Ile Maurice : Devina Lobine, la femme qui lutte contre la maladie d’Alzheimer


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Devina Lobine
Devina Lobine

Chercheuse spécialisée en Neuropharmacologie, Docteure Devina Lobine est l’une des femmes engagées dans la lutte contre l’Alzheimer, cette maladie dégénérative qui engendre un déclin progressif des facultés cognitives et de la mémoire. Parcours professionnel, récompenses, défis, perspectives d’avenir…Coup de projecteur sur une scientifique dont les recherches sont centrées sur l’étude des propriétés des plantes médicinales.

En Afrique subsaharienne, Docteur Devina Lobine est parmi les références dans la lutte contre l’Alzheimer, une maladie dégénérative qui engendre un déclin progressif des facultés cognitives et de la mémoire. De nationalité mauricienne, elle est titulaire d’un BSc (Hons) en Biotechnologie agricole et d’un doctorat en produits naturels de l’Université de Maurice, en étroite collaboration avec l’Université de Durham, au Royaume-Uni et l’Université de Pretoria, en Afrique du Sud. Sa passion pour les plantes médicinales témoigne l’altruisme qu’elle a pu développer au fil des années. « J’étais plus intéressée par le domaine de l’art. Cependant, certaines expériences de vie m’ont guidé à devenir scientifique pour améliorer la vie des gens », explique la chercheuse spécialisée en Neuropharmacologie.

« Aucun traitement n’existe à ce jour »

À l’Ile Maurice et dans d’autres pays du continent africain, l’opinion n’accorde pas assez d’attention sur la maladie d’Alzheimer, pourtant elle représente plus de 60% de la démence chez les personnes de troisième âge, selon les estimations de Alzheimer’s Disease International. Pour relever ces défis, Devina Lobina étudie les propriétés des plantes médicinales pouvant freiner les effets de cette maladie. « Je recherche les plantes médicinales mauriciennes pour gérer la maladie d’Alzheimer. J’ai plusieurs années d’expérience pratique et appliquée dans divers domaines des sciences de la vie », déclare-t-elle à Afrik.com.

À travers ses recherches, Devina a pu découvrir que « les composés d’origine végétale ont des attributs neuroprotecteurs et une capacité à fournir une protection contre un large éventail de maladies neurodégénératives grâce à différents mécanismes d’action ». Cependant, cette conclusion est loin d’éteindre son inquiétude suite au rapport de Alzheimer’s Disease International, estimant qu’environ 46,8 millions de personnes vivaient avec la maladie d’Alzheimer, en 2015, et ce nombre devrait atteindre 131,5 millions d’ici 2050. « Les médicaments disponibles ne font que ralentir la progression de la maladie et ont malheureusement plusieurs effets secondaires », note la chercheuse qui s’arme de beaucoup d’engagements pour combattre une maladie qui détruit les hommes en silence.

« Aucun traitement n’existe, à ce jour, pour contrer les effets de cette maladie dégénérative. J’ai vite été fascinée par cet aspect des biosciences et je me suis dit que les plantes médicinales endémiques de Maurice et des Mascareignes pouvaient aider la recherche dans ce domaine », a-t-elle fait savoir.

Une femme au parcours exceptionnel

Après ses études au Royaume Unis, Devina décide de retourner en Afrique, la terre de ses ancêtres, avec comme objectif : « Travailler pour le bien-être de son continent ». C’est ainsi qu’en 2017, elle devient Youth Ambassador de la plateforme scientifique, Southern Africa Network for Biosciences (SANBio). En 2019, elle rejoint le Programme Africain de Science et de leadership. Deux ans plus tard, elle ajoute une corde à son arc d’ambitions, en devenant ambassadrice de Next Einstein Forum en Maurice. En décembre 2020, son engagement dans la lutte contre l’Alzheimer lui a valu le prestigieux Prix l’Oréal/UNESCO, pour ses travaux de recherche. Pendant la même période, elle a été élue comme l’une des scientifiques les plus prometteuses du continent par Universcience. Comme de nombreux scientifiques sur le continent, Devina doit, en partie, son ascension à la discipline. « Je suis dévouée à mon travail; cela nécessite une bonne gestion du temps, un travail régulier et une discipline rigoureuse pour s’améliorer à chaque étape », dit-elle.

Sous d’autres facettes, la chercheuse ne cache pas ses ambitions de participer à l’émergence de son pays. « Je voudrais assumer davantage de responsabilités et participer à la stratégie nationale de Maurice et aussi de promouvoir la science parmi les jeunes ».

« Il y a une solution à chaque problème »

Comme les roses poussent aux milieux des épines, les écueils n’épargnent pas les travaux menés par la chercheuse mauricienne. Le manque d’infrastructures et de financements pour mener à bien ses recherches scientifiques sont, entre autres, les embuches qui entravent l’élan de Devina, pourtant dévouée à la cause de son continent. « Le manque d’installations et de financement sont les principaux facteurs à l’origine d’initiatives inefficaces. De plus, les opportunités d’emploi pour les personnes qualifiées STEM sont limitées ». Toutefois, ces obstacles boostent sa détermination à changer la donne.

« La plupart des recherches menées dans le domaine des sciences biomédicales ont tendance à être enfermées dans des articles scientifiques, car elles ne parviennent pas à passer du stade in-vitro au stade in-vivo et clinique. Par conséquent, il est de la plus haute importance d’établir des installations et de renforcer la collaboration transfrontalière pour améliorer l’état des sciences en Afrique », note-t-elle.

Toujours en première ligne dans les périples sanitaires, pendant cette période marquée par la pandémie de Coronavirus, Dr Lobine travaille sur un projet intitulé « La phytothérapie traditionnelle africaine contre le Covid-19 ». Des recherches qui, selon elle, « permettront d’identifier des molécules à partir de plantes issues du continent africain pour inhiber les protéines présentes dans le SARS-CoV-2 ». En attendant la présentation des résultats de ces travaux, la chercheuse reste confiante. « Même si la route est longue et ardue, il y a une solution à chaque problème. Il y a toujours une lumière au bout du tunnel », dit-elle.

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