Le film-documentaire « Algérie, mon amour » mal digéré par les Algériens 


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Les algériens marchent à Paris, le 30 juin 2019, lors du 21ème dimanche
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Le film-documentaire « Algérie, mon amour », de Mustapha Kessous, diffusé hier soir, mardi 26 mai, dans le programme télévisé de France 5, « Le monde en Face », semble difficile à digérer pour nombre d’internautes algériens. Ils reprochent au documentaire de ne pas refléter fidèlement le Hirak ni les revendications que le mouvement porte depuis plus d’un an.

Sur les réseaux sociaux, pendant la diffusion du documentaire « Algérie mon amour » de Mustapha Kessous, des publications enflamment la Toile. Les réalisateurs du documentaire en question y sont accusés de véhiculer une image erronée du mouvement du Hirak ainsi que d’avoir commis des erreurs sur des faits historiques liés à la décennie noire.

Pour exemple, l’ex-président Abdelaziz Bouteflika, aurait, selon le commentateur, « mis fin au terrorisme islamiste, pendant la guerre civile ». Un internaute tente de corriger l’information qui d’après lui nie catégoriquement les faits : « Bouteflika n’a jamais mi fin au terrorisme islamiste. On parle d’un terrorisme d’État ».

Aussitôt, le hashtag « #Ce_n_est_pas_mon_Hirak #France_5 » est lancé afin de répondre à ce que les internautes qualifient de « tentative de désinformation ». Ils souhaitent montrer que le documentaire de France 5, ne représente pas le mouvement populaire initié le 22 février 2019.

« Frustration sexuelle »

Il est à souligner qu’une bonne partie du documentaire est axée sur des questions d’ordre sexuel, tout en montrant des jeunes qui, pour la majorité d’entre eux ne semblent pas dépasser la vingtaine, voulant revendiquer leur droit à la sexualité, sous la couverture du Hirak.

« Se baser uniquement sur des jeunes pour nous parler de leur frustration sexuelle et de jeunes filles de 20 ans qui boivent de la bière mélangé à du Fanta et vont en boîte de nuit, ça ne représente pas le Hirak », lit-on sur le compte Facebook d’un internaute algérien.

« Faire un reportage, maquillé de belles images sur l’Algérie, sans pour autant donner la parole aux acteurs du Hirak et ni aux acteurs politiques de la guerre civile des années 90, à l’image Ali Belhadj, Ali Yahia Abdenour, Mouloud Hamrouch, Taleb El-Ibrahimi, Salima Ghezali, Sid Ahmed Ghouzali, Said Saidi… etc, ce n’est pas un reportage », conclue-t-il.

Pour le journaliste algérien Hassen Moali, le documentaire, « faussement intitulé Algérie, mon amour », de France 5 , « est un travail d’amateur » et «  pitoyable ». Il souligne que  « nos jeunes sont beaucoup plus brillants, plus nobles et plus engagés que vos petits plans à la con servis avec un zeste d’alcool et un soupçon de sexe. Décidément les clichés des médias français sur l’Algérie ont la peau dure ».

« Les téléspectateurs français ont dû peut être apprécié ce « libertinage » télévisuel, mais les vrais militants de notre formidable sursaut populaire ont sûrement compris qu’il s’agit d’un montage grossier qui a recyclé une certaine façon bien française d’appréhender l’Algérie ; c’est à dire un pays où l’on a brimé le sexe et la consommation d’alcool », poursuit-il.

Et d’ajouter : « Au diable ce genre de raccourcis qui desservent plus qu’ils ne servent le cheminement de la jeunesse algérienne vers la démocratie et la modernité ! Je suis terriblement dégouté d’avoir perdu une heure et demi de ma vie a regarder cet Objet journalistique non identifié. Faisons donc comme si cette connerie appelée pompeusement « reportage » n’a jamais existé. Rideau ! ».

Par ailleurs, la chanteuse et la célèbre de pop Amazigh (Berbère), Amel Zen, a vite réagi sur sa page Facebook, suite à la diffusion du documentaire : « nous devons écrire notre histoire, nous-mêmes ! Pour que nul ne nous la raconte. Les revendication du Hirak sont claires : faire dégager un système pour construire un état de droit et des libertés, ce qui inclurait bien évidemment le respect des libertés individuelles et une justice sociale ».

« France 5 : un regard étroit ou un choix de regard ! », s’exclame-t-elle.

Pour Abderahim Moussaouer, universitaire-linguiste et militant du Hirak, explique que « la frustration qui a motivé notre Révolution est plutôt celle des libertés fondamentales, la démocratie, le droit, la dignité, la justice sociale, l’égalité et une Algérie où tout le monde s’accepte et se reconnaît, sans exclusion ».

La vague d’indignation face à ce film documentaire, qualifié tour à tour de « mascarade », « de viol », de « profanation », de « perversion », « de manipulation », etc., est d’une ampleur telle qu’il est impossible d’en dessiner les contours.

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