La Côte d’Ivoire protège son sucre


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Gouvernement et producteurs de sucre ivoiriens se sont mis d’accord. Depuis vendredi dernier, les importations de sucre sont suspendues, et ce pour une durée de deux ans. Laps de temps pendant lequel la Côte d’Ivoire pense pouvoir subvenir elle-même à ses besoins. Le principal pays producteur de sucre en Afrique de l’Ouest veut ainsi lutter contre les importations frauduleuses.

La Côte d’Ivoire impose l’autosuffisance pour le sucre. Et ceci pendant deux ans. Vendredi, le gouvernement ivoirien s’est engagé à stopper net les importations de sucre en Côte d’Ivoire. Objectif : « juguler la fraude liée aux importations du sucre en transit sur le territoire ivoirien », explique un communiqué du Conseil des ministres. Vingt milliards de F CFA. C’est le déficit qu’accuse la filière sucrière ivoirienne depuis le début de la crise en septembre 2002. Victimes d’une fraude acharnée, encouragée par la période de trouble, les deux grands groupes producteurs, Sucaf et Sucrivoire, ont fait pression sur les pouvoirs publics pour qu’ils acceptent de fermer les frontières au sucre étranger.

Le sucre frauduleusement injecté sur le marché ivoirien est issue des mouvements de transit du Ghana, Burkina Faso, Mali dans le pays. Frauduleux, donc moins cher. « Nous avons pris cette décision vendredi en concertation avec des représentants de trois ministères présents à notre conseil d’administration », explique un représentant de Sucrivoire, qui a tenu à garder l’anonymat. Il s’agit des ministères de l’Economie et des Finances, de l’Agriculture, de l’Industrie et du Développement du secteur privé. Le ministère du Commerce, quant à lui, s’est montré plus réticent. « Son principal argument résidait sûrement au niveau des accords internationaux conclus avec l’Organisation Mondiale du Commerce, notamment ses engagements pris pour ne pas instaurer de règlement contraignant envers nos concurrents », confie timidement notre interlocuteur de Sucrivoire. Cette décision a été accueillie comme une victoire pour les producteurs. Ceux-ci se sentaient jusque-là bernés par un accord signé il y a sept ans avec l’Etat ivoirien, accord qui n’a jamais été respecté.

Accord non respecté

Juillet 1997. La seule entreprise de production, Sodesucre, est privatisée. Naissent alors parallèlement Sucaf et Sucrivoire. Le 16 juillet, le collectif des producteurs s’engage à protéger le sucre ivoirien, avec le soutien de l’Etat. Accord pris par les deux parties pour une période de huit ans, de 1997 à 2005. « La protection du sucre produit sur le territoire national était assurée par un décret qui fixait les taxes d’importation du sucre étranger en fonction du niveau mondial », explique le représentant de Sucrivoire. Il n’a jamais vraiment été respecté, avoue-t-il, le sucre importé frauduleusement affluant toujours aussi massivement. Pire, à la veille du Carême 2002, le gouvernement fait importer 67 mille tonnes de sucre, contre la volonté des producteurs qui estiment l’opération inutile. Le pouvoir ivoirien avance le prétexte d’une éventuelle pénurie. « Cette décision a été prise 3 jours avant le début des hostilités. A cette date, nous savions que nous pouvions assurer largement l’autosuffisance. A moins d’être voyant, personne n’imaginait la crise qui surviendrait quelques jours plus tard », confie, à demi-mot, l’employé de Sucrivoire. Cette importation superflue fera perdre aux producteurs près de 12 milliards de F CFA.

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