Crise financière : les économies africaines s’ajustent


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L’impact de la crise financière internationale actuelle commence à toucher sévèrement les économies africaines, les pays du continent commençant à redéfinir leurs stratégies économiques en serrant un peu plus la ceinture, en réduisant leurs budgets et leurs dépenses, afin de s’adapter à la réalité actuelle.

Des pays comme le Nigeria ont instauré des mesures d’austérité et commencé à harmoniser leurs projets de budget pour l’année 2009, tenant ainsi compte de la chute des recettes pétrolières, tandis que des Etats comme la Chine revoient à la baisse leurs importations de pétrole en provenance du Nigeria.

Nous avons assisté à une baisse accélérée des prix du pétrole brut au cours des six dernières semaines. Cette situation aura manifestement un profond effet sur le budget de l’année prochaine. Si nous ne faisons rien, le taux de croissance que nous ambitionnons d’atteindre sera beaucoup plus faible que prévu, a déclaré le ministre nigérian des Finances, Shamsudeen Usman, s’adressant à la chambre haute du parlement (Sénat) la semaine dernière, à Abuja, au cours d’une réunion d’information sur les probables conséquences de la crise financière.

Ainsi, les effets de la crise se font ressentir dans de nombreux pays, du Nigeria à l’Afrique du Sud en passant par l’Egypte, les trois principales économies du continent africain.

Baisse probable des transfert de fonds des immigrés

La monnaie sud-africaine, le rand, s’est dépréciée de 40%. Même si la monnaie nigériane n’a pas enregistré un tel recul, il n’en demeure pas moins que les recettes pétrolières du pays enregistrent une baisse.

Selon les experts, outre les institutions financières comme les banques et les marchés de capitaux, qui ressentent déjà les effets de la crise en Afrique et dans le monde, les personnes physiques sont également touchées, étant donné le risque de voir les transferts de fonds effectués par les immigrés connaître une baisse significative.

“Lorsqu’il y a une récession de cette nature et compte tenu du fait que nous évoluons dans une économie mondiale, il ne fait aucun doute que la raréfaction des liquidités a un impact sur les économies africaines. Cette situation aura aussi des répercussions sur les flux de l’aide mise à disposition par les organismes donateurs et de l’investissement étranger.

“Cependant, c’est au début de l’année prochaine que l’effet de toutes ces crises sera plus perceptible, lorsque les nouveaux budgets seront en phase de préparation”, a déclaré Adewale Oyebanji, un banquier basé à Lagos, dans un entretien accordé à la PANA.

Le sport est aussi une autre importante victime de cette situation de crise.

La semaine dernière, le gouvernement nigérian avait annoncé, par l’intermédiaire de son ministre de l’Information et des Communications, John Odey, et à la surprise de l’instance dirigeante du football mondial, la FIFA, sa décision de retirer sa proposition d’organiser la Coupe du Monde de football des moins de 17 ans, prévue l’année prochaine.

Selon le porte-parole du gouvernement, son pays n’est pas en mesure de supporter la facture de 37 milliards de nairas exigée par la FIFA.

Avant la crise financière actuelle, bon nombre de pays africains avaient été frappés par la crise alimentaire, la crise du carburant et celle des engrais.

Au Togo et au Liberia, l’inflation des prix des produits alimentaires est encore de 25% environ, a noté Mme Ngozi Okonjo-Iweala, un ancien ministre des Finances du Nigeria, aujourd’hui à la Banque mondiale.

Elle avait donné cette précision à l’occasion d’une intervention prononcée au cours d’une réunion de la Banque aux Etats-Unis, ajoutant qu’en Ethiopie, l’inflation des produits alimentaires a atteint le chiffre de 92%.

Baisse des bourses

La crise financière a été causée par la raréfaction des liquidités, qui résulte elle-même du recours, par les institutions financières, aux capitaux à court terme pour financer des projets à long terme, tels que les crédits immobiliers, ce qui a entraîné des incidents dans le remboursement des prêts et, en conséquence, eu pour résultat que les banques ont plus de difficultés à remplir leurs obligations vis-à-vis de leurs clients.

La crise a aggravé la situation des économies africaines plus vulnérables et ne disposant pas de capacités suffisantes pour absorber les chocs économiques.

Rien que pour ce mois, elle a également entraîné la perte de plus de 649 milliards de nairas au niveau de la Bourse des Valeurs du Nigeria (NSE), et ce, malgré l’introduction en bourse de nouvelles sociétés qui a dopé la capitalisation boursière des sociétés cotées l’année dernière.

Selon Bloomberg, la crise internationale a provoqué, au niveau de la Bourse, des pertes de plus de 10 billions de dollars US.

Depuis le début de la crise, il a été constaté la perte, par les groupes financiers, de quelque 148.000 emplois dans le monde.

L’effondrement de géants financiers comme Bear Sterns et Lehman Brothers ont contribué à cette aggravation du chômage.

Goldman Sachs a réduit sa main d’œuvre de 10% dans ses bureaux de New York et Londres.

De même, Citigroup et Merrill Lynch se sont séparés de 10% de leurs travailleurs. Il est à craindre que de nombreuses institutions financières africaines ne connaissent ce genre de problèmes si jamais les gouvernements n’intervenaient pas de manière concrète.

Plusieurs opérateurs financiers plaident pour une intervention salvatrice de l’Etat afin de sauver les meubles, comme cela a été fait aux Etats-Unis.

Cependant, il semble qu’une telle option n’ait pas été retenue par le gouvernement nigérian, si l’on se réfère aux dernières observations d’un haut responsable de la Banque centrale au cours de la réunion du Comité des Banquiers qui s’était tenue la semaine dernière.

« Nous ne pouvons venir ici pour commencer à discuter afin de savoir si nous allons intervenir financièrement ou pas. C’est à la Banque centrale du Nigeria qu’il revient de sauver les institutions en danger. C’est une prérogative de la Bourse des Valeurs et de la Commission des Changes et des Valeurs mobilières », avait en effet déclaré Ignatius Imala, Directeur du Contrôle des Opérations bancaires à la Banque centrale du Nigeria, à la fin de la réunion.

Pour sa part, le président de l’Association des Actionnaires nigérians, Muktar Muktar, estime que le gouvernement du Nigeria doit s’inspirer du gouvernement américain en prenant des mesures susceptibles d’aider les entreprises en difficulté et d’amortir les effets de la crise financière sur l’économie.

Il a également plaidé pour des efforts susceptibles de renforcer le marché financier et des capitaux, ajoutant que la Consolidation bancaire avait eu un effet positif en absorbant une partie de l’impact de la crise financière mondiale.

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