L’Afrique et la Convention de La Haye


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Drapeau des Pays-Bas
Drapeau des Pays-Bas

Des juristes de tous les pays du monde sont réunis à La Haye, Pays-Bas, pour établir les conditions dans lesquelles les lois des différentes nations s’appliqueront sur Internet. Quelles taxes, lors d’un achat en ligne, celles du pays de l’acheteur ou du vendeur ? Quel droit pour la liberté d’expression ?

Les juristes africains ne sont pas les plus nombreux représentés à cette Convention internationale de La Haye, qui a débuté le 6 juin 2001, pour une quinzaine de jours. Et pourtant : en établissant des règles internationales pour organiser la correspondance entre les droits des différentes nations, ce sont les règles impératives du commerce de demain qui vont y être déterminées. Qui s’appliqueront aussi, volens nolens, à l’Afrique !

Or l’enjeu n’est pas mince : on sait que les Etats-Unis et les pays occidentaux, plus généralement, sont le siège de presque toutes les grandes sociétés qui interviennent dans le commerce électronique. Si la règle choisie consiste à appliquer aux actes de vente la législation du pays du vendeur, en particulier les taxes indirectes qui y sont fixées, alors c’est une véritable rente de situation que les pays occidentaux s’adjugeront, au détriment du monde en développement.

Liberté d’expression totale ?

Si, au contraire, c’est le régime de taxation du pays de l’acheteur qui s’applique, alors ces revenus lui reviendront, faisant retomber dans les caisses des Etats du Sud quelques revenus liés au commerce électronique. Au risque de rendre, peut-être, plus complexe, la fixation des prix des biens et services proposés, et donc de freiner – disent les grands groupes occidentaux – l’expansion universelle attendue du développement commercial d’Internet.

Les choses sont encore plus tendues entre les différents lobby dès lors que l’on évoque les limitations à la liberté d’expression. La presse américaine, forte du Premier Amendement à la Constitution américaine, postule et défend une liberté d’expression totale sur Internet comme sur tous les supports papier. Mais le droit européen y a posé des limites : ainsi de la loi française, par exemple, qui proscrit toute incitation à la haine raciale et toute apologie du nazisme et de l’antisémitisme…

Diversité humaine

C’est cette loi qui a amené le portail Yahoo à faire disparaître de ses sites commerciaux, dans le monde entier, quelques objets de propagande nazie qui y étaient proposés aux acheteurs du Net… Mais l’application d’une limitation à la liberté du commerce liée à une loi restreignant la liberté d’expression fait polémique aux Etats-Unis, où certains dénoncent une limitation apportée à la souveraineté américaine ! Au risque de voir les pays islamistes exiger de la même manière des restrictions idéologiques plus importantes à l’expression universelle. Et qu’ils soient légalement suivis. Emotion.

Comment rendre légalement cohérente la diversité des cultures, des traditions, des héritages juridiques, qui fonde aussi une diversité humaine ? C’est la gageure à laquelle se confrontent les élites juridiques réunies à La Haye. Si l’on peut regretter que la voix de l’Afrique n’y soit pas aussi présente que l’on souhaiterait, on se consolera en se disant que les experts ont peu de chance d’accorder tout de suite leurs violons. Il sera temps de se joindre au concert, un peu plus tard, quand les prémisses des réflexions engagées seront plus solides, et auront plus de chances d’aboutir.

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