Ghana : pourquoi Accra accepte d’accueillir des expulsés ouest-africains des États-Unis ?


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dramani mahama

Le Ghana a signé un accord inédit avec les États-Unis pour accueillir sur son sol des migrants expulsés originaires d’Afrique de l’Ouest. Un premier groupe de 14 personnes a déjà transité par Accra, avant d’être réacheminé vers leurs pays d’origine. Présentée par le président John Mahama comme un geste de solidarité régionale fondé sur la libre circulation ouest-africaine, cette décision suscite toutefois des critiques.

Le Ghana a officialisé, le 10 septembre 2025, un accord inédit avec Washington. Accra se dit désormais prêt à recevoir des ressortissants d’Afrique de l’Ouest expulsés des États-Unis. Un premier groupe de 14 personnes a déjà transité par la capitale ghanéenne. Cette décision, annoncée par le président John Dramani Mahama, suscite à la fois des interrogations et des critiques dans la région.

Un accord conditionné par la libre circulation ouest-africaine

Répondant aux questions de la presse à Accra, John Mahama a expliqué que les États-Unis avaient approché son gouvernement pour accueillir des migrants expulsés. Mais le Ghana a tenu à poser une condition : seuls les ressortissants ouest-africains peuvent être concernés.

Le président a justifié ce choix par la libre circulation instaurée dans la région : « Tous nos camarades ouest-africains n’ont pas besoin de visas pour venir au Ghana. Donc, s’ils nous envoient des collègues ouest-africains, nous sommes d’accord. »

Un premier groupe déjà arrivé à Accra

Selon les précisions de la présidence, 14 personnes ont été expulsées dans le cadre de ce nouvel accord. Parmi elles, plusieurs Nigérians ont choisi de rentrer directement dans leur pays d’origine, tandis qu’un ressortissant gambien a été pris en charge par son ambassade pour être réacheminé vers Banjul.

Cette première opération illustre le rôle de plateforme que pourrait jouer le Ghana, chargé d’organiser le transit des expulsés vers leurs pays respectifs. Depuis plusieurs mois, l’administration Trump multiplie les accords de réadmission avec des pays africains. Le Soudan du Sud, l’Eswatini, le Rwanda ou encore l’Ouganda ont déjà accepté d’accueillir des migrants expulsés, souvent sans lien direct avec ces territoires.

Ces accords suscitent de vives critiques. Plusieurs ONG et institutions, comme le Conseil de l’Europe, dénoncent des « politiques d’externalisation » qui exposeraient les migrants à des traitements inhumains, à des expulsions collectives ou à des détentions arbitraires.

Des relations tendues entre Accra et Washington

L’annonce de cet accord intervient dans un climat diplomatique fragile. Le Ghana fait face à une hausse des droits de douane américains sur ses exportations et à des restrictions de visas. John Mahama a d’ailleurs reconnu que les relations étaient « tendues », tout en appelant à renforcer les échanges commerciaux avec la Chine pour contrebalancer la pression américaine.

De son côté, le Nigeria a déjà dénoncé, en juin, les pressions exercées par Washington sur les pays africains pour accepter des ressortissants étrangers refusés par leurs propres nations. Si Accra justifie sa décision par un pragmatisme régional et une volonté de solidarité ouest-africaine, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer un risque d’instrumentalisation du Ghana par Washington.

Maceo Ouitona
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Maceo Ouitona est journaliste et chargé de communication, passionné des enjeux politiques, économiques et culturels en Afrique. Il propose sur Afrik des analyses pointues et des articles approfondis mêlant rigueur journalistique et expertise digitale
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