La justice française libère deux génocidaires présumés


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Deux Rwandais inculpés par le Tribunal pénal international pour le Rwanda ont été remis en liberté sur décision de la cour d’appel de Paris pour vice de procédure. Kigali s’inquiète de ce jugement. Placés en résidence surveillée, les deux hommes pourraient néanmoins être poursuivis en France.

Ils sont sous le coup d’un mandat d’arrêt international émis à leur encontre par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Pourtant, la justice française a décidé de les relâcher. Deux Rwandais soupçonnés de participation au génocide de 1994 contre les Tutsis et les Hutus modérés ont été remis en liberté, ce mercredi, sur décision de la cour d’appel de Paris. Accusés de génocide et de crimes contre l’humanité, l’abbé Wenceslas Munyeshyaka, 49 ans, et l’ancien préfet Laurent Bucyibaruta, 62 ans, avaient été arrêtés en France le 20 juillet et incarcérés à la prison de la Santé.

Le prêtre, « un défenseur des libertés »

La chambre d’instruction, présidée par Edith Boizette, a estimé que leur maintien en détention n’était pas compatible avec le respect de la loi sur la présomption d’innocence. Le vice de procédure serait dû au délai de réaction trop long du TPIR qui devait indiquer s’il souhaitait que les accusés soient jugés en France ou à Arusha, en Tanzanie, où siège le TPIR. Les deux hommes sont en effet sous le coup d’une procédure pour « génocide et crimes contre l’humanité » instruite par la juge parisienne Fabienne Pous. Si le TPIR donne son accord, ce sera le premier procès en France pour des criminels impliqués dans le génocide rwandais. Les deux hommes ont été placés en résidence surveillée.

Laurent Bucyibaruta est inculpé par le TPIR « pour incitation à commettre un génocide, extermination, meurtre et viol ». Le père Munyeshyaka, condamné en 2007 par contumace à la réclusion à perpétuité par un tribunal rwandais, est accusé de meurtres, de viols et d’encouragement au viol. Le prêtre a estimé qu’il « faisait l’objet d’accusations graves sans fondement ». « A l’issue de l’instruction, le peuple français se rendra compte qu’il n’a pas accueilli un génocidaire mais un défenseur des libertés », a-t-il revendiqué.

Une décision « politique »

Le représentant rwandais auprès du TPIR, Aloys Mutabingwa, a regretté une décision de justice « politique ». Quant au ministre rwandais de la Justice, Tharcisse Karugarama : « si la décision est motivée juridiquement, je vais la respecter. Si elle n’est pas motivée selon la loi, je ferai une réaction », a-t-il indiqué mercredi soir.

Les arrestations avaient quelque peu réchauffé les relations entre Kigali, qui réclamait l’extradition des prisonniers, et Paris. Le contact était auparavant rompu depuis l’émission en novembre 2006 de neuf mandats d’arrêts par le juge Bruguière contre de hauts responsables rwandais. Ces proches du président Kagamé sont soupçonnés d’être impliqués dans l’assassinat de l’ex-président Habyarimana, point de départ du génocide.

La décision de la cour d’appel intervient alors que Paris et Kigali viennent d’évoquer une possible visite du ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, au Rwanda.

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