Le rêve des demandeurs d’emploi algériens : un bon salaire chez une étrangère


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Un bon salaire chez une étrangère offrant des possibilités d’épanouissement et un bel avenir. Voilà sous forme «d’annonce du cœur» l’aspiration dominante des demandeurs d’emploi en Algérie telle que le montre une étude de la société Team Consulting International (TCI), spécialisée dans le conseil en ressources humaines.

Team Consulting dresse une cartographie descriptive des «situations professionnelles et des aspirations de postulants sur le marché du travail algérien». Il se dégage de cette étude une forte aspiration des demandeurs d’emplois à de meilleurs salaires, de préférence dans des sociétés multinationales, mais aussi des entreprises qui offrent une évolution satisfaisante des carrières avec, à la clé, une formation continue. TCI souligne que cette étude n’est pas «représentative de l’ensemble des postulants sur le marché du travail algérien» et qu’elle est basée sur les réponses des «candidats ayant transmis leur cv» à TCI. Elle est le résultat de 1.000 répondants sur un échantillon de 6.285 sondés.

Le profil des répondants

Plus des deux tiers des candidats (68%) sont des hommes, contre 38% de femmes. Si l’âge moyen est de 32 ans, près de la moitié des répondants composant l’échantillon (47%) ont entre 30-40 ans, contre 35% pour les 25-30 ans.

Concernant le niveau de formation, 60% des candidats sont bac+4/5 ans, contre 15% pour les diplômés bac + 5 et 13% pour les bac+3. Les disciplines «sciences commerciales» et «économie de gestion», arrivent en tête des spécialités des répondants avec respectivement 31 et 30%. Loin derrière, les diplômés en informatique, en technologie et sciences de la vie et de la nature ne représentent, respectivement, que 8, 6 et 4%. Plus de 4/5e des répondants (81%) ont un travail contre 19% de sans-emploi. Parmi les 827 employés, 18% sont dans les secteurs de l’agroalimentaire, de la grande consommation et de la distribution, contre 14% dans les nouvelles technologies de l’information (télécoms, Internet), et 10% dans le secteur financier et bancaire. Les mines et les hydrocarbures représentent 8%, à peine 1 point de pourcentage de plus que le secteur de la publicité/media (7%). Ce dernier, est d’ailleurs le seul secteur où il existe une prédominance féminine.

Le salaire, principale motivation

Par type d’entreprises, 50% des répondants proviennent de sociétés multinationales, et 12% de compagnies internationales. Les entreprises privées nationales, publiques et l’administration sont représentées respectivement par 26, 10 et 2% des candidats. Plus des deux tiers (77%) des personnes interrogées ont des contrats à durée indéterminée (CDI), contre 19% à durée déterminée (CDD), alors que 2% sont free-lance et 2% ne sont pas déclarés.

Plus des deux tiers (69%) aussi se disent «non satisfaits» par leurs salaires, contre 31% de satisfaits. Alors que le salaire moyen mensuel net déclaré est de 76.600 DA, une majorité de répondants (22%) se situe dans la tranche 51.000 – 80.000 DA, contre 4% dans la fourchette 210.000 à 400.000 DA. Pour les autres catégories salariales, ils sont 14% dans la fourchette 110.000 – 200.000 DA, 12% pour les 81.000 – 100.000 DA, 9% dans la tranche 46.000 – 50.000 DA, et 16% dans la fourchette 36.000 – 45.000 DA, à égalité avec les 26.000 – 35.000 DA. Les salaires variant de 15.000 à 25.000 DA représentent 7% de l’ensemble des interviewé.

Insatisfaction

En dehors des salaires, 40% des répondants affirment recevoir des avantages en nature. Parmi ces avantages, il y a le prêt bancaire (17%), le logement (7%), l’assurance (37%), et l’abonnement ADSL (13%).

