réseau électrique. L’entreprise algérienne se donne 3 ans pour sécuriser ses compteurs.

282 000 logements ne sont pas raccordés au réseau électrique de la Sonelgaz. Les occupants de 35 000 logements n’ont pas formulé le voeu de se raccorder au réseau, 151 000 logements sont situés dans des sites ne permettant pas son installation et 97 000 autres sont soumis au bon vouloir de la Sonelgaz : ils attendent… Au total, cela représente quelque 5% du nombre global des abonnés de cette entreprise, estimé à 5 millions.

« C’est aussi 5% de branchements illicites », constate Naâman Atimène, responsable de la direction de la distribution, « puisque ces foyers-là recourent tout de même à des formes frauduleuses de raccordement ». « Les fraudeurs vont du simple commerçant au grand industriel, en passant par le chômeur, le fonctionnaire ou le chauffeur de taxi », insiste-t-il.

3 milliards de dinars

Les pertes occasionnées, environ 3 milliards de dinars, représentent près de 14,5% du chiffre d’affaires de la Sonelgaz (60 milliards de dinars). Naâman Atimène rappelle que, dans certaines régions du pays, les pertes ont pu atteindre des pics de 24%. « Durant les années noires du terrorisme, en 1996 notamment, des lieux comme la Casbah d’Alger, Blida ou Chlef, étaient totalement fermés, voire interdits à nos agents ». Qu’est-ce qui pousse les gens à voler de l’électricité ? Naâman Atimène refuse de croire que c’est à cause du prix, jugé trop élevé par certains. Ce prix est actuellement de 3,61 DA/kW, mais risque de connaître une hausse de 1 à 2% d’ici la fin de l’année. Le responsable affirme que le prix le plus juste serait de 5 DA/kWh environ.

« Avant les années 1990, les gens avaient peur des poursuites ; depuis les années du terrorisme, la justice est appelée à s’occuper d’autres affaires, et l’impunité s’est installée… ». Le directeur de la distribution explique que des dossiers attendent d’être traités depuis 3 à 4 ans. 14 000 plaintes ont été déposées par les services juridiques de Sonelgaz en 2001. « L’article 350 du Code pénal – qui prévoit des amendes de 500 à 2000 DA et des peines d’emprisonnement allant de 1 à 3 ans – ne semble pas dissuader suffisamment les fraudeurs », constate-t-il.

Portrait du fraudeur

Sonelgaz se donne 3 ans pour sécuriser 5 millions de coffrets de dérivation et autant de compteurs pour ramener les pertes à seulement 2%. « On supprime les coffrets de dérivation pour les remplacer par des connecteurs isolés qui resteront visibles, mais inaccessibles physiquement », confie Naâman Atimène. Pour raccorder 5 millions de foyers, l’entreprise devra débourser un fonds de 7 milliards de dinars étalés sur 6 mois.

Une équipe de quatre ingénieurs travaille à constituer une banque de données sur le comportement des fraudeurs. « Si nous ne pouvons pas établir un portrait type du fraudeur, du moins essayons de nous mettre à sa place et donc de prévoir des ripostes aux agressions qu’il fait subir à notre réseau ». Sonelgaz préfère davantage prévenir et – au mieux – dissuader les contrevenants potentiels.

Un huissier est sollicité pour constater de visu et en présence de l’agent releveur de l’entreprise le délit et établir un procès-verbal. Le mis en cause est sommé de payer un minimum de 20% de sa redevance à Sonelgaz s’il est promoteur, le reste pouvant suivre sur 3 ans. Dans le cadre d’un lotissement, le mis en cause est sommé de payer autant pour que Sonelgaz entame les travaux de raccordement. Pour conclure, Naâman Atimène tient à souligner que Sonelgaz, à elle seule, ne pourra jamais venir à bout de ce phénomène : « Les pouvoirs publics doivent intervenir ! ».

Par Djamel Amrouche pour notre partenaire El Watan

Suivez Afrik.com sur Google News Newsletter