Côte d’Ivoire : la violence, première épreuve du président Gbagbo


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Drapeau de la Côte d'Ivoire
Drapeau de la Côte d'Ivoire

Des affrontements très violents ont opposé des militants RDR et FPI à Abidjan aujourd’hui, sur fond de haines ethnico-religieuses qui témoignent de la crise profonde du pays.

En libérant des énergies longtemps comprimées par la junte, l’élection de Laurent Gbagbo à la présidence de la République de Côte d’Ivoire semble déclencher l’explosion des haines recuites qui minent peu à peu la cohésion nationale de la Côte d’Ivoire depuis la mort de Félix Houphouët-Boigny en 1993. Jeudi 26 octobre après-midi, au moment même où la Commission nationale électorale proclamait officiellement l’élection au premier tour de Gbagbo (avec 59,36 % des voix), les rues d’Abidjan et de plusieurs grandes villes étaient le théâtre d’affrontements très violents entre des partisans du FPI et des militants du RDR d’Alassane Ouattara.

Ces heurts ont fait sans doute plus de victimes que les manifestations anti-Gueï n’en avaient occasionnées en début de semaine. Ils ont, en plusieurs endroits, dégénéré en véritables chasses à l’homme contre les musulmans. Des mosquées ont été attaquées, quelques églises catholiques aussi.

Comme en Yougoslavie ?

Légitime ou pas, la demande insistante d’Alassane Ouattara d’une reprise complète du processus électoral a mis le feu aux poudres. La Côte d’Ivoire paraît payer aujourd’hui le prix d’années de discours politiques exaltant l’intolérance religieuse et ethnique. L’exploitation du concept de  » l’ivoirité  » a eu des conséquences désastreuses dans un pays où cohabitent une soixantaine d’ethnies, où vivent 40 % d’étrangers et où les trois cultes principaux* sont implantés chacun dans une région différente.

En parlant de  » scénario à la Yougoslave  » en début de semaine, Laurent Gbagbo pensait aux conditions du départ de Milosevic il y a trois semaines. Les derniers événements de la journée poussent à étendre cette référence. Comme feue la Yougoslavie, la Côte d’Ivoire est un Etat composite sur le plan ethnico-religieux. Et comme celle de Tito, la mort du  » Vieux  » a donné le signal d’un délitement dont on ignore encore jusqu’où il pourra aller.

L’élection de Laurent Gbagbo, si elle ramène le calme dans le pays, pourrait soulager la plaie xénophobe. Il est à noter, en particulier, que Gbagbo a démenti pendant sa campagne éprouver des sentiments anti-nordistes. De son côté, Alassane Ouattara ne s’est pas prévalu, jusqu’à présent, de son appartenance à la communauté musulmane pour revendiquer sa participation aux élections. On apprenait enfin, jeudi à 19 h (heure de Paris), qu’un appel au calme commun avait été lancé par le FPI et le RDR à la télévision.

* 40 % de musulmans, 30 % de chrétiens et 17 % d’animistes.

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