La contrefaçon gangrène la culture africaine


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Plusieurs tissus
Plusieurs tissus

Grâce à l’introduction d’un système d’identification holographique, le Bureau sénégalais des droits d’auteur a quadruplé, en sept mois, le montant global des recettes 2001 en droits de reproduction. Une guerre contre la contrefaçon où les pirates n’hésitent pas à user d’intimidation pour protéger leurs activités.

800 000 disques et K7 vendus depuis le début de l’année contre 200 000 sur toute l’année dernière. Le combat du Bureau sénégalais des droits d’auteurs (BSDA) porte ses fruits. L’introduction d’un système holographique pour identifier les productions licites des contrefaçons a généré, depuis janvier, plus de 100 millions de F Cfa en droits de reproduction. Contre seulement 45 millions sur toute l’année 2001. Face à cette lutte -soutenue par la police, les gendarmes et les services douaniers- les pirates n’hésitent pas, eux aussi, à radicaliser le ton.

« C’est un combat sans merci contre la fraude et la contrefaçon. Il est impossible de remonter les filières mais les sommes en jeu se chiffrent en plusieurs centaines de milliers de F Cfa », s’indigne Abibatou Diabé Siby, directrice du BSDA. « Alors que de grands criminels s’enrichissent sur leur dos, il faut rendre leur dignité aux artistes et assainir le marché. Ce qui est valable pour le Sénégal est aussi valable pour l’Afrique : la contrefaçon gangrène la culture africaine. Un créateur qui à faim ne peut pas créer, un producteur ne pourra pas rentabiliser ses investissements puisque dès lors que le produit est sur le marché, les pirates se jettent dessus comme des vautours ».

Menaces de mort

Face aux 287 millions de F Cfa encaissés en 2001 par les droits d’exécution au public (endroits publics sonorisés, télévision et radio), les droits de reproduction ne représentaient, l’année dernière, que 13,5 % des recettes totales du BSDA. Un schéma aujourd’hui totalement remis en question. « Nous allons devoir nous réorganiser pour ne pas accorder toute notre attention sur les droits de reproduction ».

Au coeur de la lutte : un hologramme, apposé depuis peu sur chaque production, permet de séparer le bon grain de l’ivraie. Au grand dam de pirates qui voient leurs activités dangereusement mises en péril. « Les pirates tentent de nous intimider mais ça ne marchera pas. Cela a même été jusqu’aux menaces de mort. Nous n’avons aucune crainte à avoir car nous sommes déterminés et nous avons la légitimité pour nous », martèle Abibatou Diabé Siby. Les contrôles effectués par les membres du bureau se font toujours en présence d’un huissier et des forces de l’ordre.

Amender la loi

Les saisies s’accompagnent toujours de poursuites judiciaires. « Mais il faut absolument que la loi sur les droits d’auteurs, datant de 1973, soit revisitée », plaide la directrice du BSDA. « Elle n’est pas assez dissuasive. Les amendes prévues ne sont que de 50 000 F Cfa. Tandis que pour les peines de prison, la loi stipule qu’il faut que l’auteur se soit habituellement rendu coupable de contrefaçons. Habituellement est une notion assez subjective qui nécessite une réelle clarification. Il faudrait qu’il soit passible de prison dès la première fois. »

Le BSDA entend rallier les législateurs à sa cause. Nul doute que les arguments financiers avancés par les premiers résultats de la lutte contre la fraude – de part l’augmentation des ressources fiscales qu’ils augurent – rencontreront un écho favorable au sein des hautes administrations de l’Etat.

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