CEDEAO, Vers la levée des sanctions contre le Niger : pour quoi faire ?


Lecture 4 min.
Bola Tinubu, président en exercice de la CEDEAO
Bola Tinubu, président en exercice de la CEDEAO

La CEDEAO s’apprête à tenir un sommet extraordinaire des chefs d’État, samedi prochain. La priorité des priorités de ce sommet, c’est la question du retrait des pays de l’AES, conséquence des sanctions prises contre le Niger.

L’annonce faite par le Burkina Faso, le Mali et le Niger de se retirer de la CEDEAO fait courir au sein de l’Organisation sous-régionale. Au sein de la CEDEAO, cette décision tombée tel un couperet a pris tout le monde de court. Depuis lors, c’est le branle-bas de combat. Les tractations sont en cours pour empêcher le pire. Dans ce sens, un sommet extraordinaire des chefs d’État de la Communauté se tiendra samedi au siège, à Abuja. Au menu des discussions, la question du retrait des trois pays.

Un document officiel rendant compte des avantages et des inconvénients du retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger sera examiné par les dirigeants. Une chose est certaine : du côté de la CEDEAO, le temps est au dialogue. Le temps des menaces est révolu. On est prêt à lever les sanctions contre le Niger avant le début du mois de ramadan, le 10 mars. L’important, c’est de tout faire pour maintenir les trois pays démissionnaires dans l’Organisation. Mais, y a-t-il encore un espoir de voir les trois dirigeants revenir sur leur position ?

La CEDEAO prise à son propre piège

Lorsqu’on suit objectivement l’évolution des événements politiques en Afrique de l’Ouest, ces dernières années, il est difficile de ne pas donner raison aux détracteurs de la CEDEAO. Tant l’organisation a brillé par son silence sur les révisions constitutionnelles débouchant sur les troisièmes mandats ou les violations flagrantes des droits humains par des régimes prétendument démocratiques. Les derniers exemples encore très présents dans les esprits sont ceux de la Guinée d’Alpha Condé et de la Côte d’Ivoire d’Alassane Ouattara où les contestations des populations vent debout contre le troisième mandat ont été réprimées dans le sang. Au nez et à la barbe de la CEDEAO qui a pourtant joué aux abonnés absents. Et a même félicité les dirigeants réélus dans ces conditions pour un troisième mandat. Ne parlons pas du Togo où la famille Gnassingbé a instauré une dynastie qui règne sans partage sur le pays depuis 1967.

Punir le viol des règles démocratiques par le viol de ses propres textes

Mais, il suffit que des militaires s’emparent du pouvoir – ce qui est normalement condamnable – pour que l’organisation montre les muscles, prenne des sanctions qui, d’ailleurs, ne sont pas prévues dans ses textes fondateurs. En d’autres termes, la CEDEAO punit le viol des règles démocratiques par le viol de ses propres textes. Toutes choses que les militaires au pouvoir dans les pays de l’AES n’hésiteront à brandir dans leur argumentaire contre l’organisation.

Et de tenir dur dans leur nouvelle position. Dans une intervention faite samedi, le capitaine Ibrahim Traoré du Burkina Faso s’est, une fois de plus, attaqué à la CEDEAO sans fioritures. « Nous étions surpris de voir la CEDEAO apparaître, je ne sais d’où avec une force en attente. Où était cette force lorsque des milliers et des milliers de Nigériens étaient tués par des terroristes ? Où était cette force, lorsque des milliers de Burkinabè et de Maliens mouraient sous les balles des terroristes (…) ? », s’est interrogé le jeune dirigeant. Avant de poursuivre : « La CEDEAO n’a jamais fait un communiqué pour féliciter une victoire de nos armées (contre les terroristes, ndlr). Où est cette CEDEAO des peuples ? »

Avec son indifférence face à ces problèmes réels rencontrés par ses pays membres, la CEDEAO a creusé sa propre tombe. L’organisation parviendra-t-elle à garder les trois pays démissionnaires ? Rien n’est moins sûr.

Avatar photo
Historien, Journaliste, spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne
Facebook Linkedin
Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News