Management : l’Algérie à l’heure indienne


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Un graphique en courbes (illustration)
Un graphique en courbes (illustration)

Il a fallu à peine cinq mois aux responsables indiens, actionnaires majoritaires de la société algéro-indienne Ispat, née le 18 octobre 2001, pour mettre à la porte 932 travailleurs algériens, cadres, agents de maîtrise et d’exécution.

Confrontés à des humiliations quotidiennes, les travailleurs avaient le choix entre prendre une retraite anticipée, proportionnelle, ou, pour les cadres, accepter n’importe quel poste de travail, y compris agent de maîtrise. La grande manoeuvre de licenciement en douceur avait été entamée bien avant que le contrat de partenariat n’ait été signé. Durant leur période d’adaptation, avant leur prise en charge de la totalité du patrimoine Alfasid, la plus importante filiale du groupe Sider, les Indiens, actionnaires à 70 % d’Ispat Annaba, avaient annoncé la couleur : « Notre seul et unique interlocuteur est le chef du gouvernement algérien et nul autre », ne cessait de claironner son premier responsable à chaque fois qu’un problème était posé par la partie algérienne.

Licenciements à la chaîne

Avec la signature du contrat, ont commencé les ébauches de rectifications de frontières, préludes à des luttes d’influence beaucoup plus importantes. Les cadres dirigeants algériens, qui avaient tenté de ruer dans les brancards, tirant argument de leurs 30 % de part d’actions, étaient écartés. Un remue-ménage accompagné d’un magistral coup de balai. Le sort des deux grands patrons algériens, Alfasid et Ferphos, est scellé quelques jours à peine après la prise de fonction de l’Indien Marar à la tête d’Ispat Annaba. Vite rejoints, contraints et forcés, par plusieurs de leurs proches collaborateurs. Implicitement, il leur était reproché de s’être opposés à la privatisation d’Alfasid.

Connu pour la virulence de ses positions face aux gestionnaires algériens d’Alfasid, initialement opposé à toute idée de privatisation de « l’outil de production des travailleurs », le syndicat présidé par Aïssa Menadi est rentré dans les rangs. Jusqu’à devenir un allié inconditionnel de toutes les actions entreprises par les gestionnaires indiens. Contactée par la presse, la direction générale d’Ispat s’est confinée dans le silence. C’est son partenaire social qui a précisé que le nombre de 1 100 travailleurs dont fait état la rumeur était faux. Selon les syndicalistes, il s’agit de 932 départs volontaires à la retraite et de 83 recrutements entre contractuels pré-emploi et mutations, effectués durant le mois de mai.

Management aux forceps

Maintes fois saisie par les responsables du groupe Sider sur la mainmise totale des Indiens, qui refusent toute idée de réunion du conseil d’administration, la puissance publique a imposé le silence. Dans le contrat de partenariat, il est mentionné la propriété des Indiens des stocks de matières premières, pièces de rechange, équipements et matériels, y compris ceux commandés, payés et non encore réceptionnés par Sider à la date de la signature du contrat.

D’autres avantages avaient été consentis à Ispat par l’Etat algérien : couverture de l’Apsi étalée sur 10 années, effacement de toutes les dettes Alfasid, réduction de 30 % sur les redevances globales de l’électricité, du gaz et de l’eau et, cerise sur le gâteau, engagement de la cession des mines de l’Ouenza. Le tout, en contrepartie indienne de 20 millions de dollars, la prise en charge de la masse salariale et la préservation des 6000 postes de travail existants pour une durée de 4 ans. Conditions bien en deçà de la valeur du patrimoine de la défunte Alfasid que les experts du bureau d’études français Roux avaient estimé à 980 millions de dollars.

Mis au contact des cadres dirigeants de Sider lors de sa visite à Annaba, M. Abdelaziz Bouteflika leur avait clairement ordonné : « Même au dinar symbolique, il faut céder l’entreprise avec pour seule contrepartie la préservation des postes de travail. Il n’y a plus d’entreprise stratégique en Algérie ». Quatre ministres, dont Medelci, s’étaient fermement opposés en Conseil des ministres à cette opération de bradage. Une des dispositions du contrat précise que le partenaire indien pouvait procéder au recrutement de 20 cadres étrangers seulement. Au lendemain de la prise en main du complexe, ils seront 30 Indiens et 50 Russes à former le noyau dur de la direction Ispat.

Par notre partenaire El Watan

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