Guinée équatoriale : Claude Guéant et la « Françafrique d’Obiang »


Lecture 4 min.
sky_aircraft.jpg

Claude Guéant, au secours des entreprises françaises. La semaine dernière, l’ex-ministre de l’Intérieur français était en voyage d’affaires en Guinée équatoriale. Qu’a-t-il donc pu bien y faire ?

Après sa défaite symbolique aux dernières élections législatives à Boulogne, face au dissident UMP Thierry Solère, Claude Guéant est déjà à pied d’œuvre. A peine constitué, son cabinet d’avocats s’est pour la première fois envolé vers l’Afrique. Plus précisément en Guinée équatoriale, selon une annonce faite à L’Express la semaine dernière. Un pays où les relations avec l’hexagone se sont dégradées par l’affaire des « Bien mal acquis ». Peu importe, l’ancien ministre de l’Intérieur a gardé de bons contacts sur place. Ainsi, Claude Guéant s’y est rendu jeudi dernier pour aider, dit-il, une entreprise française en difficulté. Ce dernier est toutefois resté bien silencieux sur l’identité de l’entreprise bénéficiant de ses services…

Mais dans une photo parue sur le site Internet de l’association France-Guinée équatoriale, on aperçoit Claude Guéant à la tête d’une délégation composée notamment de son gendre Jean-Claude Charki, un banquier d’affaire, et de Serge Bithoul, PDG de GECI International, reçus par le président guinéen Obiang. Essaient-ils de vendre le Skylander, un avion dit « révolutionnaire » dont la construction est pilotée par Bithoul, en Guinée équatoriale ? L’association rappelle la passion du président Obiang pour les avions, il n’est donc « pas difficile de deviner autour de quoi a pu tourner l’entretien ». Une information confirmée ce mardi par le Républicain Lorrain

sky_aircraft.jpg

Le Skylander est un avion civil biturbopropulsé. Les constructions menées par la société GECI International, à travers sa filiale GECI Aviation, ont démarré en 2001. Après un premier vol avorté en mai 2005, plusieurs reports, modifications et déménagements de site, la sortie du premier prototype n’était toujours pas réalisée en octobre 2012. Le pôle GECI Aviation est depuis 2008 implanté sur l’ancienne base aérienne de Chambley-Bussières, avec le soutien de la région Lorraine.

Un avion « involable » et invendable

Le Skylander n’a pour l’heure toujours pas trouvé acheteur. La « Françafrique d’Obiang » pourrait donc arriver à la rescousse de Serge Bithoul, par la voie (et la voix) de Claude Guéant. Cette visite d’affaires dans la sulfureuse Guinée équatoriale mitige certains ténors de la droite française, selon Le Républicain Lorrain, à l’instar de Gérard Longuet qui fustige la décision de Bithoul : « C’est très maladroit. [Le président] Obiang sent le soufre ; jamais Bitboul n’aurait dû aller là-bas. En plus, s’il échoue [à récupérer de l’argent], ce sera encore pire. Quand on déjeune avec le Diable, on prend de longues fourchettes ».

Le PDG de Sky Aircraft n’y voit, au contraire, aucun problème : « Le président Obiang n’est pas son fils, que je sache ! Le président, qui est francophone, n’a pas de problème avec la France. Des grandes sociétés du monde entier participent à de fructueux courants d’échanges avec la Guinée, qui est en pleine expansion ». La Guinée équatoriale est en effet en pleine expansion. Le pays est le troisième producteur de brut en Afrique, mais a l’une des populations les plus pauvres au monde. Nadine Morano, qui affirme entretenir des « contacts réguliers » sur le dossier Skylander, ne voit, elle aussi, aucun inconvénient à ce que Guéant et Bithoul fassent affaire avec le très controversé et opulent président Obiang.

L’entreprise qui a mobilisé plus de 130 millions de dollars pour la construction du biturbo n’a eu aucun partenaire dès le début du projet. Elle se retrouve aujourd’hui dos au mur. Il manquerait entre 150 et 180 millions de dollars d’ici à 2014. Toutes les solutions semblent désormais bonnes à prendre pour lancer un Skylander qui risque la chute libre avant même le décollage.

Suivez Afrik.com sur Google News Newsletter