Le bonheur à Essaouira


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Le premier charme d’Essaouira, ancienne Mogador, l’antique cité portuaire où le roi de Maurétanie, Juba II, avait installé il y a plus de 2000 ans une fabrique de pourpre, vendue aux sénateurs romains, ce sont ses pêcheurs : animation permanente du petit havre protégé de l’océan par les îles qui ferment la baie, et par les digues anciennes sur lesquelles viennent se casser les vagues de l’Atlantique.

Tôt le matin, c’est le retour de la pêche, et la vente à la criée, sous le marché couvert, à quelques dizaines de mètres des quais colorés, derrière la porte monumentale qui perce l’enceinte portugaise. Là les poissons s’échangent très vite, partant vers les sardineries, ou vers les entrepôts frigorifiques qui alimentent ensuite le marché intérieur, de Marrakech à Rabat. Un marché plus modeste se poursuit encore toute la matinée, où s’approvisionnent les habitants d’Essaouira, d’un poisson frais tout juste sorti des filets.

Le long de la grève, quantité de petits restaurants en plein air permettent de déguster au passage quelques poissons grillés, sardines surtout, mais aussi, selon les arrivages, poulpes ou maquereaux. Les cris des mouettes et des goélands, éternels prédateurs des restes de poissons qu’on leur lance, accompagnent ces agapes aussi simples que savoureuses, dont l’odeur plane à l’entrée de la ville.

Certes, Essaouira n’est pas un grand centre halieutique, et les quelques chalutiers qui mouillent à l’abri le long de ses quais n’en font guère que le 6ème port sardinier du Maroc : c’est peut-être aussi cette modestie qui l’a préservé des dérives industrielles et des pollutions modernes… Car ce qui fut le port de Tombouctou (à quelques dizaines de journées de marche ou de méharée tout de même, par les pistes menant vers Zagora, puis de Zagora à Essaouira) a perdu sa splendeur passée…

Et c’est peut-être ce qui en a fait un séjour prisé des artistes : peintres, cinéastes, poètes, voilà les recrues surprenantes qui sont venues enrichir la population locale : c’est sur la plate-forme surélevée de l’ancienne muraille-batterie, qui protège la médina, qu’Orson Welles a tourné son fameux Othello, le  » maure de Venise « . C’est aussi sur cette plate-forme qui fait face à l’océan qu’Houssein Miloudi, peintre marocain contemporain, a installé son atelier…

Etonnante Essaouira, où selon les couleurs du ciel, on se sent soudain, en écoutant les mouettes qui fuient vers l’Occident, alternativement en Grèce ou en Ecosse… Il se dégage de cette ville simple aux rues droites et lumineuses une forme de sérénité légère.

Et si l’on ajoute à ce charme rare l’agrément d’une des plus belles plages de sable fin du Maroc, protégée des assauts de l’océan par les récifs et les îles purpurines, où les véliplanchistes jouissent de conditions idéales pour pratiquer leur sport, on en déduit qu’il faut se hâter de profiter de ce lieu préservé, avant que les touristes tentent de s’en emparer. Il faut vivre à Essaouira.

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