Détournement de devises : un réseau international de plus de 8 millions d’euros démantelé entre Casablanca, Paris et Bruxelles


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Les autorités marocaines, à savoir l’Administration des douanes et impôts indirects (ADII) et l’Office des changes, ont mis à jour un vaste système de transfert illégal de devises. Plus de 90 millions de dirhams (plus de 8 millions d’euros) auraient été évacués vers l’étranger sur environ trois ans.

Des sociétés d’importation marocaines, parfaitement en règle sur le plan fiscal et douanier, servaient de paravent à ce mécanisme. Ces entreprises, officiellement spécialisées dans l’importation de pièces automobiles, d’équipements médicaux ou de matériel industriel, dissimulaient en réalité un système de transferts illicites de fonds. À travers de fausses factures et des partenaires installés notamment en France et en Belgique, elles organisaient des transactions commerciales fictives pour faire sortir des capitaux du territoire national.

Le mode opératoire : une coordination entre trois villes

L’enquête a révélé l’existence d’un schéma bien rodé, reliant Casablanca à Paris et Bruxelles. En Europe, des intermédiaires fournissaient toute la documentation nécessaire à la dissimulation des opérations : factures, autorisations d’importation et bons de livraison. Ces sociétés européennes prétendaient entretenir des relations commerciales légitimes avec leurs homologues marocaines, alors qu’il ne s’agissait que de façades permettant de justifier des transferts d’argent frauduleux.

Pour éviter d’attirer l’attention, les montants transférés étaient divisés en petites sommes. Certaines des personnes impliquées, disposant d’une double nationalité, avaient créé leurs propres entreprises à l’étranger pour faciliter ces transactions illégales. D’autres, conscientes de la surveillance accrue des circuits financiers européens, limitaient leurs déplacements sur le continent et privilégiaient des destinations jugées plus sûres, comme les pays du Golfe ou certains États d’Afrique subsaharienne.

Un renforcement des contrôles de l’Office des changes

Les investigations ont permis de mettre en évidence des écarts considérables entre les montants déclarés au Maroc et les transactions réellement effectuées à l’étranger. Ce décalage a été l’un des principaux indices ayant conduit à la découverte du réseau. Cette affaire s’inscrit dans un contexte de vigilance renforcée des autorités marocaines face aux flux financiers internationaux. L’Office des changes a multiplié les opérations de vérification, notamment sur les factures surévaluées et les sociétés-écrans.

Ces pratiques, de plus en plus fréquentes dans certains secteurs d’import-export, fragilisent la compétitivité des entreprises honnêtes et portent atteinte à la transparence économique. Des précédents dossiers ont déjà révélé l’ampleur du phénomène, certains portant sur des montants dépassant les 700 millions de dirhams sur trois ans. La législation marocaine prévoit d’ailleurs des sanctions sévères : des amendes pouvant atteindre six fois la somme en infraction et des peines de prison allant jusqu’à cinq ans.

Un signal fort pour la transparence économique

Le démantèlement du réseau reliant Casablanca, Paris et Bruxelles témoigne d’une coopération exemplaire entre les autorités marocaines et leurs homologues européens, notamment via Europol. Cette collaboration a permis de retracer les flux financiers suspects et de confirmer l’existence de circuits parallèles de transfert de fonds. L’opération menée par l’ADII et l’Office des changes envoie un message au monde des affaires : les montages fictifs visant à transférer illégalement des capitaux vers l’étranger ne resteront pas impunis. Elle rappelle également la nécessité pour les entreprises marocaines d’adopter des pratiques conformes aux normes de transparence et de conformité financière.

Au-delà de l’aspect répressif, cette affaire met en exergue l’importance de renforcer les dispositifs de traçabilité des flux financiers et de moderniser les outils de contrôle. L’objectif est double : préserver les réserves de devises du pays et garantir un environnement économique équitable pour toutes les entreprises opérant légalement. En définitive, ce démantèlement illustre la détermination du Maroc à lutter contre les transferts illégaux de devises et à assainir ses circuits financiers. La coopération internationale, la vigilance administrative et la rigueur des contrôles demeurent les clés pour contrer ces pratiques qui menacent la stabilité économique nationale.

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Je suis passionné de l’actualité autour des pays d’Afrique du Nord ainsi que leurs relations avec des États de l’Union Européenne.
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