Mais, globalement, 73% se disent insatisfaits du poste qu’ils occupent actuellement (contre 27% de satisfaits). La principale raison de l’insatisfaction est le salaire qui arrive en tête avec 19%, suivi de l’incertitude du plan de carrière (18%), des engagements non tenus (13%), le manque de reconnaissance de l’employeur (12%), et l’instabilité au sein de l’entreprise (10%). Dans le camp des satisfaits, le salaire n’arrive qu’en 5e position (avec 13%), alors que la bonne ambiance professionnelle et la reconnaissance du travail effectué par la hiérarchie arrivent en tête avec 20% des réponses chacune. La stabilité au sein de l’entreprise, et l’adéquation du poste de travail avec le profil, représentent respectivement 18 et 17% des réponses.

Dans tous les cas, la rémunération reste un des critères les plus importants pour intégrer un prochain emploi (avec 15%), suivie des opportunités de carrière (12%), de la stabilité de l’emploi (11%), de la qualité des formations proposées (9%), et de l’ouverture vers l’international (7%). Le critère du «prestige et l’image de l’entreprise» vient en dernière position avec seulement 3% des réponses.

Franche préférence pour les entreprises étrangères

Dans le volet «aspirations» de l’enquête, 77% des répondants affirment être à la recherche d’un emploi dans une multinationale, et 19% dans une entreprise internationale. Ce qui laisse très peu (4%) au reste des possibilités, à savoir l’entreprise publique (2%), le secteur privé local (1%) et l’administration (1%). Pour Samir Toumi, PDG de TCI, cette préférence pour les «étrangères» est «très significative». Le plus remarquable, estime-t-il, est que l’attrait pour les sociétés étrangères n’est pas motivé uniquement par le salaire. «Le mode de management, les méthodes de travail, la formation et la relation avec la hiérarchie et les possibilités d’évolution» sont des éléments qui concourent fortement à l’attractivité du travail dans une multinationale. En outre, les éléments de l’étude, montrent que l’entreprise privée nationale «ne projette pas une image très sécurisée». Mais, précise Samir Toumi, il ne s’agit pas d’une spécificité algérienne, c’est une «tendance que l’on retrouve dans les économies émergentes». L’entreprise algérienne privée peut-elle attirer les meilleurs ? Samir Toumi est catégorique : «C’est non. Elle n’aura pas les meilleurs. Ce qu’elle peut faire c’est monter une véritable organisation, un processus de développement structuré, même en recrutant des diplômés qui n’ont pas d’expérience, et les former». Le PDG de TCI note que les «grandes entreprises privées algériennes sont conscientes de cette problématiques» mais que ce n’est pas le cas de tout le monde


Les femmes plus «modérées» que les hommes ?

A ces aspirations s’ajoutent les niveaux des salaires visés dont la moyenne est de 115.500 DA. En haut de l’affiche il y a la fourchette 110.000 – 200.000 DA (24%), suivie de la 81.000 – 100.000 DA (15%), de la tranche 56.000 – 70.000 DA (14%), et 12% pour la catégorie 46.000 – 55.000 DA. Seuls 2% des répondants aspirent à des salaires dépassant 410.000 DA. Ces fourchettes se rétrécissent en nombre et en montant lorsqu’il s’agit du «salaire mensuel décent pour débuter une vie active en Algérie», dont la valeur moyenne est de 47.000 DA. Ainsi, 37% des répondants optent pour la fourchette 31.000 – 45.000 DA, contre 22% pour la tranche 46.000 – 55.000, et 19% pour la catégorie 20.000 – 30.000 DA. A la question de savoir si le répondant est «prêt à percevoir une rémunération inférieure à celle de votre poste actuel», seuls 35% répondent par l’affirmative. Quant à leurs critères d’acceptation, il s’agit principalement des «opportunités de carrière» (25%) et des «formations proposées» (22%). Enfin, l’étude note que «les aspirations salariales des hommes sont généralement supérieures à celles des femmes». Les taux d’augmentation des salaires souhaités par les femmes et par les hommes sont respectivement de 34 et de 50%. Une différence qui n’est n’est pas une caractéristique algérienne souligne Samir Toumi en relevant que les hommes sont peut-être plus enclins «à la négociation salariale».

Abdelkader Zahar, pour Le Quotidien d’Oran

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