Clientélisme au Bénin : quand le peuple plébiscite des candidats à la Présidentielle


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Les « ambassadeurs » des communes d’Akpro-Missérété, de Bonou et de Sèmè-Podji ont plébiscité la candidature de Patrice Talon pour l’élection présidentielle de 2016, dimanche dernier. Cette pratique qui consiste à plébisciter une personnalité politique béninoise est en vogue dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.

A Porto-Novo,

« Les ambassadeurs de la commune d’Akpro-Missérété comme ceux des autres communes, par la présente occasion, suscitons sa [Patrice Talon] candidature pour la Présidentielle de 2016. Tout le peuple béninois implore votre candidature comme la pluie en mauvaise saison », a indiqué, dimanche dernier, le porte-parole des jeunes « ambassadeurs » de Firmin Gouvoèkè, commune située près de la capitale, Porto-Novo. Alors que la prochaine élection présidentielle de février 2016 occupe déjà le terrain médiatique et politique, des assemblées de jeunes ou d’autres personnalités ne cessent de plébisciter les candidatures de leur champion pour ce scrutin. Les « ambassadeurs » appellent à la candidature de Patrice Talon pour la Présidentielle, l’ancien financier du Président béninois Boni Yayi qui l’avait accusé de tentative d’empoisonnement.

Une « société civile » en quête de ressources

Le représentant de Patrice Talon, Evariste Tossou, présent pour l’occasion, n’a pas manqué de saluer cette initiative. « Je vous rassure que Patrice Talon va recevoir votre appel, nous allons lui transmettre fidèlement tout ce que vous avez dit. (…) Patrice Talon sera bel et bien là », a-t-il déclaré.

Sil est établi que les hommes politiques financent la plupart du temps préalablement ces manifestations, il arrive aussi que des regroupements prennent cette initiative pour attirer l’attention d’un candidat et ensuite être rémunérés par celui-ci. Plébisciter une candidature coûte cher au Bénin. Il est nécessaire de faire venir des journalistes pour publiciser ce type d’événement. Sous payés, parfois ne percevant même pas de salaire, ils sont beaucoup à se déplacer uniquement contre une rémunération (per diem). Solliciter la télévision coûte entre 200 000 et 300 000 Fcfa, voire plus, en fonction de la chaîne, rapporte un observateur local.

Les appels à candidature se multiplient

L’ancien avocat de Patrice Talon, Joseph Djogbénou, président de l’Alternative citoyenne et actuel président de la Commission des Lois de l’Assemblée nationale avait déjà retiré sa propre candidature pour appeler à celle de son ancien client, en août dernier.

Le 19 septembre dernier, c’était la maison des jeunes de Dangbo de la commune de l’Ouémé, à l’est du pays, qui faisaient appel, au cours d’un rassemblement, à la candidature de Sébastien Adjavon, le patron des patrons béninois. Le lendemain, le Mouvement Action Solution, rassemblé dans la capitale économique, Cotonou, demandait à son tour au chef d’entreprise de se présenter.

Cette mobilisation populaire ne profite pourtant pas à tous les candidats. Récemment, Marie Elise Gbèdo, ancienne ministre de la Justice, s’est plaint dans les médias béninois que sa candidature n’était plébiscitée par personne. Elle est pour l’instant la seule femme à vouloir se présenter à la Présidentielle.

Des candidatures alimentées par le clientélisme

La candidature du premier vice-président de l’Assemblée nationale, Eric Houndété, avait également été appelée lors d’une réunion de personnalités et de représentants religieux de la commune de Pobè, à la mi-août dernier. Le « Cercle des Amis et Soutiens du juge Houssou » avait plébiscité celle du juge Angelo Djidjoho Houssou, au début du mois d’août.

Patrice Talon et Sébastien Adjavon dont les appels au soutien se multiplient, ont déjà annoncé leur candidature pour l’élection présidentielle de février 2016. Ils sont plusieurs dizaines à vouloir briguer le poste suprême. Alors que l’actuel Président Boni Yayi est fortement décrié, le personnel politique semble maintenant attendre la fin de son mandat, tout en avançant masqué. Ils espèrent ainsi susciter un soutien populaire qui leur garantirait une place pour la course à la Présidentielle, dans un contexte de concurrence exacerbée. Les postes à responsabilité politique, moyen d’enrichissement personnel rapide depuis plusieurs années dans le pays en proie au clientélisme, sont une source de motivation de plus. Nul doute que pour beaucoup, le jeu en vaut la chandelle…

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