Chico : « Je suis fier de la musique que nous faisons depuis 40 ans »


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Chico
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Après 40 ans de carrière dorée, Chico, ancien fondateur du groupe Gipsy Kings et leader charismatique de Chico & The Gypsies, a accordé une interview exclusive à AFRIK.COM. Dans cet échange à cœur ouvert, l’auteur du tube planétaire Djobi Djoba est revenu sur son parcours musical, sa relation avec le continent africain, sa collaboration avec la diva marocaine Hasna, qu’il a invitée dans son nouvel album « Unidos », et ses perspectives d’avenir.

Entretien

 AFRIK.COM : De quels succès êtes-vous le plus fier ?

Chico : Je suis fier du succès en général, de la reconnaissance de la musique que nous faisons depuis 40 ans. C’est quand même extraordinaire d’être encore dans le paysage musical aujourd’hui. Et le succès qui me touche le plus, c’est tous ces albums réalisés durant Los Reyes, Gipsy Kings et Chico & The Gypsies, ces albums d’or qui sont une reconnaissance du public. Dans les concerts aussi, dans le monde entier. Et surtout d’avoir ramené un album d’or des Etats-Unis. On a été le premier groupe à ramener un album d’or des Etats Unis. C’est une fierté. On a souvent pensé que d’autres artistes avaient dû le faire avant nous, alors que non, pas du tout. Et ça a été d’autant plus fort que ce soit nous.

Pour moi, le moment de notre carrière dont nous sommes le plus fiers, c’est qu’un jour, j’ai eu la chance de jouer pour Charlie Chaplin, dans les années 70, à Lausanne, dans un restaurant. Et lui, qui a fait rire le monde entier, en nous écoutant, il a pleuré. Et pour moi, ça a été un signe que le destin était devant nous et le succès aussi. Si on est parvenu à toucher le cœur de cet homme qui a fait rire le monde entier et s’est mis à pleurer. C’était quelque chose qui m’a bouleversé. Et pour moi c’était le moment le plus fort de ma carrière. C’est un exemple de fierté.

Vous étés, depuis très longtemps, au plus haut niveau de votre art. Comment jugez-vous votre parcours ?

En 40 ans, vous devez imaginer qu’on a beaucoup de souvenirs. Mais le premier a quand même été l’expérience avec Brigitte Bardot qui, à 45 ans à l’époque, venait avec nous. C’était à l’époque du groupe « Los Reyes », alors qu’on n’était pas encore connu. Elle venait avec nous dans les soirées privées, en surprise. Elle mettait une perruque et une jupe et elle dansait. Les gens disaient que c’était incroyable comme la danseuse ressemblait à Brigitte Bardot. Et ça, ça a été le début de la légende des Gipsy Kings, à l’époque et une reconnaissance terrible. Aussi, on m’a toujours demandé ce que j’aimais comme musique en dehors du flamenco, et je répondais toujours : « les Beatles, les Rolling Stones et d’autres ». Et un jour, Mick Jagger est venu me voir, alors qu’on jouait au festival du film à Cannes. C’était en 1987 ou 1988. Je me rappelle, il m’avait confié qu’il adorait notre musique et qu’il aimait ce que l’on fait.

Vous vous imaginez ce que cela représente ! Cela a été un souvenir extraordinaire. Et comme ça, dans le monde entier, on a fait des rencontres fabuleuses. Ensuite, j’ai eu la chance d’être, pendant 25 ans, notamment depuis 1996., ambassadeur de la paix pour l’UNESCO. Et pour cette nomination, j’ai été parrainé par le Commandant Cousteau. Ce qui m’a permis d’être présent lors du premier anniversaire du traité de paix signé entre Shimon Peres et Yasser Arafat, à Oslo. Cela m’a permis d’être aussi aux côtés du Dalaï-lama, ou de l’Abbé Pierre et de beaucoup d’autres personnalités. Cette époque a été aussi pour moi extraordinaire, avec des rencontres fabuleuses, que je n’aurais jamais imaginé, même en rêves.

Quels sont vos projets futurs ?

