Délocalisation informatique : l’Afrique, nouvel Eden


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Une étude réalisée par AT Kearney montre que 7 pays africains figurent parmi les 50 meilleures destinations mondiales pour la délocalisation des services informatiques, également appelée offshoring. Égypte, Tunisie, Maroc et Sénégal sont parmi les destinations privilégiées par les entreprises occidentales.

Une population francophone ou anglophone bien formée et peu payée… Voilà de quoi intéresser les entreprises occidentales pour délocaliser leurs services informatiques. Une étude publiée en avril 2010 par un spécialiste américain des études stratégiques internationales, AT Kearney, montre qu’en 2009, 7 pays africains figurent parmi les 50 meilleures destinations mondiales pour cette pratique appelée offshoring. Le trio de tête avec l’ Inde, la Chine et la Malaisie, est asiatique, mais le continent gagne des places dans le classement. Ces délocalisations ont surtout pour but d’assurer des services comme la maintenance d’applications informatiques, les centres d’appel et la gestion.

Les données prises chaque année en compte par le cabinet AT Kearney pour établir ce classement sont la structure financière, l’environnement économique et la qualité de la main d’œuvre. Le cumul de ces critères donne un index qui correspond à l’attractivité des pays. L’Égypte, qui gagne 7 places, est 6ème en terme d’attractivité mondiale, et la Tunisie, qui en gagne 9, occupe cette année la 17ème place. Pour les pays anglophones, le Ghana et sa 15è place et l’Afrique du Sud qui occupe la 39è place attirent également les entreprises offshore.

Le Sénégal tire son épingle du jeu

Les nouveaux entrants, comme le Sénégal qui a fait un bond de 13 places, sont très offensifs. Le pays sub-saharien aux faibles coûts de personnel attire de plus en plus de centres d’appels. Malgré les deux heures de décalage horaire avec l’hexagone, ses téléopératrices calquent leurs journées sur celles des Français. Selon une étude de l’Apix, l’agence sénégalaise de promotion des investissements et grands travaux, le salaire moyen d’un téléacteur est de 308 euros par mois au Sénégal, contre 433 euros par mois en Tunisie et près de 458 euros au Maroc. Le Sénégal, avec un taux de chômage de 40% dispose également d’une main d’œuvre nettement plus abondante que ses concurrents maghrébins (15% en Tunisie et 20% au Maroc). Ces pays tirent leur épingle du jeu grâce au développement de l’offshoring en France qui privilégie les pays francophones et la proximité avec l’Europe.

Le Maroc, le Sénégal et la Tunisie seraient les pays les plus performants au monde en matière de centres d’appels. Du coup, les externalisations y sont nombreuses. En Tunisie, les centres d’appels comptent parmi les plus importants pôles d’emploi. Au Maroc, le nombre de télé-salariés a d’ailleurs été multiplié par 10 en 4 ans. Ainsi au « call center» de Dell à Casanearshore, la « cité de l’offshoring», 1 800 personnes travaillent dans des locaux flambant neufs. Depuis Casablanca, les employés marocains gèrent, pour le fabricant américain d’ordinateurs, la vente et le service après-vente de toute l’Europe du Sud.

Le marché de l’offshoring, qui représente 55 milliards de dollars selon le professeur Leslie Willcoks de la London School of Economics, représente une manne financière pour le continent. Mais, le revers de la médaille est sa contribution à l’accroissement des écarts de salaire entre pays du nord et pays du sud, qui mènent une course aux prix bas pour attirer les délocalisations.

Christelle Gérand
LIRE LA BIO
Journaliste française indépendante, Christelle Gérand s’est d’abord illustrée au début des années 2010 sur Afrik.com, où ses enquêtes sociopolitiques lui ont ouvert les portes du grand reportage Formée à l’Institut France-Presse après une double licence d’histoire et de philosophie, elle a affûté son regard critique lors de piges à New York puis à Paris avant de poser ses valises à Addis-Abeba en 2017 Depuis la capitale éthiopienne, elle sillonne la Corne de l’Afrique et au-delà pour livrer des formats longs qui mêlent récit, données et images, publiés dans des médias de référence comme Le Figaro, Mediapart, GEO, Le Monde diplomatique ou Causette Toujours attentive aux enjeux environnementaux, sanitaires et humanitaires, cette grand-reporter met sa plume et sa caméra au service d’une ambition : rendre visibles les mécanismes profonds — conflits, injustices ou dérèglements écologiques — qui façonnent l’Afrique contemporaine.
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