
Fraîchement élu président du Gabon, Brice Oligui Nguema tourne une nouvelle page en annonçant la création de son propre parti politique. Un choix stratégique à l’heure où le pays s’apprête à réduire drastiquement le nombre de formations autorisées, et qui soulève autant d’espoirs que de suspicions dans une démocratie en reconstruction.
Deux mois après son élection triomphale à la présidentielle du 12 avril, le président gabonais Brice Oligui Nguema change de cap politique. Dans une vidéo sobre mais symbolique, diffusée le 22 juin, le chef de l’État a annoncé le lancement imminent de sa propre formation politique. Un grand rassemblement est prévu le samedi 28 juin au Palais des sports de Libreville pour officialiser cette nouvelle structure, dont le nom reste pour l’instant secret. Une décision qui suscite autant d’intérêt que de critiques, dans un pays en pleine redéfinition de son paysage politique.
De l’indépendance à la structuration d’un pouvoir
Brice Oligui Nguema s’était présenté à la présidentielle comme un candidat indépendant, incarnant une rupture avec les anciennes pratiques du Parti démocratique gabonais (PDG), longtemps hégémonique. En lançant son parti, il cherche désormais à consolider son pouvoir à travers une organisation durable, capable de porter son projet politique. « Le suffrage universel que vous m’avez accordé exige désormais la mise en place d’un outil politique », a-t-il déclaré, entouré de proches collaborateurs, dans une mise en scène empreinte de simplicité.
L’annonce du président intervient à un moment stratégique : cinq jours après l’adoption par l’Assemblée nationale d’une loi visant à réduire drastiquement le nombre de partis politiques. Cette réforme, issue du dialogue national d’avril, entend passer de plus de 100 partis à un paysage réduit à trois ou quatre grandes formations. En prenant les devants, Oligui s’assure ainsi un rôle central dans cette nouvelle architecture politique, consolidant son pouvoir tout en s’adaptant à la législation à venir.
Une opposition méfiante face à un possible “PDG bis”
Dans les rangs de l’opposition, la création de ce parti soulève des inquiétudes. Jean-Rémy Yama, figure contestataire, estime que cette initiative n’était « pas nécessaire », soulignant que la Constitution actuelle donne déjà des pouvoirs étendus au président. Selon lui, ce nouveau parti pourrait n’être qu’un simple doublon du PDG, avec les mêmes mécanismes de contrôle et de verrouillage institutionnel. Une critique qui résonne fortement dans un pays marqué par des décennies de pouvoir autoritaire.
À travers cette démarche, Oligui Nguema cherche visiblement à inscrire son action dans la durée et à gagner en légitimité institutionnelle. Mais la question reste entière : ce parti parviendra-t-il à fédérer une base militante réelle, ou ne servira-t-il qu’à entériner un pouvoir déjà solidement installé ?