L’Alliance des États du Sahel multiplie les tentatives d’influence dans le Golfe de Guinée


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Drapeau de l'AES
Drapeau de l'AES

La tentative de putsch au Bénin révèle une stratégie d’ingérence croissante de l’Alliance des États du Sahel, déterminée à étendre son influence vers le Golfe de Guinée pour sécuriser un accès à la mer. Soutenue par Moscou, cette pression stratégique recompose les équilibres régionaux et inquiète les États côtiers.

La tentative de coup d’État qui a secoué le Bénin le 7 décembre dernier révèle une stratégie régionale inquiétante : l’Alliance des États du Sahel (AES) intensifie ses opérations d’ingérence dans les pays côtiers d’Afrique de l’Ouest. Cette offensive vise un objectif géostratégique majeur pour ces nations enclavées : sécuriser un accès à l’océan Atlantique.​

Guerre informationnelle et manipulation en ligne

Durant les heures critiques du putsch manqué à Cotonou, la page Facebook « Notre Bénin » a diffusé massivement de fausses informations. L’analyse des métadonnées de cette page révèle qu’elle est administrée depuis le Burkina Faso, pointant vers le BIR-C, une unité de communication stratégique créée avec l’assistance russe après la prise de pouvoir d’Ibrahim Traoré en 2022. Un communiqué controversé annonçant l’accueil du colonel Pascal Tirgri à Ouagadougou sous protection de l’AES a depuis été retiré des plateformes sociales, mais témoigne d’une coordination transnationale des putschistes. ​

La course aux ports maritimes

L’enclavement représente un handicap économique considérable pour les trois membres de l’AES – Mali, Burkina Faso et Niger. La Banque mondiale estime que les coûts commerciaux des pays sans accès maritime dépassent le double de ceux des nations côtières. Le port de Cotonou traite actuellement près de la moitié de son trafic de transit vers ces territoires sahéliens, en faisant une cible stratégique prioritaire. ​

Parallèlement, le Togo et la Guinée font également l’objet de pressions diplomatiques. Fin novembre, le port de Lomé a été sollicité pour faciliter l’acheminement de convois d’uranium nigérien, sujet probablement évoqué lors de la visite du président Faure Gnassingbé à Moscou. Le 9 décembre, Bamako a obtenu l’engagement du Premier ministre guinéen Amadou Oury Bah d’accompagner « l’accession à la mer » du Mali. ​

Moscou, partenaire stratégique de l’AES

Cette expansion d’influence apparaît indissociable du soutien russe aux régimes militaires du Sahel. L’accord sur l’uranium nigérien illustre cette dépendance : Moscou a acquis 1 000 tonnes à un tarif inférieur de 13% aux prix français de 2023, alors que les cours mondiaux progressaient de 30% depuis mars dernier. Pour acheminer ces ressources stratégiques, la Russie nécessite des corridors maritimes stables, expliquant son intérêt direct dans le contrôle des infrastructures portuaires ouest-africaines. ​

Les analystes soulignent que seul un appui extérieur majeur permet une telle coordination entre les putschistes de la région. Cette ingérence menace désormais l’équilibre sécuritaire de tout le Golfe de Guinée, où la souveraineté des États côtiers se trouve progressivement contestée par des acteurs externes.

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