La honte et le sang des autres : Lettre ouverte au Garde des Sceaux du Cameroun


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Victor Fotso et sa fille Christelle
Christelle Nadia Fotso et Victor Fotso

C’est une lettre ouverte adressée au Garde des Sceaux du Cameroun, Laurent Esso, par Christelle Nadia Fotso. Ce courrier accompagne un courrier envoyé, lundi, au Garde des Sceaux des États-Unis. Démarche qui confirme l’américanisation des Affaires Fotso d’autant qu’elle concerne la création d’une succursale du Groupe Fotso au Texas.

Monsieur le Garde des Sceaux, Monsieur Esso,

J’ai le privilège d’être née sous une bonne étoile qui fait de moi non seulement une déséquilibrée, caractérielle et irrévérencieuse mais une femme debout déterminée. Lorsqu’on se bat pour un grand homme en étant sa fille tout en ayant le nom de sa mère, on comprend ce que requiert l’excellence et accepte la difficulté même parfois la cruauté de la vie mais pas l’injustice. Je vous écris, Monsieur Esso pour vous parler de droit et demander justice.

Les Camerounais, tout comme ceux qui ne me lisent pas, croiront que je découvre les problèmes des sociétés camerounaises et de son institution judiciaire. Je les connais moins bien que d’autres mais ne peux me résoudre à accepter pour Fotso Victor la pire chose qui soit :  la vulgarisation de son histoire et la spoliation de l’œuvre de sa vie par des imposteurs en désacralisant le statut de légende et de Patriarche.

Monsieur le Garde des Sceaux, j’ai écrit ce 2 octobre, une lettre à Merrick Garland votre confrère américain sur un sujet qui vous concerne. Mon but n’était pas d’internationaliser des affaires camerounaises mais d’acter le fait qu’elles sont déjà américaines vu la création par Yves Michel Fotso, Laure Njitap et d’autres enfants Fotso d’une société au Texas en lui donnant le nom d’une société Fotso au Cameroun et en France. Il n’est pas possible de nier qu’aux États-Unis et ailleurs, des enfants Fotso aient le droit de créer une société. Ce qui interpelle est le contexte tout comme des questions de droit camerounais.

La première question est le statut d’Yves Michel Fotso qui, sauf erreur de ma part, reste condamné à perpétuité par la justice camerounaise et n’a été évacué hors du Cameroun que pour des raisons sanitaires. Comment est-il possible qu’un repris de justice puisse exercer, d’une manière aussi ostentatoire, des droits civiques qu’il n’a plus ? Pourquoi lui est-il permis de jouer un rôle dominant et centrale dans une succession d’où ses actions, sa condamnation et surtout les dernières volontés de son père devraient l’avoir banni ? Cette question n’est pas une attaque personnelle mais bien un sujet pour la justice camerounaise. C’est bien l’État du Cameroun qui a condamné Yves Michel Fotso pour des fautes gravissimes ; des clarifications et des explications sont, donc, indispensables.

La deuxième question porte sur l’implication de deux magistrates camerounaises, Rachel et Eliane Fotso dans l’affaire F.O.V Texas. Est-ce permis par les règles et la déontologie de la magistrature camerounaise ? Je me permettrais d’ajouter qu’au moins dans le cas de Rachel Fotso, sa nationalité française pose question. Afin qu’il ne me soit pas reproché de faire de la délation, je dirais que celle-ci est secondaire mais pris en compte avec ses actes met la lumière sur le régime d’exception qu’il semble y avoir pour les affaires Fotso où l’arbitraire, le non-sens et l’illégal règnent.

Enfin, il y a également la participation de la présente maire de Bandjoun Nicky Love Talla dans l’américanisation de la succession Fotso Victor. Monsieur le Garde des Sceaux, j’avoue ignorer quelles sont les règles en matière de moralisation de la vie publique camerounaise.  Ce qui me choque est que celle choisie par le Parti Présidentiel pour remplacer Fotso Victor dans le Koung khi ait posé comme une de ses premières actions en tant que maire, la captation de l’héritage de son père au détriment de ses sœurs et de ses frères.

Toutes ces questions, Monsieur Esso, vous ne pouvez les ignorer. Je confesse ne plus savoir quoi faire, dire ou écrire afin de cesser d’être le sujet tout comme ce handicap qui permet à trop tout en occultant la loi, les normes, la décence et le testament de Fotso Victor. Cela fait plus de 2 ans que j’attends une réponse à ma demande d’exhumation de la dépouille de mon père et, surtout plus de 3 ans, des explications sur ma mise à l’écart de la succession en instrumentalisant mon handicap, mes problèmes de mobilité et en créant des présomptions nauséabondes à l’échelle nationale et internationale qui font du bruit parce qu’elles ont une odeur.

Comment peut-on au Cameroun de Paul Biya enterrer un Patriarche comme un gueux et s’assoir sur ses dernières volontés en créant un précédent qui ne peut qu’avoir des conséquences désastreuses pour tout le pays ?

Monsieur Esso, je ne m’en remettrais ni à votre conscience ni en votre sens de l’État. Je dirais simplement que vous, comme d’autres, êtes au crépuscule de votre vie et que vous savez que seul réaffirmer ce qui est interdit dans nos sociétés concernant nos anciens pourra vous éviter une fin telle que celle de Fotso Victor et la destruction de votre patrimoine en usant de méthodes vindicatives au mieux et indignes au pire. Non, je ne vous compare pas à mon père mais essaye de vous convaincre qu’une des plus lourdes responsabilités pour nous, vos cadets, sera de bien vous enterrer, Monsieur le Garde des Sceaux, en empêchant vos ennemis de régler leurs comptes avec vous à travers vos héritiers parce que vous ne pourrez plus vous défendre et leur répondre. A ce moment, le pire, comme maintenant, ne sera évité que par ceux qui montreront que vous appartenez à l’Histoire, qu’il n’y a pas de justice absolue et que, oui, les lignes rouges interdisent d’uriner sur la tombe d’un Patriarche en privant d’avenir ses choisis.

Monsieur Esso, je vous ai écrit pour vous parler de droit et de justice. Je ne peux que conclure en évoquant le destin et ce choix qui est le vôtre d’être non pas du bon côté mais de refuser d’être du mauvais en fermant les yeux devant les chiens qui se sont jetés sur l’honneur de Fotso Victor.

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