Personnellement, ce que je souhaite pour la sortie d’Unidos, c’est que le public ressente le même plaisir que nous avons eu à l’enregistrer, à le partager entre musiciens, à le faire écouter à nos amis et à nos familles qui se sont régalés. Et ressentir cette émotion que nous avons eu à l’interpréter en studio. Mais pour nous, c’est vraiment une fierté d’avoir fait cet album. Après l’époque que nous traversons avec ce Covid-19 et les problèmes dans le monde entier, je crois que nous avions besoin de bonheur musical de ce genre, de spontanéité, de chaleur et de vrais sentiments.

Vous êtes bien ancrés en Afrique, notamment dans sa partie Nord. Quels liens entretenez-vous avec le continent ?

Oui je suis très ancré en Afrique du Nord, puisque mon père est Marocain et ma mère Algérienne. Je suis né et j’ai grandi en France, mais ce sont des liens qui sont très forts pour moi. C’est en quelque sorte des racines. Je dis souvent que sans les racines, il n’y a pas de feuilles et de fleurs. Donc, on n’existerait pas aujourd’hui et on ne pourrait même pas en parler, si on ne les avait pas. Ce qui est extraordinaire, c’est qu’avec Hasna qui est Marocaine, on s’est retrouvé dans nos origines.

Sans compter cette musique gipsy qui nous a comblés. On adore particulièrement l’Afrique du Nord (Tunisie, Algérie), surtout le Maroc. On est très fier de l’album que nous avons produit. Parce qu’avec Hasna comme ambassadrice de la musique orientale, c’est un bel hommage que nous rendons à ces peuples qui sont de l’autre côté de la Méditerranée. Et c’est notre façon de leur dire que nous les aimons, qu’ils soient de l’autre côté de la Méditerranée, ou en France et en Europe. Je suis sûr que notre album aura une résonance très forte chez ces peuples-là.

Vous avez invité Hasna sur votre nouvel album « Unidos », pouvez-vous nous parler de votre rencontre avec la diva marocaine ?

La rencontre avec Hasna date de 1992-1993. J’ai tout de suite vu que c’était une chanteuse extraordinaire. A tel point que je l’ai invitée dans nos concerts qu’on réalisait, à l’époque, au Sporting, à Monaco, en Turquie, et un peu partout en Europe. Pendant des années, on s’est rencontré compte tenu des demandes et des opportunités de la présenter sur scène. Elle a toujours été une chanteuse extraordinaire. Elle a fait toute sa carrière au Moyen-Orient où elle a enregistré une dizaine d’albums. Et aujourd’hui, je suis vraiment très heureux de la présenter avec Chico & The Gypsies.

Nous avons fait un album de duos extraordinaires. Ça a été une aventure fabuleuse. On a commencé par quelques enregistrements pour s’amuser, et finalement, c’est devenu un album consistant et beau, plein d’émotions. La voix des chanteurs avec Hasna, ça a été une harmonie extraordinaire. Donc je suis vraiment heureux, aujourd’hui, de présenter cet album « Unidos ».

D’autant que pour moi, « Unidos », c’est fédérer deux cultures. C’est une passerelle entre l’Orient et l’Occident et on montre que la culture, en particulier la chanson, c’est un fer de lance pour promouvoir l’amitié, la tolérance et la bienveillance. Dans toutes les chansons que nous chantons, il y a exactement ces thèmes, l’amour en particulier. C’est vraiment la première fois qu’on va aussi loin dans un album gipsy-oriental, un album de fusion qui, à mon avis, fera date.

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Après 40 ans de carrière, êtes-vous dans la dynamique de former une nouvelle génération d’artistes, en guise de préparation de la relève ?

Oui dans la culture gitane, il y a un vrai vivier de talents, guitaristes, chanteurs. Il y a une nouvelle génération qui est vraiment très forte. Elle a été bercée par les sons des Gipsy Kings ou Chico & The Gypsies. Mais, ce qui est incroyable, c’est le niveau de qualité de certains jeunes qui arrivent. Je suis sûr que dans les années à venir, on aura quelques surprises de musiciens ou chanteurs gipsy qui vont nous étonner. Et puis, c’est bien que la transmission et la relève soient assurées par ces artistes en devenir.

A lire : L’album « Unidos » de Chico & The Gypsies, une union entre les chants en arabe et en espagnol

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