Coup d’Etat au Burkina Faso : les burkinabè de France entre espoir et sceptimisme


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Quatre jours après le coup d’Etat au Burkina Faso, les Burkinabè de France semblent très inquiets de la situation qui prévaut dans leur pays d’origine, particulièrement depuis que le général Diendéré a pris la tête du pays. Impossible pour eux de joindre leur famille restée au pays, du coup ils craignent le pire. Afrik.com est allé à la rencontre d’une famille burkinabè de Montreuil, en banlieue parisienne. Reportage.

A Montreuil,

« A quelques semaines de la Présidentielle au Burkina Faso, un coup d’Etat, c’est totalement ridicule », martèle la famille Sidibé devant son poste de télévision dans leur maison à Montreuil. Encore sous le choc suite au coup d’Etat mené par le général Diendéré dans leur pays, elle tente en vain de joindre ses proches restés à Ouagadougou. Les images de chaos circulent en continue à la télévision, la peur se lit sur leurs visages. Saly, la plus jeune, âgée de 15 ans, s’écrie : « Maman, maman, viens voir ce qui se passe là-bas, j’ai peur ». Elle ronchonne : « Je ne comprends pas pourquoi ils ont fait ça, c’est n’importe quoi ! ».

« Ce renversement de pouvoir, à la veille des élections, est stratégique »

Pour les Burkinabè de France, le coup d’Etat au Burkina Faso survenu le 16 septembre dernier ne surprend personne. « Malgré son calme, le général Diendéré a toujours été très actif pour le pays notamment dans son rôle très défini dans l’assassinat de Thomas Sankara. Cette grosse interrogation fait que cette prise de pouvoir brutale et soudaine ne nous étonne pas autant que ça le devrait », précise Mariam, un des enfants des Sidibé, étudiante en médecine, tout en dégustant son plat de foutou.

« La prise de pouvoir de Diendéré, une passerelle pour Eddie Komboigo ? »

Attentif aux derniers bouleversements dans son pays d’origine qu’il a quitté depuis plus de trente ans, Hamady Sidibé le père de famille estime, pour sa part, que « ce renversement de pouvoir, la veille des élections, est stratégique, surtout lorsqu’on sait que le compagnon de longue date du général Diendéré est Eddie Komboigo, chef du Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP), le parti de l’ancien président Blaise Compaoré. Sa candidature à la Présidentielle a été invalidée par le Conseil Constitutionnel. Même son de cloche pour Mariam qui se demande si « cette prise de pouvoir n’est pas une passerelle pour Eddie Komboigo pour se présenter à la Présidentielle ». « Les élections doivent se dérouler quitte à accepter la candidature d’Eddie Komboigo et faire preuve de faire play », rétorque Hamady Sidibé.

« Il fallait laisser les partisans de Blaise Compaoré se présenter à la Présidentielle, cela aurait évité ce coup d’Etat »

« Il fallait laisser les partisans de Blaise Compaoré se présenter à la Présidentielle, cela aurait évité ce coup d’Etat », estime de son côté Cheikh, jeune commercial, un autre des enfants des Sidibé. En août dernier, le Conseil Constitutionnel a décidé d’invalider les candidatures des pro-Compaoré, ce qui a provoqué une vague d’indignation au sein du parti politique de l’ex-Président. « Il aurait fallu les laisser se présenter car le peuple burkinabè aurait tranché », renchérit Cheikh. « Maintenant que va-t-il se passer? Les élections prévues le 11 octobre prochain vont-elles se dérouler ? », s’interroge Oumou Sidibé, la mère de famille.

La famille Sidibé ne cache pas ses craintes pour l’avenir de son pays. « Il y a déjà eu des morts, que va-t-il se passer maintenant ? », s’interroge Mariam. « Pour nous jeunes ressortissants Burkinabè qui comptions sur le pays pour la vie future, comment gérer l’incertitude ? », se demande Ckeikh.

« Je n’ai vraiment pas envie que le Burkina Faso vive la même chose que son voisin la Côte d’Ivoire »

« L’avenir du pays est entre les mains du général Diendéré, cela ne me rassure pas », martèle Mariam. Elle regrette de ne pas avoir participé à la manifestation vendredi dernier, à l’appel de plusieurs associations et collectifs, de centaines de Burkinabè à Paris, pour protester contre le coup d’Etat mené par le général Diendéré au Burkina Faso. « J’ai voulu aller à la manifestation, mais j’étais en cours », confie Mariam. Quelque jours après le coup d’Etat, une question est sur toutes les lèvres, et maintenant ? « Une guerre civile pour moi est juste inimaginable, un accord à l’amiable est de rigueur », ajoute Mariam. « Que nous cache cette affaire ? Tous ces complots politiques sont un réel ras-le-bol pour nous simple citoyen », se désole Cheikh, téléphone à la main, qui tente de rappeler son cousin dont il est sans nouvelles depuis mercredi soir. Mariam, elle, ne dissimule pas son scepticisme pour l’avenir du pays. « Sincèrement je ne sais pas quoi penser pour le futur, mise à part de la peur. Je suis pleine d’espoir et je n’ai vraiment pas envie que le Burkina Faso vive à peu près la même chose que son voisin la Côte d’Ivoire, mon second pays d’origine ».

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