Guinée : une tentative pour rétablir l’équilibre délicat de la mangrove


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Drapeau de la Guinée
Drapeau de la Guinée

Près de Conakry, une équipe de recherche travaille à rendre sa fertilité à l’un de ces marais littoraux. La mangrove est l’un des atouts les plus sûrs, mais aussi les plus fragiles, des écosystèmes ouest-africains.

Une équipe de recherche franco-guinéenne a découvert une méthode simple, et apparemment  » peu onéreuse « , pour restaurer l’équilibre des mangroves humides de l’Afrique de l’Ouest. En construisant un polder artificiel, elle est parvenue à rétablir un échange efficace entre l’eau de mer et l’eau douce, améliorant ainsi la productivité des rizières.

Les mangroves, dont le nom est dérivé de manglier (ancien terme pour palétuvier), ont longtemps été définies comme une espèce d’arbre. Il s’agit de marais maritimes tropicaux, de paysages amphibies qui peuvent être des écosystèmes à dominante aquatique ou bien forestière. La Guinée en compte 56 000 hectares, soit 300 km de bandes côtières.

Les mangroves sont des zones très riches en poissons, en huîtres, en crustacés… Elles servent aussi à la culture du riz. En Gambie et au Sierra Leone, les mangroves assurent ainsi jusqu’à 80 % de la production rizicole. La Guinée a été, elle aussi, l’un des pays les plus ambitieux de la région pour ce qui est de la transformation des mangroves en rizières. Mais les investissements très coûteux réalisés depuis un demi-siècle sur des milliers d’hectares ont révélé, peu à peu, un effet pervers : la construction de digues isolant les mangroves de la mer – par crainte du sel – a conduit à appauvrir les terres. Les rendements se sont essoufflés. Désormais, les mangroves ne concentrent plus que 16 % de la production de riz du pays.

Quatre mètres de pluie en six mois

Les chercheurs du Centre national des sciences halieutiques de Boussoura (CNSHB), assistés des équipes françaises de l’Institut de recherche pour le développement (IRD, ex-Orstom), ont découvert que, contrairement à la croyance populaire, la suppression des échanges entre l’eau salée et l’eau douce conduit à une acidification des sols, et donc à leur appauvrissement. Si l’excès de sel brûle les sols, l’eau de mer est cependant indispensable, à la saison sèche, pour apporter le calcium et le magnésium capables de déplacer le fer et l’aluminium à l’origine de l’acidification.

Ils ont mis en place, à Yangoha près de Conakry, un polder expérimental couvrant dix hectares de mangrove. La digue a été supprimée. L’eau de mer entre, à la saison sèche, par des vannes munies d’un clapet anti-retour. A la saison humide, la pluviométrie importante (4 mètres en six mois) lessive les sols de leur salinité et offre un terrain très fertile pour le riz. Trois ans après le début de l’essai, la productivité est de cinq fois celle des rizières environnantes.

Dans certains cas, la recherche agronomique vise désormais à valoriser les forêts humides que sont devenues de nombreuses mangroves, sans plus tenter d’y réintroduire la circulation permanente de l’eau. C’est le cas, notamment, dans le nord de la Guinée. Dans cette zone, les sédiments ayant colmaté l’embouchure des estuaires depuis longtemps, le problème est désormais de restaurer la fertilité de terres devenues stériles et qui ne servent plus, après brûlis, que de pâturage à la saison sèche. On recourt à des plantations massives de mélaleuca, une essence d’arbre qui a fait ses preuves en Asie du sud-est, dans le delta du fleuve Mékong.

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