Le Nigeria ne veut plus d’un président fantôme


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L’Assemblée nationale nigériane a débattu à Abuja, ce mardi, de la crise institutionnelle causée par l’absence du président Yar’Adua depuis près de deux mois. Elle a voté l’envoi d’une délégation en Arabie Saoudite pour vérifier son état de santé. Le même jour, à Abuja, a été organisée une marche de protestation, conduite par l’écrivain et prix Nobel de littérature Wole Soyinka. Pour tenter de couper court aux rumeurs alarmistes concernant son état de santé, Umaru Yar’Adua était sorti de son silence ce matin lors d’une émission à la radio BBC. Les appels à la démission se sont multipliés depuis son hospitalisation.

Le mystère dure depuis cinquante jours. Le président nigérian Umaru Yar’Adua, âgé de 58 ans, a déclaré aujourd’hui qu’il allait « mieux », dans sa première intervention publique à la radio BBC depuis qu’il a été hospitalisé à Jeddah, en Arabie Saoudite, pour une affection cardiaque grave le 23 novembre 2009. « J’espère qu’il y aura bientôt d’énormes progrès qui me permettront de rentrer chez moi », a-t-il dit ce matin. Mais depuis le début de cette hospitalisation, aucune image de lui n’a été diffusée, laissant libre cours aux rumeurs concernant sa mort. « Les spéculations sont fausses, le président est vivant et va mieux », avait déclaré son porte-parole Segun Adeniyi, lundi, pour y couper court.

L’absence du président est problématique

Les déclarations du président à la BBC interviennent le jour où, pour la première fois, les deux chambres de l’Assemblée nationale ont débattu à Abuja, capitale administrative du pays, de la crise institutionnelle occasionnée par son absence depuis plus de 50 jours. Selon la constitution, le chef de l’Etat ne peut être déclaré inapte à remplir ses fonctions qu’avec la majorité des deux-tiers des ministres. Si tel était le cas, ces dernières seraient officiellement transmises au Vice président Goodluck Jonathan. Une opération qui, selon les observateurs les plus critiques, permettrait d’accélérer les réformes constitutionnelles et électorales.

Le Parlement a voté pour l’envoi d’une délégation à Jeddah chargée d’aller au chevet de Yar’Adua faire un constat de l’état de sa santé et lui soumettre des sujets d’importance nationale. Pour le moment, il n’y a pas de date fixée pour le départ de la délégation.

Les semaines précédentes, les appels se sont multipliés pour qu’il démissionne ou délègue ses pouvoirs à l’actuel vice-président jusqu’à la fin de son mandat au printemps 2011.

Marche de protestation

Parallèlement aux travaux des parlementaires, une manifestation a eu lieu à Abuja dans la journée devant l’Assemblée nationale pour protester contre la vacance du pouvoir. Des centaines de manifestants ont marché au pas dans les rues de la capitale pour réclamer que le président délègue son pouvoir aux parlementaires.

« Assez, c’est assez !», tel est le message diffusé par la manifestation de mardi à Abuja, entre autre dirigée par le prix Nobel de littérature, Wole Soyinka. Les organisateurs veulent davantage d’informations sur l’état de santé du président nigérian et s’inquiètent de l’absence prolongée de Umaru Yar’Adua. « Nous sommes mécontents du vide créé par l’absence du président », a déclaré Yinka Odumakin, porte parole de l’ONG « Save Nigeria Group » (SNG). Outre Wole Soyinka, très impliqué dans l’action politique, le chef rebelle biafrais durant la guerre civile de 1967-1970, Chukwuemeka Odumegwu-Ojukwu, a participé à un meeting baptisé « assez, c’est assez », à l’issue de la marche.

Par ailleurs, les gouverneurs de 36 fédérations nigérianes se sont aussi réunis hier soir pour discuter notamment de l’absence prolongée du président. Et le barreau nigérian a déposé une plainte contre le président, l’accusant de violer la constitution en se maintenant ainsi au pouvoir.

Depuis son élection en 2007, le chef d’Etat nigérian a été hospitalisé à quatre reprises.

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