Cap-Vert : 37 ans d’indépendance sans Amílcar Cabral


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La République du Cap-Vert célèbre ce jeudi son indépendance, acquise en 1975, en l’absence d’Amílcar Cabral. Le leader de la lutte anti-coloniale fut assassiné à Conakry, en Guinée, à la veille de la proclamation de l’indépendance de son pays et de la Guinée-Bissau, deux Etats dont il souhaitait l’unification.

Praia célèbre ce jeudi le 37e anniversaire de l’indépendance du Cap-Vert, rendue possible par le combat d’Amílcar Lopes Cabral. Mais cette figure majeure de la lutte anticoloniale au Cap-Vert et en Guinée-Bissau ne la verra jamais.

Né en 1924, en Guinée portugaise (actuelle Guinée-Bissau), Amílcar Lopes Cabral migre très rapidement avec sa famille vers Praia. Quelques années plus tard, il part étudier à l’Université de Lisbonne où il rencontre de nombreux militants indépendantistes de l’empire colonial portugais. A la suite de sa formation en métropole, Cabral décide de rentrer en Guinée-Bissau en tant qu’agronome mais s’engage rapidement en politique, notamment en fondant le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC) avec son demi-frère, Luis Cabral (futur président de Guinée-Bissau) et Aristides Pereira (futur président du Cap-Vert). Le programme du nouveau parti repose sur la lutte armée contre la présence portugaise, à partir de bases arrières dans les pays limitrophes.

Le Cap-Vert et la Guinée Bissau : un seul Etat pour Cabral

Parallèlement, Amílcar Cabral engage une intense activité diplomatique afin de mobiliser la communauté internationale en faveur du combat pour l’indépendance. Cette stratégie s’avère payante puisqu’en 1972, le PAIGC est considéré par les Nations-unies comme « véritable et légitime représentant des peuples de la Guinée et du Cap-Vert ». Toutefois, le mouvement est traversé par une vive opposition entre les métis cap-verdiens et les noirs guinéens. Cette rivalité est même instrumentalisée par les autorités portugaises, qui espèrent à cette époque la conservation du Cap-Vert en cas de défaite sur le continent. La double culture de Cabral devient dès lors très vite problématique.

Après vingt ans de lutte et tout près de la victoire, il est assassiné le 20 janvier 1973 en Guinée-Conakry par des membres de son propre parti, avec la complicité de la police politique portugaise et des complices guinéens. Le métissage culturel de ce dernier et la proximité de son demi-frère Luis (de mère portugaise) avec l’élite cap-verdienne, réputée proche du colon portugais, gênait beaucoup de militants de son mouvement ainsi que le président guinéen, Ahmed Sékou Touré. Le projet d’union entre la Guinée-Bissau et le Cap-Vert, souhaité par Amílcar Cabral, était en concurrence avec celui de « Grande Guinée », porté par Sékou Touré. Cette union des Guinéens, qui était négociée entre Bissau et Conakry, proches idéologiquement et sociologiquement, reposait notamment sur la suprématie des Noirs et se heurtait aux métis capverdiens. A contrario, le projet de Cabral prônait la collaboration des Noirs et des Métis au sein d’un État. Cependant, aucun de ces deux projets n’aboutira. Le rêve de Cabral sera définitivement enterré après le coup d’Etat de 1980 en Guinée-Bissau. L’indépendance de la Guinée-Bissau avait été reconnue le 10 septembre 1974 par le Portugal, soit une année avant celle du Cap-Vert.

Amílcar Lopes Cabral restera dans l’histoire comme un grand révolutionnaire panafricaniste, aussi bien dans son pays qu’en Afrique. Les récits sur le personnage sont nombreux et plusieurs sites, tels que l’aéroport de Sal au Cap-Vert, ou encore le lycée Cabral à Ségou, au Mali, rendent hommage à sa mémoire.

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