Internet au secours de la lutte contre la tuberculose


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Otmar Kloiber

L’Association médicale mondiale (AMM) lance samedi un projet pilote pour former en ligne les médecins à la lutte contre la tuberculose. L’organisation internationale française espère que ce matériel éducatif, rédigé par l’association médicale sud-africaine, permettra d’éviter la propagation de cette maladie, dont la forme multi-résistante est extrêmement difficile et coûteuse à soigner. Précisions d’Otmar Kloiber, secrétaire général de l’AMM.

La tuberculose touche 8,8 millions de personnes dans le monde en 2005 et tue 4 400 malades par jour, selon l’Organisation mondiale de la santé. Plus de sept millions des cas sont concentrés en Asie et en Afrique, où elle représente un véritable défi. La diagnostiquer, la soigner et l’empêcher de se propager est coûteux et on ne peut plus ardu lorsque l’on manque de bras et de personnel soignant formé. Sans parler de l’épineux problème de la forme multi-résistante de la maladie, où le tuberculeux ne réagit plus à un ou plusieurs antiobitiques utilisés pour son traitement. C’est pour aguerrir les médecins sur ces questions que l’Association médicale mondiale lance le 24 mars, à l’occasion de la Journée mondiale de la tuberculose, un projet pilote de formation sur Internet. L’Association médicale sud-africaine a écrit le matériel éducatif, son homologue norvégienne s’est chargée de la mise en ligne et la branche allemande a coordonné le tout. Avant de devenir mondiale, l’initiative concernera trois groupes de 20 à 25 médecins exerçant en Afrique du Sud, aux Philippines et en Estonie. Otmar Kloiber, secrétaire général de l’AMM, qui est basée en France, revient sur comment est née cette idée d’enseignement via Internet et nous précise ses avantages.

Otmar KloiberAfrik.com : Comment avez-vous mis au point cette formation sur Internet ?

Otmar Kloiber :
L’Organisation mondiale de la santé a émis pour la première fois, fin 2005, des directives pour indiquer comment soigner la tuberculose. Nous nous en sommes servi comme base pour créer notre formation en ligne. Mais comme les directives étaient très complexes, nous avons décidé de les simplifier. Nous expliquons aux médecins comment la tuberculose commence, comment éviter les infections, comment empêcher la maladie de se propager, ce qu’il faut faire pour traiter le patient au mieux et éviter les résistances… Ce matériel éducatif de grande qualité, qui a été rédigé en grande partie en Afrique du Sud par le Dr Karin Weyer, permet d’apprendre plus facilement.

Afrik.com : Quels sont les avantages de cette méthode Internet ?

Otmar Kloiber :
La tuberculose n’est pas un problème majeur dans des pays comme la France ou l’Allemagne. Mais dans des pays où la densité du personnel est très basse, les médecins sont débordés. Ils ont beaucoup de patients et n’ont pas le temps de prendre un mois pour se former. Alors cette solution leur permet d’apprendre à leur propre rythme.

Afrik.com : A quoi servira le certificat que délivre l’Association médicale norvégienne ?

Otmar Kloiber :
L’Association médicale norvégienne, qui nous a aidé à mettre la formation en ligne, peut délivrer un certificat aux médecins qui le souhaitent. Cela permet aux médecins des pays occidentaux de se conformer à l’obligation d’éducation médicale continue. Dans les zones touchées par la tuberculose, cela permet au médecin d’obtenir une qualification pour savoir comment s’occuper de cette maladie et diriger un programme de lutte contre la tuberculose dans le futur.

Afrik.com : Dans quelles langues sera disponible la formation ?

Otmar Kloiber :
La version anglaise est celle utilisée en Estonie, en Afrique du Sud et aux Philippines. Nous attendons que le projet pilote soit terminé pour avoir les retours de ces pays (savoir ce qui est bien, simplifier ce qui est compliqué…) avant de traduire, grâce aux fonds (du laboratoire, ndlr) Eli Lilly, en chinois, en russe et en espagnol. C’est seulement à ce moment-là que la formation sera mondiale.

Afrik.com : Il n’y aura pas de traduction en français ?

Otmar Kloiber :
Vous avez raison, des pays en Afrique sont francophones. Mais par manque de moyens, nous nous concentrons sur le russe et le chinois, que parlent beaucoup de gens que nous visons. Mais nous pensons pouvoir obtenir les fonds pour faire prochainement une traduction en français.

Afrik.com : Combien de temps va durer le projet pilote ?

Otmar Kloiber :
Nous avons tablé sur deux mois, mais cela nous semble extrêmement court. Nous pensons qu’il faut 120 heures d’apprentissage. Et sachant que les gens ne prendront pas quatre semaines pour s’y atteler, mais étudierons plutôt les soirs et les week-ends, il faudra compter plus de trois mois.

Afrik.com : Pensez-vous que cette formation en ligne sera efficace ? Que les gens adhéreront à cette forme d’apprentissage ?

Otmar Kloiber :
La tuberculose est un problème si grave et une telle catastrophe que chaque personne qui a une chance de la faire reculer, la saisira. Les gens savent qu’il faut prêter à ce thème une réelle attention et se pencher dessus professionnellement pour éviter un désastre. Il n’y a pas d’autre moyen.

Crédit photo d’Otmar Kloiber : Association médicale mondiale

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