Immigration : l’Europe dresse ses murs


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Brice Hortefeux, le ministre français de l’Immigration peut se réjouir. Après de âpres négociations, le pacte européen de l’immigration a été validé jeudi à Bruxelles par les ministres de la Justice et de l’intérieur européens. Perçu comme la pièce maîtresse de la présidence française de l’Union européenne, ce pacte qualifié par certains de « directive de la honte » durcit un peu plus les conditions d’accès des étrangers en Europe.

Brice Hortefeux, le ministre français de l’Immigration va pouvoir remplir ses quotas d’expulsion. Le pacte européen de l’immigration a été validé jeudi à Bruxelles par les ministres de la Justice et de l’Intérieur européens. Ce traité qualifié par certains de « directive de la honte » correspond en tous points à la politique française d’immigration.

La chasse aux « cerveaux » est ouverte

Le président français Nicolas Sarkozy peut donc se réjouir : il a réussi à convaincre ses collègues européens. Ce pacte privilégie une mesure chère au chef de l’Etat français, l’immigration de travail. Il encourage l’arrivée de main d’œuvre dite qualifiée. Les ministres présents à Bruxelles ont donné leur accord préalable au système de « carte bleue » européenne, inspirée de la « green card » américaine. Elle sera délivrée aux « cerveaux ». « Ce pacte, estime Sonia Lokku de la Cimade, association française qui milite pour les droits des étrangers, propose une vision très euro-centrée des migrations : la politique d’immigration « légale » qui se dessine, notamment la fameuse « carte bleue européenne » cherche essentiellement à rendre les pays européens attractifs pour les travailleurs hautement qualifiés. Cela ne correspond pas vraiment aux intérêts des pays de départ, notamment en Afrique.»

Un avis que partage Jean-Pierre Dubois, président de la Ligue française des droits de l’Homme. Il juge cette directive « carte bleue » inacceptable. « Je ne comprends pas pourquoi l’immigration devrait se faire que dans le seul intérêt du Nord, et au détriment des pays du Sud », explique-t-il. Sonia Lokku va plus loin. « Si l’immigration de travail semble intéresser l’Union européenne, l’immigration familiale, elle, est avant tout présentée comme étant à l’origine des difficultés d’intégration des migrants (…).Or les migrants ont un droit inaliénable à vivre en famille. Poser des conditions strictes au regroupement familial non seulement bafoue ce droit mais contribue à augmenter le nombre de sans-papiers puisque les membres de la famille essaieront de venir par d’autres moyens ».

Autres changements, autres coups durs. La régularisation des sans-papiers ne sera plus massive, si tenté qu’elle le fut un jour, mais se fera au cas par cas. Le visa biométrique sera obligatoire d’ici 2012 pour renforcer la lutte contre les clandestins et le contrôle aux frontières. L’Europe construit des murs autour d’elle par peur d’être « assiégée ». Un paradoxe quand on sait que l’Union européenne ne cesse de prôner le libéralisme économique et la mondialisation. « L’Europe a besoin économiquement, humainement et culturellement des étrangers », résume Jean-Pierre Dubois. Le président de La ligue des droits de l’Homme arrive à la même conclusion que Jacques Attali. En janvier dernier, l’ancien sherpa de François Mitterrand qui présidait la commission pour la libération de la croissance avait préconisé, dans son rapport, l’emploi de la main d’œuvre étrangère pour doper l’économie française. Mais l’Hexagone comme l’Europe n’en font qu’à leurs têtes.

L’Europe prône l’isolationnisme en matière d’immigration

Le pacte prévoit aussi une harmonisation du traitement des demandes d’asile au niveau européen. Un réfugié est soumis actuellement aux règles érigées par son pays d’accueil. Il est ainsi plus facile d’entrer en Grande-Bretagne qu’en Grèce. Avec le pacte européen, tous les pays seront logés en 2010 à la même enseigne. En langage consensuel, on appelle cela « l’harmonisation ».

L’UE a gravé dans le marbre, jeudi, le durcissement de sa politique d’immigration. Les 27 feignent d’ignorer qu’ils auront besoin de 40 millions d’immigrants au cours des quatre prochaines décennies. Le pacte correspond « à une politique malthusienne pétrie de réactions xénophobes dans une Europe vieillissante », conclut Jean-Pierre Dubois.

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