
Une ressortissante marocaine figure parmi six personnes interpellées à Accra pour commerce illégal d’or. Cette opération spectaculaire illustre la nouvelle offensive du Ghana contre les réseaux de contrebande qui lui font perdre plus d’un milliard de dollars par an.
Nina Elfseky ne s’attendait probablement pas à être arrêtée en plein centre d’Accra, dans un complexe commercial près du prestigieux Marina Mall. Pourtant, cette Marocaine de 35 ans a été interpellée le 7 octobre dernier par la brigade spéciale du Ghana Gold Board (GoldBod), aux côtés d’un Américain et de quatre Ghanéens. Leur crime présumé ? Avoir tenté d’acheter et d’analyser 2,1 kilogrammes d’or, d’une valeur de 2,2 millions de cedis ghanéens (environ 140 000 dollars), sans la licence obligatoire.
L’opération, menée après plusieurs semaines de surveillance et de collecte de renseignements, a permis de découvrir du matériel de raffinage d’or en possession de Smart Philander, le suspect américain. Un élément qui confirme, selon les autorités, l’intention du groupe de raffiner illégalement le précieux métal sur le territoire ghanéen.
Une nouvelle loi pour reprendre le contrôle de l’or
Cette arrestation s’inscrit dans le cadre de l’application stricte du Ghana Gold Board Act 2025, une législation adoptée en mars dernier. Depuis le 1er mai 2025, le Ghana a interdit aux étrangers et aux particuliers de commercer sur le marché local de l’or. Désormais, seul le GoldBod, organisme d’État, est habilité à acheter, vendre et exporter l’or produit par le secteur minier artisanal et à petite échelle.
Cette réforme radicale vise à mettre fin à une hémorragie financière massive. En 2022, pas moins de 60 tonnes d’or ont été passées en contrebande hors du pays, représentant une perte estimée à 1,2 milliard de dollars pour l’économie ghanéenne. Un manque à gagner considérable pour ce pays qui est le premier exportateur d’or d’Afrique, avec 11,6 milliards de dollars d’exportations officielles en 2024.
Les six suspects, dont Nina Elfseky et Smart Philander qui formeraient un couple selon les enquêteurs, ont été inculpés devant un tribunal d’Accra. Ils encourent de lourdes peines pour complot en vue de commercer de l’or sans licence, commerce et analyse illégaux d’or, et tentative de raffinage illégal. Ces infractions tombent sous le coup de la loi pénale ghanéenne qui prévoit des sanctions sévères pouvant aller jusqu’à 20 ans de prison.
Des moyens technologiques pour traquer les trafiquants
Pour faire respecter cette nouvelle réglementation, le Ghana ne lésine pas sur les moyens. Le GoldBod dispose désormais de pouvoirs étendus incluant l’utilisation de drones et d’intelligence artificielle pour surveiller les activités minières et détecter les mouvements suspects d’or. La brigade spécialisée peut mener des inspections sans préavis, imposer des amendes substantielles et recommander des peines d’emprisonnement.
« Aucun individu ou entité, ghanéen ou étranger, n’est autorisé à acheter, analyser ou raffiner de l’or au Ghana sans une licence valide du Ghana Gold Board. Toute activité de ce type constitue une infraction criminelle et sera sanctionnée avec la pleine rigueur de la loi« , a averti l’organisme dans un communiqué.
Les enquêtes se poursuivent, et le Ghana Gold Board a promis de communiquer d’autres informations au fur et à mesure de l’avancement du dossier. Cette arrestation pourrait bien n’être que le début d’une vague de poursuites contre les réseaux de commerce illégal d’or qui opèrent depuis des décennies dans le pays.