Guinée Bissau : sauver les enfants, un combat quotidien


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L'attente avant la consultation

L’Unicef fête, le 11 décembre, l’anniversaire des 60 ans de sa création. Plus d’un demi siècle d’actions en faveur de l’enfance malheureuse. En Guinée Bissau, l’Unicef tente de réduire la mortalité infantile en mettant notamment en place la vaccination de routine et le suivi mensuel de l’enfant. Un challenge dans un pays largement rural et analphabète. Reportage, à Bissau, dans un centre de santé.

Aïssatou, 20 ans, est une mère modèle. En ce matin de novembre, elle a emmené pour la deuxième fois son fils, Idrissa, 2 mois et demi, au Centro de referência materno infantil de Bissau, la capitale bissau-guinéenne. Elle affirme avec sérieux ne pas consulter de médecin traditionnel, faire dormir son bébé sous la moustiquaire qu’on lui a fourni quand elle était enceinte. Et précise qu’elle ira au planning familial car elle ne veut que deux enfants. Aïssatou est éduquée (elle étudie l’informatique) et a un mari qui répond à ses besoins. Toutes n’ont pas cette chance.

« Nous recevons beaucoup d’enfants mal nourris », regrette Guillermina Mendes, la responsable du centre. « C’est souvent une question de méconnaissance de la part des mères qui n’associent pas bien les aliments. Nous donnons des conseils pour bien utiliser les produits naturels du pays et nourrir correctement les enfants à la maison. » Le centre reçoit un minimum de 20 femmes, 30 enfants et 20 femmes enceintes par jour. « Nous avons des problèmes, comme les coupures de courant récurrentes. Nous avons aussi des difficultés de financement. Nous avons dû arrêter notre programme qui concernait 200 enfants mal nourris car nous n’avons plus de nourriture à leur donner. » D’un autre côté, la grande réussite du centre est d’arriver à attirer les femmes pour la vaccination et le suivi mensuel de l’enfant, qui font partie de l’Accelerated Child Survival and Development (ACSD) piloté par l’Unicef (Fonds des Nations unies pour l’enfance) en collaboration avec le gouvernement. Une sorte de « package » minimum (vaccination de routine, supplémentation en vitamine A, distribution de moustiquaires imprégnées) pour réduire la mortalité des enfants de 0 à 5 ans.

Education sanitaire

Au Centro de referência materno infantil, les femmes arrivent très tôt pour la consultation puériculture des enfants. Les quelques bancs disposés à l’entrée sont vite remplis et certaines mères patientent à l’extérieur, donnant le sein ou berçant leurs bébés. Inscrites dès leur arrivée, elles sont ensuite appelées dans la salle de consultation. On y pèse les enfants et on y repère ceux qui doivent être vaccinés. Pour celles qui ont oublié ou perdu le carnet de vaccination, ou encore pour les femmes analphabètes, très nombreuses, une astuce du personnel de santé : « Pour savoir si la vaccination est complète, on demande à la femme où l’enfant a été piqué. Sur le bras, c’est le BCG, sur l’épaule, c’est la rougeole et sur la cuisse, le DT polio. Il y a aussi les gouttes pour la polio et la vitamine A », explique une infirmière.

Pendant ce temps, une de ses collègues fait de l’éducation sanitaire, debout, devant l’assemblée des femmes. Elle rappelle les vaccinations nécessaires, montre la courbe de croissance, donne de précieuses informations aux mamans. Ce genre d’échanges est vital dans un pays où 124 enfants sur mille meurent avant leur premier anniversaire et 203 sur mille ne dépassent pas 5 ans. Mais les messages concernant la survie de l’enfant, diffusés notamment par les équipes de l’Unicef sont plus ou moins bien reçus dans ce pays largement rural et analphabète (66%). Le lien entre le niveau d’éducation et les soins apportés à l’enfant est criant. Pour diffuser plus largement ses recommandations, l’Unicef s’appuie sur les radios communautaires du pays, qui ont une très forte audience. « En écoutant la radio, on a compris certaines choses. Par exemple, si un enfant a le palu, avant que la maladie ait atteint trois jours, tu dois courir au centre de santé. Si tu restes avec l’enfant une semaine, c’est de ta faute », dit un responsable religieux de la petite localité de Contoubam, dans l’Est du pays. Avec l’espoir, à la clé, de former d’autres mères modèles comme Aïssatou.

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